1 avril 2008

Au cours des deux derni¨¨res d¨¦cennies, la biotechnologie moderne, une technologie qui consiste ¨¤ transf¨¦rer du mat¨¦riel g¨¦n¨¦tique d'un organisme dans un autre pour obtenir un certain trait caract¨¦ristique, a connu une ¨¦volution rapide et fait l'objet de nombreuses applications. Complexe, cette nouvelle technologie soul¨¨ve de nombreuses questions.
D'un c?t¨¦, elle pourrait contribuer au d¨¦veloppement durable et offrir des avantages consid¨¦rables pour l'humanit¨¦, comme la culture de plantes r¨¦sistantes ¨¤ la s¨¦cheresse, ce qui pourrait accro¨ªtre la productivit¨¦ dans les r¨¦gions qui souffrent de conditions m¨¦t¨¦orologiques s¨¦v¨¨res. La technologie pourrait aussi permettre de produire des vari¨¦t¨¦s ¨¤ haut rendement ou r¨¦sistantes aux maladies, ce qui peut contribuer ¨¤ am¨¦liorer les niveaux de production de denr¨¦es alimentaires.
De l'autre, les produits r¨¦sultant de cette technologie pourraient avoir des cons¨¦quences n¨¦gatives sur la diversit¨¦ biologique et la sant¨¦ humaine ainsi que des impacts socio-¨¦conomiques. Par exemple, l'introduction de plantes g¨¦n¨¦tiquement modifi¨¦es a soulev¨¦ certaines inqui¨¦tudes quant au transfert possible de g¨¨nes entre plantes cultiv¨¦es et sauvages, comme par la pollinisation crois¨¦e, qui peut avoir de graves cons¨¦quences. Beaucoup ont ¨¦galement exprim¨¦ la crainte que les plantes g¨¦n¨¦tiquement modifi¨¦es contenant par exemple un g¨¨ne les rendant r¨¦sistantes aux insectes nuisent non seulement aux insectes ravageurs mais aussi ¨¤ d'autres esp¨¨ces qui ne sont pas cibl¨¦es.
Lors de la Conf¨¦rence des Nations Unies sur l'environnement et le d¨¦veloppement (CNUED) de 1992, les d¨¦l¨¦gu¨¦s ont reconnu que si la technologie moderne pouvait contribuer de mani¨¨re significative ¨¤ am¨¦liorer la vie humaine et le d¨¦veloppement durable, son d¨¦veloppement et son utilisation n¨¦cessitaient l'adoption de mesures de s¨¦curit¨¦ appropri¨¦es. C'est ainsi que le Protocole de Cartagena sur la pr¨¦vention des risques biotechnologiques a ¨¦t¨¦ adopt¨¦ en tant que document annexe ¨¤ la Convention sur la biodiversit¨¦ biologique afin d'assurer le transfert, la manipulation et l'utilisation sans risque des organismes vivants modifi¨¦s (ovm) r¨¦sultant de la biotechnologie moderne.
Le Protocole encourage une politique de pr¨¦caution qui r¨¦affirme le principe 15 de la D¨¦claration de Rio de l'ONU selon lequel, ? en cas de risque de dommages graves ou irr¨¦versibles, l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de pr¨¦texte pour remettre ¨¤ plus tard l'adoption de mesures effectives visant ¨¤ pr¨¦venir la d¨¦gradation de l'environnement ?. Cette approche, ¨¦galement appliqu¨¦e dans d'autres accords internationaux, signifie, dans le cas du Protocole, que le gouvernement peut d¨¦cider, selon le principe de pr¨¦caution, de ne pas autoriser l'importation d'un organisme vivant modifi¨¦ dans son pays.
Le Protocole de Cartagena ¨¦tablit les r¨¨gles, les proc¨¦dures et les mesures qui r¨¦duisent les effets n¨¦gatifs des ovm sur la diversit¨¦ biologique, prenant en compte les risques pour la sant¨¦ humaine. Avant d'importer pour la premi¨¨re fois des ovm destin¨¦s ¨¤ ¨ºtre introduits dans l'environnement, les parties au Protocole sont tenues de faire une ¨¦valuation des risques au cas par cas afin de d¨¦terminer les risques potentiels de ces organismes. Elles doivent adopter d'autres mesures et strat¨¦gies pour r¨¦guler, g¨¦rer et contr?ler tout risque identifi¨¦ au cours de l'¨¦valuation et pr¨¦venir les mouvements d'ovm transfrontaliers non intentionnels.
Les pays doivent ¨¦galement prendre des mesures pour s'assurer que la manipulation, l'emballage et le transport des OVM au-del¨¤ des fronti¨¨res sont effectu¨¦s dans des conditions de s¨¦curit¨¦. Le transport de ces organismes doit ¨ºtre accompagn¨¦ d'une documentation sp¨¦cifiant leur identification. Les modalit¨¦s sp¨¦cifiques en mati¨¨re de documentation d¨¦pendent du type d'utilisation envisag¨¦e de l'OVM: il existe des r¨¨gles diff¨¦rentes pour les ovm destin¨¦s ¨¤ un usage direct dans l'alimentation humaine ou animale ou en vue d'une transformation (par exemple, les exp¨¦ditions en vrac de coton et de soja), ceux destin¨¦s ¨¤ un usage confin¨¦ et ceux destin¨¦s ¨¤ ¨ºtre introduits intentionnellement dans l'environnement (comme les poissons ou les semences).
Pour renforcer la mise en ?uvre de ces r¨¨gles et proc¨¦dures, les parties au Protocole et autres parties contractantes doivent disposer des ressources humaines et des capacit¨¦s institutionnelles n¨¦cessaires. Actuellement, de nombreux pays en d¨¦veloppement et de nombreuses ¨¦conomies en transition n'ont pas la capacit¨¦ d'appliquer efficacement les mesures de bios¨¦curit¨¦. ? cet ¨¦gard, les parties sont tenues, dans le cadre du Protocole, de coop¨¦rer et de s'entraider, par exemple en encourageant la formation scientifique et technique et en am¨¦liorant les capacit¨¦s technologiques en mati¨¨re de bios¨¦curit¨¦, notamment avec la participation du secteur priv¨¦ et par le biais des institutions et des organisations mondiales, r¨¦gionales, sous-r¨¦gionales et nationales existantes.
Au cours des huit derni¨¨res ann¨¦es, le Fonds pour l'environnement mondial, ainsi que d'autres sources, ont contribu¨¦ ¨¤ la cr¨¦ation de 136 projets de renforcement des capacit¨¦s dans diff¨¦rents pays et diff¨¦rentes r¨¦gions. Ces projets ont pour but d'aider les pays ¨¤ mettre en place leurs propres capacit¨¦s scientifiques afin d'¨¦valuer les risques li¨¦s aux ovm, d'acc¨¦der aux informations pertinentes et de les partager, y compris les documents d'orientations.
Le Protocole encourage un ¨¦change d'informations et un partage d'exp¨¦riences efficaces et opportuns concernant les ovm par le biais du Centre d'¨¦changes pour la pr¨¦vention des risques biotechnologiques (BCH). Les parties au Protocole sont tenues de fournir au Centre d'¨¦changes des informations sur les lois et les r¨¦glementations existantes, les proc¨¦dures d'¨¦valuation des risques ainsi que toutes les d¨¦cisions finales concernant l'importation et l'introduction d'OVM. Le BCH contient ¨¦galement des registres pour les ovm, les g¨¨nes et les organismes ¨¦chang¨¦s par les gouvernements dans le cadre du Protocole, un fichier d'experts en bios¨¦curit¨¦, des bases de donn¨¦es contenant des informations sur les activit¨¦s de renforcement des capacit¨¦s, une liste des organisations internationales ayant cr¨¦¨¦ des programmes en mati¨¨re de bios¨¦curit¨¦, un centre d'informations sur la bios¨¦curit¨¦ ainsi qu'une base de donn¨¦es bibliographiques scientifiques.
Dans les prises de d¨¦cisions concernant l'importation d'un ovm, les pays ont le droit de prendre en compte, conform¨¦ment ¨¤ leurs autres obligations internationales, les consid¨¦rations socio-¨¦conomiques d¨¦coulant de l'impact des ovm sur la biodiversit¨¦, en particulier concernant la valeur de la diversit¨¦ biologique pour les populations autochtones et locales. Dans ces cas, les pays sont encourag¨¦s ¨¤ coop¨¦rer ¨¤ la recherche et ¨¤ l'¨¦change d'informations sur tout impact socio-¨¦conomique.
La sensibilisation et la participation du public sont ¨¦galement cruciales pour assurer la s¨¦curit¨¦ de la biotechnologie moderne. ? cet ¨¦gard, le Protocole encourage les gouvernements, la soci¨¦t¨¦ civile, les institutions de l'ONU et les autres parties prenantes ¨¤ coop¨¦rer afin de promouvoir la sensibilisation, l'¨¦ducation et la participation du public concernant le transfert, la manipulation et l'utilisation sans risque des ovm.
Depuis l'adoption du Protocole il y a huit ans, des progr¨¨s consid¨¦rables ont ¨¦t¨¦ r¨¦alis¨¦s en ce qui concerne la mise en ?uvre. L'une des plus grandes r¨¦alisations a ¨¦t¨¦ le soutien rapide qui lui a ¨¦t¨¦ accord¨¦ et, ¨¤ ce jour, plus de 150 pays sont parties au Protocole. La rapidit¨¦ avec laquelle il a ¨¦t¨¦ ratifi¨¦ indique l'importance accord¨¦e par la communaut¨¦ internationale ¨¤ la coop¨¦ration internationale pour traiter les questions li¨¦es ¨¤ la bios¨¦curit¨¦.
Au niveau mondial, l'organe directeur du Protocole, la Conf¨¦rence des parties ou R¨¦union des parties, a adopt¨¦ plus de 60 d¨¦cisions expliquant les outils et les m¨¦canismes pour faciliter la mise en ?uvre efficace du Protocole. Par exemple, le Centre d'¨¦changes est enti¨¨rement op¨¦rationnel et facilite l'¨¦change d'informations ainsi que le partage d'exp¨¦riences sur les ovm. D'autres r¨¦alisations importantes comprennent la cr¨¦ation d'un Comit¨¦ de contr?le de l'application, le d¨¦veloppement d'un plan d'action pour le renforcement des capacit¨¦s et l'adoption d'exigences d'identification d¨¦taill¨¦es dans la documentation accompagnant le transport d'ovm. Au niveau national, plus de 140 pays ont introduit des processus visant ¨¤ ¨¦tablir des cadres l¨¦gaux et administratifs ainsi que des m¨¦canismes op¨¦rationnels pour mettre en ?uvre leurs obligations.
Les actions men¨¦es dans le cadre du Protocole ont ¨¦t¨¦ le r¨¦sultat direct de la coop¨¦ration et du partenariat ¨¤ l'¨¦chelle mondiale. En 2008, les pays ont c¨¦l¨¦br¨¦ ces r¨¦alisations lors du cinqui¨¨me anniversiare du Protocole, dont le th¨¨me ? Le Protocole de Cartagena sur la bios¨¦curit¨¦ : cinq ans de coop¨¦ration mondiale vers le d¨¦veloppement durable ? a ¨¦t¨¦ choisi pour souligner l'esprit d'entente et de coop¨¦ration et la contribution du Protocole dans la mise en ?uvre d'Action 21.
Le Protocole sur la bios¨¦curit¨¦ est un instrument vital qui pourrait assurer le d¨¦veloppement et l'application de la biotechnologie moderne de fa?on responsable et respectueuse de l'environnement. Il pourrait aussi contribuer ¨¤ la r¨¦alisation des Objectifs du Mill¨¦naire pour le d¨¦veloppement, en particulier concernant les d¨¦fis pour le d¨¦veloppement, comme la crise alimentaire actuelle, la pauvret¨¦, le changement climatique et le vih/sida et, en m¨ºme temps, pr¨¦venir et minimiser les risques que pourrait poser la biotechnologie pour l'environnement et la sant¨¦ humaine. Comme l'a indiqu¨¦ le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral de l'ONU, Ban Ki-moon, dans son r¨¦cent message de f¨¦licitations lors du cinqui¨¨me anniversaire de la mise en vigueur du Protocole, c'est un ? pas important dans le cadre des efforts internationaux visant ¨¤ promouvoir le d¨¦veloppement durable et il continuera de jouer un r?le important dans nos efforts de mise en ?uvre d'Action 21, le programme d'action mondial sur le d¨¦veloppement durable adopt¨¦ en 1992 lors du Sommet de la Terre ¨¤ Rio de Janeiro ?. Toutes les nations et tous les citoyens devraient soutenir la mise en ?uvre du Protocole et des autres instruments pertinents, et y participer activement, afin de garantir un avenir durable ¨¤ nos enfants.
Pour toute information compl¨¦mentaire, veuillez visiter le site du Protocole :

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