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Priorit¨¦s de l'Afrique ¨¤ CdP26 et au-del¨¤

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Priorit¨¦s de l'Afrique ¨¤ CdP26 et au-del¨¤

L'Afrique reste exclue du financement du changement climatique.
28 Octobre 2021
CEA
Jean-Paul Adam, directeur de la division Technologie, changement climatique et ressources naturelles ¨¤ la Commission ¨¦conomique des Nations Unies pour l'Afrique.

Le Seychellois Jean-Paul Adam est directeur de la division Technologie, changement climatique et ressources naturelles ¨¤ la Commission ¨¦conomique des Nations Unies pour l'Afrique. Il a parl¨¦ ¨¤ Wanjohi Kabukuru pour Afrique Renouveau des priorit¨¦s de l'Afrique lors des n¨¦gociations mondiales sur le climat (CdP26) qui se d¨¦rouleront ¨¤ Glasgow du 31 octobre au 12 novembre 2021 :

Afrique Renouveau : Quelles sont les priorit¨¦s de l'Afrique ¨¤ la CdP26 et pourquoi ?

Jean-Paul Adam : Le financement du climat, le transfert de technologie et le renforcement des capacit¨¦s sont en effet les priorit¨¦s qui sont propos¨¦es ¨¤ la CdP26. La question du financement est importante car elle est, en quelque sorte, la condition pr¨¦alable ¨¤ la r¨¦alisation de nombreux autres objectifs, notamment le transfert de technologies. La mobilisation de fonds pour lutter contre le changement climatique, en particulier pour l'adaptation, est plus urgente que jamais.

Le plaidoyer africain pour garantir le respect des engagements ant¨¦rieurs sera essentiel. En fin de compte, nous ne pouvons pas s¨¦parer le programme de r¨¦silience climatique du programme de d¨¦veloppement. Nous ne pouvons pas avoir l'un sans l'autre. ?Cependant, la plus grande pi¨¨ce manquante du puzzle est le financement initial.

Les pays d¨¦velopp¨¦s ont promis de consacrer 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 ¨¤ l'action climatique dans les pays en d¨¦veloppement. O¨´ en sommes-nous ?

Il est franchement absurde que des milliers de milliards de dollars soient mobilis¨¦s dans le cadre d'une relance li¨¦e ¨¤ une pand¨¦mie, mais que les 100 milliards de dollars restent ¨¤ verser, et pourtant, en pourcentage des 20 000 milliards de dollars mobilis¨¦s par les pays d¨¦velopp¨¦s pour lutter contre le COVID-19, c'est franchement n¨¦gligeable.

Les 100 milliards de dollars ne repr¨¦sentent qu'une partie de ce qui est n¨¦cessaire pour faire face au changement climatique, et ils devraient ¨ºtre revus de toute urgence pour correspondre ¨¤ l'ampleur du d¨¦ficit de financement. M¨ºme si des mod¨¨les de financement plus innovants sont mis en place, les nouveaux instruments de financement ne devraient pas remplacer les 100 milliards de dollars promis par an.

Nous devons ¨¦galement profiter de ce moment de l'histoire pour red¨¦finir notre fa?on d'envisager le d¨¦veloppement - o¨´ il faut regarder au-del¨¤ du PIB par habitant, et s'attaquer aux facteurs sous-jacents qui affectent la vuln¨¦rabilit¨¦ des pays. ?Ceci est particuli¨¨rement pertinent pour les petits ?tats insulaires en d¨¦veloppement (PEID).

Les pays africains prennent des positions proactives et s'engagent ¨¤ passer aux ¨¦nergies renouvelables et ¨¤ investir dans leur propre r¨¦silience. ?De nombreux pays ont d¨¦j¨¤ un bilan net positif et absorbent plus d'¨¦missions qu'ils n'en cr¨¦ent. Les pays africains sont ambitieux en ce qui concerne les mod¨¨les de d¨¦veloppement ¨¤ faible ¨¦mission de carbone qu'ils souhaitent adopter. ?Ce qui manque, c'est l'investissement pour d¨¦bloquer cette opportunit¨¦.

L'un des ¨¦l¨¦ments cl¨¦s de la CdP26 est que l'Afrique reste exclue d'une grande partie des financements disponibles dans le cadre du changement climatique. Les march¨¦s priv¨¦s ne sont pas suffisamment d¨¦velopp¨¦s pour canaliser les investissements indispensables vers des projets africains de r¨¦silience climatique, ce qui constituerait un ¨¦l¨¦ment cl¨¦ de la solution.

Compte tenu du fardeau de la dette des pays africains, quelles sont les autres options pour stimuler le financement ?

La question de la dette est un d¨¦fi dans le contexte de la pand¨¦mie du COVID-19, o¨´ la marge de man?uvre budg¨¦taire de tous les pays africains continue d'¨ºtre limit¨¦e, et o¨´ les pays sont incapables d'assurer le service de leur dette avec des revenus en baisse.

CdP: Qu'est-ce que c'est ?

COP signifie Conf¨¦rence des parties ¨¤ la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 1992, qui a pos¨¦ les jalons de toute la coop¨¦ration internationale en mati¨¨re de climat.

La COP est l'organe d¨¦cisionnel supr¨ºme pour la mise en ?uvre de la convention et des instruments de suivi tels que l'accord de Paris de 2015.

Se r¨¦unissant g¨¦n¨¦ralement une fois par an, la COP examine les rapports nationaux sur les r¨¦ductions d'¨¦missions et autres mesures climatiques. Glasgow accueillera la vingt-sixi¨¨me COP.

Quel est l'enjeu ?

Sous la pr¨¦sidence du Royaume-Uni, la CdP26 doit ¨ºtre un tournant. Elle doit livrer des actions audacieuses, ¨¤ grande ¨¦chelle et rapides de la part des dirigeants nationaux, pour les populations et la plan¨¨te.

Les pays doivent se rassembler et collaborer pour r¨¦tablir la confiance, redynamiser l'action et livrer pleinement les promesses faites dans l'Accord de Paris.?

Les trois grandes priorit¨¦s de la CdP26 sont les suivantes :?

Maintenir l'augmentation de la temp¨¦rature mondiale ¨¤ un maximum de 1,5 degr¨¦ Celsius par des r¨¦ductions rapides et audacieuses des ¨¦missions et des engagements nets de z¨¦ro.?

Augmenter le financement international de l'adaptation pour atteindre au moins la moiti¨¦ du total des d¨¦penses consacr¨¦es ¨¤ l'action climatique.?

Respecter l'engagement existant de fournir 100 milliards de dollars de financement international pour le climat chaque ann¨¦e afin que les pays en d¨¦veloppement puissent investir dans les technologies vertes et prot¨¦ger les vies et les moyens de subsistance contre l'aggravation des impacts climatiques.

Pour plus d'informations sur les Nations Unies et le changement climatique, consultez le site : /en/climatechange.

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Toutefois, des possibilit¨¦s de financement novateur se font jour. Il est n¨¦cessaire que les investissements du secteur priv¨¦ fassent partie de la solution en apportant des m¨¦canismes financiers innovants tels que le financement mixte, les obligations vertes et bleues, et les ¨¦changes de dettes, qui peuvent tirer parti de ressources publiques limit¨¦es pour mobiliser les ¨¦normes investissements n¨¦cessaires ¨¤ l'action climatique. Par exemple, nous nous f¨¦licitons des r¨¦cents commentaires de la Banque mondiale, qui s'est montr¨¦e int¨¦ress¨¦e par l'¨¦laboration de cadres pour la conversion de dettes en mesures d'adaptation au climat (all¨¨gement de la dette en ¨¦change de mesures climatiques prises par les pays).

L'¨¦conomie africaine de demain doit ¨ºtre r¨¦siliente face aux risques d'aggravation du changement climatique et des dommages ¨¦cologiques. En donnant la priorit¨¦ aux solutions fond¨¦es sur la nature et en plaidant pour un prix du carbone ¨¦quitable pour le d¨¦veloppement lors de la CdP26 ¨¤ Glasgow, il est possible de mobiliser des ressources suppl¨¦mentaires pour l'¨¦conomie verte et bleue de l'Afrique.

Pouvez-vous nous en dire plus sur les obligations vertes et bleues ?

? la Commission ¨¦conomique des Nations Unies pour l'Afrique, nous travaillons avec des partenaires pour d¨¦velopper davantage les possibilit¨¦s de financement par le biais de m¨¦canismes de march¨¦, notamment les obligations vertes ou bleues. Les pays africains ont besoin de m¨¦canismes suppl¨¦mentaires pour lever des fonds en plus des 100 milliards de dollars, s'ils sont fournis. Il est essentiel que les 100 milliards de dollars soient mobilis¨¦s, mais nous devons ¨¦galement comprendre qu'il s'agit d'un point de d¨¦part et que les besoins r¨¦els vont bien au-del¨¤ de ce chiffre.?

Les obligations vertes et bleues sont des opportunit¨¦s qui sont utilis¨¦es sur les march¨¦s d¨¦velopp¨¦s depuis de nombreuses ann¨¦es, mais malheureusement, l'Afrique ne repr¨¦sente aujourd'hui que moins de 1 % du march¨¦ mondial des obligations vertes et bleues. En exploitant correctement cette opportunit¨¦ d'investissements bas¨¦s sur le march¨¦, on peut transformer des milliards en trillions.

Certains pays ont ¨¦mis avec succ¨¨s des obligations vertes et bleues. L'?gypte a ¨¦mis une obligation dans le domaine des ¨¦nergies renouvelables en 2020 et les Seychelles ont ¨¦mis une obligation bleue en 2018. L'id¨¦e est de fournir des financements ¨¤ des taux plus avantageux li¨¦s ¨¤ des investissements dans la r¨¦silience climatique.?

Les obligations bleues sont associ¨¦es ¨¤ l'¨¦conomie bleue et aux oc¨¦ans. Comment sont-ils li¨¦s ¨¤ l'action contre le changement climatique et au d¨¦veloppement durable ?

Le changement climatique nous a donn¨¦ de grandes le?ons sur les oc¨¦ans. Nous ne pouvons pas simplement dire "prenons tout et exploitons-le". De nombreux pays ont connu le blanchiment des coraux, qui a un impact imm¨¦diat sur les stocks de poissons. Le r¨¦chauffement de l'oc¨¦an affecte la migration d'esp¨¨ces cl¨¦s comme le thon. La mer n'est pas seulement un espace d'exploitation, c'est un espace de d¨¦veloppement. C'est un espace qui permet de relier les pays, il s'agit de routes commerciales, de connectivit¨¦, de protection de l'environnement, de tourisme, de ressources naturelles, de p¨ºche et de toute la vision de l'oc¨¦an. C'est l'¨¦conomie bleue.?

Les concepts d'¨¦conomie verte ou d'¨¦conomie bleue visent pr¨¦cis¨¦ment ¨¤ ce que la sant¨¦ de l'¨¦cosyst¨¨me naturel soit correctement prise en compte dans les activit¨¦s ¨¦conomiques qui g¨¦n¨¨rent de la richesse.

Pour nous, l'¨¦conomie bleue consiste ¨¤ cr¨¦er un nouveau paradigme ¨¦conomique pour les pays africains - au-del¨¤ de l'extraction pour l'exportation - et plut?t ¨¤ construire durablement des cha?nes de valeur fond¨¦es sur une gestion astucieuse des ressources naturelles oc¨¦aniques. La mer offre de nombreuses possibilit¨¦s et l'¨¦conomie bleue est un ¨¦l¨¦ment cl¨¦ de la durabilit¨¦. En un sens, l'approche de l'¨¦conomie bleue permet ¨¤ l'Afrique de se r¨¦approprier ses oc¨¦ans.

La course vers le z¨¦ro ¨¦mission met l'accent sur une "transition juste". Qu'est-ce que cela signifie et comment cela affectera-t-il l'Afrique ?

La "transition juste" signifie simplement que nous devons reconna?tre que l'Afrique part d'une base plus basse en termes de transition vers une ¨¦conomie ¨¤ faible ¨¦mission de carbone. L'Afrique n'est pas encore industrialis¨¦e, ce qui signifie que les changements n¨¦cessaires risquent de provoquer davantage de perturbations dans la soci¨¦t¨¦. Nous ne devons pas faire payer les personnes les plus vuln¨¦rables. Nous devons adopter une approche qui soit favorable au d¨¦veloppement et aux pauvres et qui permette au final ¨¤ un maximum de personnes de sortir de la pauvret¨¦ et d'avoir une bonne qualit¨¦ de vie.

La priorit¨¦ pour l'industrialisation de l'Afrique est l'acc¨¨s ¨¤ l'¨¦lectricit¨¦. La bonne nouvelle est que les ¨¦nergies renouvelables sont la forme la moins ch¨¨re de production d'¨¦nergie disponible et il est donc logique que l'Afrique investisse dans les ¨¦nergies renouvelables. N¨¦anmoins, nous devons reconna?tre que dans certaines circonstances, l'am¨¦lioration de la capacit¨¦ de production de base peut n¨¦cessiter des investissements suppl¨¦mentaires dans les combustibles fossiles pour permettre l'augmentation des ¨¦nergies renouvelables ou leur mise en ligne.

Une "transition juste" signifie que nous faisons de la lutte contre la pauvret¨¦ notre priorit¨¦ num¨¦ro un. C'est en s'attaquant ¨¤ la pauvret¨¦ que nous trouverons la solution pour un d¨¦veloppement ¨¤ faible ¨¦mission de carbone.

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