Pour nombre d'entre nous, avoir acc猫s 脿 l'eau revient 脿 ouvrir un robinet. Nous payons la facture et l'eau est toujours disponible. Elle est claire, propre et en abondance, et nous n'avons donc jamais 脿 la g茅rer pour nous d茅salt茅rer, nous laver les mains, faire le m茅nage, irriguer les cultures et abreuver le b茅tail.
Pourtant, pour des millions d'Africains, trouver suffisamment d'eau pour boire, se laver et cultiver des aliments est une question qui se pose au d茅but de chaque journ茅e. Les femmes africaines sont particuli猫rement confront茅es 脿 ce probl猫me car la grande majorit茅 d'entre elles sont responsables de la gestion de l'eau dans le foyer.
Aujourd'hui, pr猫s de 90 % des exploitations familiales dans les zones rurales d'Afrique subsaharienne n'ont pas acc猫s 脿 l'eau courante. Par cons茅quent, les femmes et les filles parcourent jusqu'脿 deux heures et demie de distance aller-retour pour aller chercher l'eau n茅cessaire aux besoins de base. Le temps et l'茅nergie qu'elles consacrent 脿 cette t芒che diminuent leur disponibilit茅 脿 s'occuper des jardins familiaux et 脿 vendre leurs produits.
Le changement climatique d茅clenche des ph茅nom猫nes m茅t茅orologiques extr锚mes dans chaque r茅gion du continent, ce qui ne fait qu'aggraver la situation de l'eau. Les inondations, les s茅cheresses, la d茅sertification des terres cultiv茅es et l'augmentation du niveau de la mer deviennent chaque jour plus apparentes. Le Global Climate Index 2021 classe le Mozambique, Madagascar et le Zimbabwe parmi les 20 pays les plus touch茅s par les ph茅nom猫nes m茅t茅orologiques extr锚mes entre 2000 et 2019.
Les changements climatiques mondiaux continueront 脿 menacer l'approvisionnement des ressources en eau limit茅es de l'Afrique. D'ici 脿 ce que nous atteignions 2掳C au-dessus des niveaux pr茅industriels, environ 15 pour cent de la population mondiale conna卯tra de graves p茅nuries d'eau, et le nombre de personnes vivant en situation de p茅nurie d'eau absolue augmentera de 40 pour cent.
Le patriarcat d茅favorise les femmes en limitant syst茅matiquement leur acc猫s 脿 l'information, 脿 la technologie, 脿 la prise de d茅cision et 脿 la propri茅t茅 fonci猫re. Des pratiques discriminatoires et des restrictions sociales de longue date emp锚chent la plupart des femmes de prendre des d茅cisions sur l'utilisation de l'eau. C'est particuli猫rement le cas dans les associations communautaires pour l'eau, y compris les organisations de producteurs, o霉 moins de 30 pour cent des agricultrices ont un r么le dirigeant. En outre, seuls 20 pour cent des femmes s茅n茅galaises ont acc猫s 脿 des services financiers, tels que des pr锚ts et des assurances.
Ne pas donner de pouvoir aux femmes est une erreur, 茅conomiquement et moralement. Les recherches r茅centes de notre Alliance de Bioversity International et du CIAT au S茅n茅gal d茅montrent que les femmes peuvent jouer et jouent un r么le de premier plan dans la mise en place de la s茅curit茅 de l'eau des m茅nages, l'augmentation de la production agricole et l'am茅lioration de la sant茅 des familles.听
L'acc猫s aux puits et 脿 l'eau courante r茅duit la charge des femmes et le temps qu'elles consacrent aux m茅thodes de collecte d'eau de faible technicit茅. Par cons茅quent, cela leur donne plus de temps pour se concentrer sur d'autres activit茅s, comme la culture de l茅gumes. Ce faisant, elles produisent des r茅coltes plus importantes et de meilleure qualit茅 脿 vendre, et les membres de la famille consomment plus de l茅gumes et boivent de l'eau propre. Dans l'ensemble, l'augmentation des revenus des femmes d茅pend davantage du syst猫me d'approvisionnement en eau que celle des hommes (35 % contre 33 %).听
Des femmes et des communaut茅s autonomes donnent de meilleurs r茅sultats
L'agriculture irrigu茅e est la norme dans les 茅conomies d茅velopp茅es et est comparativement r茅pandue dans d'autres r茅gions. Environ 14 pour cent des terres cultiv茅es en Am茅rique latine et 37 pour cent en Asie sont irrigu茅es. En Afrique, ce chiffre s'茅l猫ve 脿 seulement 6 pour cent. Les syst猫mes d'irrigation repr茅sentent donc une opportunit茅 pour stimuler une croissance 茅conomique durable et inclusive et donner aux femmes les moyens d'am茅liorer l'茅conomie de leur foyer.
Les services d'eau 脿 usages multiples (MUS) sont une approche innovante des organes gouvernementaux locaux et des organisations 脿 but non lucratif qui confient aux villageois la responsabilit茅 de la conception et de la gouvernance de leur infrastructure d'eau pour les diff茅rents besoins de la communaut茅 - de la boisson au lavage, de l'irrigation 脿 l'utilisation du b茅tail. Cette infrastructure comprend des r茅servoirs de collecte, des tuyaux, des robinets, des points d'acc猫s s茅curis茅s pour les personnes et le b茅tail et plus encore.
Faire le bon choix
Les femmes repr茅sentent 50 % de la main-d'艙uvre africaine. Pourquoi, alors, combattons-nous notre plus grande menace existentielle - la p茅nurie d'eau - avec une main li茅e dans le dos ?
Lorsque les femmes sont co-conceptrices des technologies d'irrigation et partenaires 茅gales dans la mise en 艙uvre des solutions, l'emplacement, l'objectif et l'茅chelle des projets sont optimis茅s en fonction des droits et des besoins des femmes, ce qui profite 脿 tout le monde.
L'augmentation de la fr茅quence et de la gravit茅 des vagues de chaleur, des pluies et des s茅cheresses continuera 脿 limiter les ressources en eau de l'Afrique. La concurrence pour l'eau entre les groupes d'utilisateurs, comme les agriculteurs et les 茅leveurs, ou entre les communaut茅s des zones sup茅rieures et inf茅rieures, pourrait entra卯ner une instabilit茅 sociale, voire un conflit civil. Si les femmes contribuent aux solutions, nous pourrions 茅viter ces r茅sultats ind茅sirables et assurer la s茅curit茅 de l'eau.
J'appelle les gouvernements nationaux et locaux d'Afrique 脿 faire ce qu'il faut. Allouons les fonds et rassemblons la volont茅 politique pour donner aux femmes les moyens d'agir dans la bataille pour am茅liorer et maintenir l'approvisionnement en eau de l'Afrique.
Caroline Mwongera est chercheuse en chef sur les syst猫mes agricoles et le changement climatique 脿 l'Alliance de Bioversity International et CIAT.听
