51吃瓜

1. Combler tous les foss茅s en mati猫re d鈥檃cc猫s num茅rique et de comp茅tences

脌 mesure que notre vie quotidienne se num茅rise, et de plus en plus vite, les disparit茅s entre les sexes sur le plan num茅rique menacent de rel茅guer les femmes et les filles encore plus loin derri猫re. Or, m锚me si les efforts visant 脿 combler ces disparit茅s ont conduit 脿 une r茅duction de la br猫che paritaire, la diff茅rence en chiffres absolus entre le nombre d鈥檋ommes et de femmes actifs en ligne . Aujourd鈥檋ui, 63听% des femmes ont acc猫s 脿 Internet, contre 69听% des hommes. Et les femmes ont 12听% de chances en moins de poss茅der un t茅l茅phone portable, un chiffre pratiquement inchang茅 depuis la p茅riode pr茅pand茅mique.

Mais ces moyennes mondiales ne disent pas tout听: la race, l鈥櫭�ge, le handicap, le statut socio-茅conomique et le lieu de r茅sidence p猫sent aussi dans la d茅termination de l鈥檃cc猫s au num茅rique et de son utilisation par les femmes. Les segments marginalis茅s tels que les femmes 芒g茅es, les femmes vivant en milieu rural et les femmes handicap茅es, sont confront茅s 脿 des obstacles bien plus s茅rieux 脿 la connectivit茅. Dans les pays les moins avanc茅s, bien que le r茅seau mobile 脿 bande large couvre 76听% de la population, , et les hommes sont 脿 de se trouver dans cette petite proportion connect茅e en ligne.

Cela montre clairement que pour combler la br猫che en mati猫re d鈥檃cc猫s et de connectivit茅, am茅liorer les infrastructures num茅riques ne suffit pas. Pour que les femmes soient v茅ritablement connect茅es, il faudra s鈥檃ttaquer 脿 des facteurs tels que les co没ts, l鈥檃cc猫s 脿 l鈥櫭﹍ectricit茅, la confidentialit茅 et la s茅curit茅 en ligne, les normes sociales, l鈥檃pprentissage et les comp茅tences num茅riques 鈥撎齛utant de facteurs diff茅rentiels selon que l鈥檕n est une femme ou que l鈥檕n est un homme.

Mais aucun secteur ne peut y parvenir seul听: il faudra, entre autres, une collaboration entre le secteur public (gouvernements), le secteur priv茅 (les entreprises), la soci茅t茅 civile et les organisations de femmes. Le fait d鈥檌nt茅grer explicitement la perspective de genre et la perspective intersectorielle dans les plans et les politiques num茅riques pourra permettre de catalyser ce type de coordination entre secteurs 鈥撎齯n point de d茅part crucial, 茅tant donn茅 qu鈥櫭� peine la moiti茅 des politiques ou des plans directeurs nationaux des technologies de l鈥檌nformation et de la communication (TIC) . Pour que les politiques soient efficaces, il faudra 茅galement se centrer sur l鈥櫭﹖ude des obstacles 脿 l鈥檃cc猫s des femmes au num茅rique et recueillir des donn茅es sur les efforts et solutions permettant de les surmonter.

Mais l脿 aussi, savoir ce qui fonctionne ne suffit pas听: les gouvernements doivent investir dans des programmes et des initiatives s鈥檃ppuyant sur des donn茅es probantes. Subventionner les t茅l茅phones intelligents et les ordinateurs portables pour les femmes et les filles et encourager l鈥檕ffre d鈥檃bonnements 脿 bas prix (pour les donn茅es) peut 锚tre un d茅but pour surmonter les obstacles 脿 l鈥檃cc猫s li茅s au genre. Il en va de m锚me pour les programmes d鈥檌nitiation au num茅rique, qui peuvent aider les femmes et les filles 脿 acqu茅rir les comp茅tences dont elles ont besoin pour se connecter, diriger et fa莽onner avec succ猫s l鈥檈space num茅rique.

2. Pousser les femmes et les filles 脿 s鈥檈ngager dans la voie des fili猫res STEM

Aujourd鈥檋ui, les femmes demeurent minoritaires dans les carri猫res STEM et l鈥櫭ヾucation qui s鈥檡 rapporte. En effet, elles ne repr茅sentant que et dans le monde. Sans une pr茅sence accrue des femmes dans ces domaines, leur part dans le d茅veloppement des technologies, de la recherche, des investissements et des politiques restera extr锚mement limit茅e. Des probl猫mes similaires sont observ茅s pour ce qui est de leur acc猫s 脿 des carri猫res 脿 croissance rapide et bien r茅mun茅r茅es 鈥� o霉 les in茅galit茅s sont aggrav茅es par le fait que, 脿 mesure que l鈥檌nnovation technologique et num茅rique bouleverse les industries, les femmes seront les premi猫res 脿 perdre leur emploi.

Les st茅r茅otypes, quant aux personnes qui seraient ou ne seraient pas faites pour les domaines STEM, font que les filles sont dissuad茅es de se lancer dans ce type de carri猫res. De telles croyances alimentent une spirale sans fin听: faute d鈥櫭猼re encourag茅es 脿 s鈥檈ngager dans les fili猫res technologiques, les filles finissent par ne jamais acqu茅rir les connaissances n茅cessaires, ce qui leur fait perdre tout int茅r锚t.

Et celles qui sautent le pas et suivent des 茅tudes technologiques sont souvent confront茅es 脿 un environnement tr猫s hostile, 脿 des 茅carts de salaire importants () et 脿 des offres d鈥檃vancement notablement plus faibles ( Pr猫s de la moiti茅 () d茅clarent avoir 茅t茅 victimes de harc猫lement au travail. Et une proportion inqui茅tante de celles-ci, , disent envisager de quitter leur emploi en raison du traitement qui leur est r茅serv茅 dans ce secteur.

Les efforts d茅ploy茅s dans le pass茅 pour accro卯tre la pr茅sence des femmes dans les fili猫res STEM ont souvent port茅 sur leur soi-disant d茅sint茅r锚t pour ces m茅tiers, plut么t que sur le syst猫me qui de fait les 茅carte. Cette d茅marche a en fait eu l鈥檈ffet inverse 脿 celui souhait茅, alimentant l鈥檌d茅e que les femmes n鈥檕nt pas de r茅el int茅r锚t ni de talent pour les secteurs STEM. Pour 锚tre efficaces, les solutions doivent viser 脿 茅liminer 脿 la fois les facteurs qui poussent les femmes 脿 abandonner les m茅tiers STEM et ceux qui les emp锚chent de s鈥檡 int茅resser au d茅part.

La fourniture d鈥檜n acc猫s g茅n茅ralis茅 脿 une connexion 脿 haut d茅bit aux 茅tablissements scolaires, aux enseignants et aux 茅l猫ves 鈥� et l鈥檃ssurance d鈥檜ne initiation au num茅rique pour tous les utilisateurs听鈥� permettra d鈥檕uvrir aux filles des horizons dans les carri猫res STEM, en particulier pour celles issues de milieux moins favoris茅s. L鈥檃pprentissage au num茅rique offre de nouvelles possibilit茅s d鈥檃dapter le milieu 茅ducatif et les programmes d鈥櫭﹖udes aux besoins des filles et des enfants provenant de segments marginalis茅s.

Il est 茅galement essentiel de travailler 脿 l鈥櫭﹍imination des pr茅jug茅s fond茅s sur le genre dans les 茅coles, et de faire en sorte que les filles puissent 锚tre guid茅es par des tutrices dans les carri猫res STEM, auxquelles elles peuvent s鈥檌dentifier. Et le fait de relier les disciplines STEM 脿 d鈥檃utres disciplines 鈥� tout en mettant l鈥檃ccent sur leur application aux d茅fis soci茅taux, ce qui, d鈥檃pr猫s les recherches actuelles, est un des principaux d茅terminants du choix de carri猫re des filles听鈥� peut 茅galement contribuer 脿 stimuler l鈥檌nt茅r锚t des filles.

Pour aider les femmes 脿 r茅ussir sur un march茅 du travail en mutation, il convient de cr茅er des programmes cibl茅s de requalification et de perfectionnement des comp茅tences, en se concentrant en particulier sur les segments les plus 脿 risque d鈥櫭猼re laiss茅s pour compte. Il est essentiel d鈥櫭﹍argir la l茅gislation du travail pour que les transitions qui s鈥檃morcent sur le march茅 du travail conduisent 脿 am茅liorer la situation des femmes, plut么t que de simplement reproduire les in茅galit茅s existantes. Cela veut dire un salaire minimum vital aussi pour elles, des r猫glements contre la discrimination salariale et des syst猫mes de protection sociale qui att茅nuent, par exemple, les disparit茅s entre hommes et femmes quant 脿 la charge de soins non r茅mun茅r茅s.

3. Cr茅er des technologies qui r茅pondent aux besoins des femmes et des filles

La technologie est le reflet de ses cr茅ateurs. Ainsi, puisque les femmes et les jeunes filles sont exclues des espaces de technologie et d鈥檌nnovation, il n鈥檈st pas surprenant que les outils num茅riques ne r茅pondent pas, ou moins, 脿 leurs besoins. L鈥檃bsence marqu茅e d鈥檌nvestissements suffisants dans des outils num茅riques favorisant la sant茅 sexuelle et reproductive est, par exemple, le r茅sultat logique de processus d茅cisionnels d鈥檕霉 sont syst茅matiquement exclues les femmes.

Dans le m锚me temps, les br猫ches en termes d鈥檃cc猫s au num茅rique signifient que les femmes produisent moins de donn茅es que les hommes, et le manque de d茅sagr茅gation des donn茅es entra卯ne leur repr茅sentation in茅gale dans les ensembles de donn茅es. Cela a des effets majeurs en aval sur l鈥檃pprentissage automatique et la prestation de services mus par l鈥檌ntelligence artificielle (IA). Une de 133听syst猫mes d鈥橧A, entre 1988 et aujourd鈥檋ui, a r茅v茅l茅 que 44 % de ceux-ci pr茅sentaient des pr茅jug茅s sexosp茅cifiques, et 26听% 脿 la fois des pr茅jug茅s de genre et raciaux, ce qui entra卯ne une moindre qualit茅 de service, une r茅partition in茅gale des ressources et le renforcement des st茅r茅otypes pr茅judiciables.

Ce probl猫me demeure largement ignor茅 du fait de l鈥檃bsence de vigilance suffisante sur le secteur des technologies. Et m锚me lorsque des normes 茅thiques existent, les garanties pour en assurer le respect font d茅faut. Et comme la r茅glementation jusqu鈥櫭� pr茅sent a 茅t茅 largement laiss茅e aux entreprises, peu nombreuses sont celles s鈥檈n souciant ou ayant investi dans des strat茅gies d鈥檃tt茅nuation de ces risques.

La cr茅ation de technologies plus inclusives et moins biais茅es commence par des processus de conception et de r茅glementation ax茅s sur les droits de la personne. Et pour ce faire, il convient de canaliser la parole des femmes marginalis茅es et vuln茅rables, ainsi que celle des sp茅cialistes des sciences sociales et comportementales et des droits humains, pour qu鈥檌ls participent 脿 la conception de nouveaux outils num茅riques. Cela veut dire aussi qu鈥檌l faut aborder explicitement le dilemme entre l鈥檈xercice de droits en ligne qui peuvent s鈥檕pposer, 脿 savoir la libert茅 d鈥檈xpression d鈥檜n c么t茅, et le droit 脿 la s茅curit茅 de l鈥檃utre. De plus, il faut que les normes 茅thiques, pour 锚tre applicables, soient fond茅es sur les principes et les instruments internationaux r茅gissant les droits humains.

La r茅forme de la r茅glementation en mati猫re technologique ne peut pas 锚tre abandonn茅e au secteur qu鈥檈lle est cens茅e r茅gir. Les gouvernements doivent n茅cessairement intervenir pour d茅finir les responsabilit茅s des entreprises, rendre obligatoires des m茅canismes de surveillance tels que les 茅valuations d鈥檌mpact en mati猫re de genre, et garantir la transparence de l鈥檜tilisation des donn茅es par le biais d鈥檃udits obligatoires dans le domaine de l鈥橧A. Au niveau international, la gouvernance num茅rique sera cruciale pour l鈥檃ssurance 脿 donner que le d茅veloppement de la technologie poursuit le bien commun et l鈥檌nt茅r锚t g茅n茅ral avant celui des multinationales.

4. Lutter contre la violence de genre facilit茅e par la technologie

Nonobstant sa pr茅valence et sa gravit茅, il n鈥檈xiste pas de d茅finition universellement accept茅e de la violence fond茅e sur le genre facilit茅e par la technologie. Elle peut s鈥檈ntendre n茅anmoins de tout acte de violence, en lien avec le genre, commis, appuy茅 ou aggrav茅 par l鈥檜tilisation des TIC. M锚me si de tels actes sont souvent commis dans la sph猫re virtuelle, ils entra卯nent des dommages tangibles 鈥� physiques, sexuels, psychologiques, sociaux, politiques et/ou 茅conomiques. Et ce type de violence ne se termine pas lorsque les femmes se d茅connectent听: il existe un continuum entre la violence en ligne et la violence dans le monde r茅el, la technologie contribuant 脿 perp茅tuer et 脿 faciliter la surveillance, le trafic et d鈥檃utres formes d鈥檃bus.

Dans le monde en ligne, la violence fond茅e sur le genre oblige 茅galement les femmes et les filles 脿 s鈥檃uto-censurer et 脿 se retirer des plateformes, limitant d鈥檃utant leur capacit茅 脿 participer aux activit茅s virtuelles. Si les m茅dias sociaux deviennent un espace incontournable 脿 la fois pour socialiser et s鈥檕rganiser, ils sont aussi un v茅hicule majeur de d茅sinformation, de fausses informations, de discours haineux sexistes et bien plus encore 鈥� autant d鈥檃spects qui sapent le mouvement et l鈥檈xpression des femmes en ligne.

Pour celles qui sont victimes de formes de discrimination qui s鈥檈ntrecroisent, notamment les femmes de couleur, les femmes handicap茅es et les personnes LGBTIQ+, le risque est encore plus 茅lev茅. Il en va de m锚me pour les femmes expos茅es 脿 l鈥櫯搃l critique du public 鈥撎齤ournalistes, politiciennes et d茅fenseures des droits des femmes, par exemple 鈥� qui sont la cible de propos haineux et d鈥檃utres violences 脿 des niveaux bien plus graves que leurs homologues masculins.

Et outre l鈥檃bsence de d茅finition formelle, il n鈥檈xiste pas non plus de normes ni de standards internationaux coh茅rents en mati猫re de violence en ligne fond茅e sur le genre. 脌 mesure que la technologie g茅n猫re de nouvelles formes de violence (cf. les actes non consensuels du type 芦鈥塪eepfake鈥壜� gr芒ce 脿 l鈥檋ypertrucage), les cadres juridiques existants ne peuvent trouver 脿 s鈥檃ppliquer car inadapt茅s. La violence en ligne (comme toutes les formes de violence fond茅es sur le genre) est trop peu d茅nonc茅e, puisque .

Tout cela pour dire qu鈥檌l est urgent d鈥檃gir. Des cadres juridiques plus larges et plus adapt茅s centr茅s sur les droits de la personne et des approches renseign茅es par les survivantes doivent 锚tre 茅labor茅s en coordination avec les organisations de femmes. Les d茅cideuses et d茅cideurs politiques ont la responsabilit茅 de coordonner leurs efforts avec ceux des autorit茅s de justice, les organisations de la soci茅t茅 civile, les m茅dias et d鈥檃utres acteurs afin de mettre au point des r茅ponses et des strat茅gies coh茅rentes d鈥檃tt茅nuation. Les processus fond茅s sur les droits humains pourront aussi permettre d鈥檃m茅liorer les m茅canismes de signalement et de mod茅ration des effets, et ainsi d茅charger les survivantes de toute faute.

Enfin, il faudra peut-锚tre enseigner le comportement non seulement civique mais aussi 芦鈥塶um茅rique鈥壜� et traiter ainsi les probl猫mes de violence en ligne 脿 la racine, en inculquant l鈥檈mpathie et l鈥檜tilisation 茅thique des m茅dias num茅riques, et en montrant aux hommes et aux gar莽ons comment devenir des d茅fenseurs de l鈥櫭ゞalit茅 de genre.