Les populations autochtones repr¨¦sentent environ 476 millions de personnes vivant dans 90 pays du monde. Elles parlent une majorit¨¦ ¨¦crasante des quelques 7 000 langues parl¨¦es dans le monde, et repr¨¦sentent 5 000 cultures diverses.

Le COVID-19 a fait peser une grave menace sur ces peuples qui n'ont d¨¦j¨¤ pas acc¨¨s aux soins m¨¦dicaux et services essentiels. Pourtant, les peuples autochtones cherchent leurs propres solutions ¨¤ cette pand¨¦mie, en utilisant leurs connaissances, pratiques, ainsi que des mesures pr¨¦ventives traditionnelles et innovantes.

Dans la s¨¦rie ??Nous sommes autochtones??, l¡¯Impact Universitaire des Nations Unies (UNAI) s¡¯est entretenu avec des universitaires et des militants autochtones pour examiner les fa?ons dont la communaut¨¦ autochtone mondiale contribue ¨¤ la construction d¡¯un avenir plus sain et plus durable pour nous tous.

R¨¦partis partout dans le monde, de l'Arctique au Pacifique Sud, les peuples autochtones sont g¨¦n¨¦ralement consid¨¦r¨¦s comme les descendants des ??peuples premiers??, occupant une r¨¦gion g¨¦ographique ¨¤ l¡¯¨¦poque o¨´ des peuples de cultures ou d¡¯origines ethniques diff¨¦rentes sont arriv¨¦s. Ces derniers arrivants sont par la suite devenus dominants par le biais de la conqu¨ºte, de l¡¯occupation, du peuplement ou d¡¯autres moyens.

Compte tenu de la diversit¨¦ des 476 millions d¡¯autochtones vivants dans l¡¯ensemble des r¨¦gions du monde, une d¨¦finition officielle du terme ? autochtone ? n¡¯a ¨¦t¨¦ adopt¨¦e par aucun organe du syst¨¨me des Nations Unies. Au lieu de cela, le syst¨¨me onusien a ¨¦labor¨¦ les ¨¦l¨¦ments suivants pour une compr¨¦hension de ce terme :

  • Auto-identification en tant que peuples autochtones au niveau individuel en tant que peuples autochtones et acceptation par la communaut¨¦ ;
  • Continuit¨¦ historique avec les soci¨¦t¨¦s pr¨¦coloniales et/ou celles qui ont pr¨¦c¨¦d¨¦ les colonies de peuplement ;
  • Lien solide avec les territoires et les ressources naturelles environnantes ;
  • Syst¨¨mes sociaux, ¨¦conomiques et politiques distincts ;
  • Langues, cultures et croyances distinctes, etc.

? l'¨¦poque moderne, les communaut¨¦s autochtones mondiales se trouvent confront¨¦es ¨¤ des conditions de vie d¨¦plorables en raison du d¨¦veloppement industriel, du changement climatique, et maintenant de la pand¨¦mie li¨¦e au COVID-19. Capables de r¨¦soudre des probl¨¨mes de fa?on constructive, les populations autochtones ont d¨¦j¨¤ prouv¨¦, collectivement et individuellement, qu'elles ¨¦taient infiniment r¨¦silientes face ¨¤ l¡¯adversit¨¦. Dans la s¨¦rie d'entretiens ??Nous sommes autochtones??, l¡¯Impact Universitaire des Nations Unies (UNAI) invite les leaders d'opinion autochtones des universit¨¦s du monde entier ¨¤ d¨¦battre, au lendemain de la pand¨¦mie de COVID-19, sur l'h¨¦t¨¦rog¨¦n¨¦it¨¦ culturelle, l'individualit¨¦ et la r¨¦silience des communaut¨¦s.

? titre d¡¯exemple, John Carver Scott, membre des tribus indiennes Tlingit et Ha?da d'Alaska, et directeur du , une organisation qui a coordonn¨¦ des initiatives favorisant l¡¯engagement des peuples autochtones dans la r¨¦duction des risques de catastrophes pour le compte de plusieurs organismes onusiens, dont le (UNDRR), a ainsi observ¨¦ que les consultations men¨¦es par les autochtones placent toujours au centre l'inclusion et la protection des a?n¨¦s, ce qui est d¡¯une importance capitale pendant la pand¨¦mie de COVID-19. Des processus d¨¦cisionnels inclusifs et culturellement compris en mati¨¨re de r¨¦duction des risques sont primordiaux pour r¨¦pondre aux besoins des membres de la communaut¨¦ qu'ils sont cens¨¦s servir.

Le professeur Simon Lambert, qui a ¨¦tudi¨¦ la g¨¦ographie ¨¦conomique ¨¤ l' (Nouvelle-Z¨¦lande), et membre des tribus Tuhoe et Ngati Ruapani, est un expert en r¨¦duction des risques de catastrophes dans le contexte autochtone, qui a particip¨¦ aux consultations li¨¦es ¨¤ la r¨¦ponse COVID-19 dans les communaut¨¦s autochtones. Il souligne qu¡¯il est essentiel de diffuser des donn¨¦es et du mat¨¦riel p¨¦dagogique dans les langues autochtones, m¨ºme si les traductions peuvent ??avoir un co?t ou prendre du temps ?. Les travaux multilingues et l'urgence de s'assurer que les langues autochtones soient incluses dans le discours acad¨¦mique restent un moyen de prot¨¦ger les m¨¦thodes autochtones de documentation qui sont depuis les premiers contacts coloniaux en voie de disparition.

En ce qui concerne les Objectifs de D¨¦veloppement Durable, Mylan Tootoosis, doctorant en ¨¦cologie politique ¨¤ l' (Canada) et n¨ºhiyawak (Cri des Plaines), r¨¦fl¨¦chit ¨¤ une union entre les autochtones et les paysages qui a pourtant permis autrefois d¡¯att¨¦nuer bon nombre de cons¨¦quences environnementales d¨¦vastatrices. ??Les Objectifs de D¨¦veloppement Durable fournissent le cadre dans lequel les pays et les organisations peuvent d¨¦battre et s'efforcer de tisser des liens avec les premiers peuples d¡¯Am¨¦riques?? ajouta-t-il.

Le Docteur Myrle Ballard, chercheuse et professeur anichinab¨¦e ¨¤ l' (Canada) consid¨¨re aussi le d¨¦veloppement durable comme faisant partie int¨¦grante de sa culture?: ??Depuis des si¨¨cles et bien avant ma naissance, notre peuple, mes anc¨ºtres utilisaient des mots comme "durabilit¨¦" parce qu'ils ¨¦taient toujours sur la terre.??

En outre, les jeunes autochtones rel¨¨vent les d¨¦fis li¨¦s ¨¤ l¡¯environnement, ¨¤ l'¨¦galit¨¦, ¨¤ l'¨¦ducation, et se pr¨¦parent ¨¤ mener des changements positifs. Au Groenland, la jeune universitaire et activiste Qivioq Nivi L?vstr?m travaille ¨¤ l' et ¨¦tudie au D¨¦partement d¡¯histoire culturelle et sociale de l'. Elle appartient ¨¤ la communaut¨¦ autochtone ??Kalaallit?? qui fait partie de l' ??Inuit Nunangat?? (la patrie ?natale des Inuits). Jeune femme active dans le domaine des droits environnementaux, Qivioq souligne que ??la majorit¨¦ des Kalaallit qui poursuivent des ¨¦tudes sup¨¦rieures sont des femmes??, avec essentiellement des femmes travaillant dans le domaine social et des droits de l'homme.

En d¨¦pit des nombreux d¨¦fis, l¡¯autochton¨¦it¨¦ reste forte dans le monde entier. Ainsi, les recherches montrent qu'il existe plus de 42 millions d¡¯autochtones en Am¨¦rique latine, soit pr¨¨s de 8 % de la population totale. En outre, plusieurs groupes autochtones dans des pays tels que la Chine, le Vietnam et l'Inde sont ¨¤ la pointe de la revitalisation socio-¨¦conomique gr?ce ¨¤ la relance des structures de gouvernance autochtones. De surcro?t, de l'appel ¨¤ la protection officielle des monuments mayas et azt¨¨ques au Mexique, ¨¤ la contestation des Massa?s d'Afrique de l'Est contre les programmes gouvernementaux d'assimilation, en passant par l'int¨¦gration de la bispiritualit¨¦ dans l'identit¨¦ moderne de genre par plusieurs communaut¨¦s autochtones d'Am¨¦rique du Nord, les t¨¦moignages d¡¯autochtones continuent d¡¯ouvrir la voie vers l¡¯autonomie des g¨¦n¨¦rations futures.

Qui sont les peuples autochtones ? Quelles sont leurs caract¨¦ristiques sociales, culturelles, ¨¦conomiques, politiques, leurs d¨¦fis et leurs apports ? Apporter des ¨¦l¨¦ments de r¨¦ponse dans un communiqu¨¦ simpliste ne ferait que reproduire ce qui se fait bien trop souvent au niveau des m¨¦dias grand public, des structures ¨¦ducatives et politiques. La s¨¦rie d'entretiens ??Nous sommes autochtones?? vise ¨¤ faire ¨¦voluer le discours sur les populations autochtones en tant que groupes vuln¨¦rables, menac¨¦s et en voie de disparition. De plus, cette s¨¦rie souhaite mettre en lumi¨¨re la fabuleuse diversit¨¦ des savoirs et le modernisme autochtone, alors que des universitaires autochtones continuent de surmonter les obstacles coloniaux pour construire des partenariats ¨¤ la crois¨¦e entre le militantisme et le monde acad¨¦mique. Ces entretiens favorisent un dialogue sur la fa?on dont les perspectives autochtones ¨¦voluent au sein des savoirs g¨¦n¨¦rationnels, des d¨¦finitions particuli¨¨res de ce qu¡¯il faut entendre par modernit¨¦, et face aux nombreuses traductions linguistiques qui ne peuvent ¨ºtre pr¨¦sent¨¦es comme unique vision du monde pan-autochtone.

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