Linda Chepkwony a le regard tourn茅 vers les sommets. Elle r锚ve de devenir la premi猫re jeune milliardaire d'Afrique. Et elle veut contribuer 脿 transformer le destin 茅conomique du continent.
Le parcours entrepreneurial de cette Kenyane de 30 ans a commenc茅 par l'exportation d'objets d'art et d'artisanat, en franchise de droits, vers les 脡tats-Unis dans le cadre de la loi sur la croissance et les possibilit茅s 茅conomiques en Afrique (African Growth and Opportunity Act), qui pr茅voit un acc猫s en franchise de droits au march茅 am茅ricain pour certains produits provenant de certains pays d'Afrique. 听
Toutefois, avec l'entr茅e en vigueur de la zone de libre-茅change continentale africaine (ZLECAf), Linda a chang茅 de mod猫le commercial pour ajouter de la valeur 脿 des produits de base tels que le miel et les noix, puis les exporter vers d'autres pays africains.听
La ZLECAf regroupe potentiellement un march茅 de 1,3 milliard de personnes avec un PIB combin茅 de 3,4 billions de dollars, 茅limine les droits de douane sur la plupart des biens et services et garantit la libre circulation de la main-d'艙uvre entre les pays participants.
La ZLECAf rendra les affaires plus faciles et plus rapides, non seulement pour moi mais aussi pour des millions de femmes et de jeunes en Afrique. Ce serait fantastique
Le pacte commercial semble taill茅 sur mesure pour Linda : elle est jeune, entrepreneure, femme et f茅rue de technologie. Elle r锚ve d'une Afrique d茅barrass茅e des cha卯nes du sous-d茅veloppement. Elle croit que les jeunes peuvent mener la charge. Et elle a l'esprit d'initiative et le sens de l'urgence.
Valeur ajout茅e
Linda est la fondatrice et la directrice g茅n茅rale de RiftValley Organics Africa, une entreprise bas茅e au Kenya qui traite et conditionne du miel, des noix, du beurre de cacahu猫te, des produits 脿 base de plantes et des graines pour le march茅 national et d'autres march茅s africains.听
Pour l'instant, elle se pr茅occupe de la valeur ajout茅e.
Ses produits populaires comprennent le th茅 infus茅 脿 la citronnelle, 脿 la menthe, au citron, au gingembre ou 脿 la cannelle. Il y a aussi du miel infus茅 au gingembre et du beurre de cacahu猫te cr茅meux.
Linda s'approvisionne en mati猫res premi猫res principalement localement, bien qu'elle importe parfois des pays voisins.听
"Parfois, il y a une basse saison de r茅colte du miel au Kenya et la demande est 茅lev茅e, alors je me procure du miel en Tanzanie ou en Ouganda pour combler le d茅ficit", explique-t-elle.
Le probl猫me, cependant, est que parfois ce qui est disponible dans ces pays n'est pas de bonne qualit茅. "Par exemple, les noix peuvent contenir de l'aflatoxine (certains champignons). Cela signifie que nous n'aurons pas 脿 les transformer".
Il existe de nombreuses opportunit茅s de march茅 en Afrique. La plupart de nos pays importent des produits agricoles de l'Occident, alors que ces produits sont facilement disponibles en Afrique.
Contrairement aux accords commerciaux traditionnels qui se concentrent sur le commerce des biens, des services et des droits de propri茅t茅 intellectuelle, la ZLECAf a un objectif plus large, qui consiste notamment 脿 associer les jeunes et les femmes 脿 l'effort d'industrialisation de l'Afrique. D猫s le d茅part, les dirigeants africains ont exig茅 un protocole sur les femmes et les jeunes commer莽ants.
Le Kenya a rendu tr猫s facile l'obtention d'un certificat de r猫gles d'origine. J'ai obtenu le mien en un jour.听
Le certificat de r猫gles d'origine est important car il indique que mes marchandises sont originaires du Kenya et qu'elles peuvent donc b茅n茅ficier d'un traitement tarifaire pr茅f茅rentiel, ou de taxes 脿 l'importation moins 茅lev茅es, dans les pays de la zone de libre-茅change continentale africaine.
Au Kenya, le d茅partement des douanes et du contr么le des fronti猫res d茅pend de l'autorit茅 fiscale k茅nyane (KRA). Pour faciliter la demande d'un certificat de r猫gles d'origine, la KRA a 茅tabli des bureaux dans cinq comt茅s (Nairobi, Mombasa, Nakuru, Uasin Gishu et Kisumu) 脿 travers le pays. M锚me si vous ne vous trouvez pas dans la capitale, Nairobi, vous pouvez demander le certificat dans l'un de ces comt茅s.
Dans mon cas, je me suis rendu au bureau de Nairobi. J'ai dit aux agents que j'茅tais venu demander le certificat de r猫gles d'origine.
Ils ont v茅rifi茅 les tarifs de mes produits. Comme nous sommes dans le secteur des noix et du miel, notre tarif 茅tait g茅n茅ralement de 35 %. Ils m'ont inform茅 que les droits de douane sur mes produits seraient de 24,5 % si j'obtenais le certificat. La ZLECAf pr茅voit que les droits de douane sur la plupart des produits diminuent progressivement jusqu'en 2030, date 脿 laquelle ils seront 茅limin茅s.听
Les agents m'ont remis un formulaire de demande dans lequel j'ai indiqu茅 mes produits et le pays de destination des exportations.听
Une fois le formulaire rempli, ils ont v茅rifi茅 dans leur syst猫me le code HS [Syst猫me harmonis茅] de mes produits. Ce code est indiqu茅 dans le certificat de r猫gles d'origine. Chaque produit a un code HS unique.听
Je dois mentionner que j'ai re莽u, 脿 l'avance, certains documents de mes partenaires au Ghana, dont une facture. Les quantit茅s de produits exp茅di茅s vers d'autres pays figurent dans le certificat des r猫gles d'origine afin d'aider les douaniers ghan茅ens 脿 d茅douaner les marchandises.听
Apr猫s cela, j'ai pay茅 l'茅quivalent d'environ 3 dollars. Les fonctionnaires de la KRA ont ensuite programm茅 une inspection de nos installations de production ainsi que des produits. Il s'agissait de confirmer que nous nous approvisionnons en mati猫res premi猫res et que nous finissons les produits au Kenya.听
Les fonctionnaires ont pr茅lev茅 des 茅chantillons de nos produits pour les soumettre 脿 un examen approfondi. Apr猫s confirmation et paiement des 3 dollars, j'ai rapidement re莽u un certificat de r猫gles d'origine ZLECAf et une lettre d'enregistrement en tant qu'exportateur ZLECAf. 听Traduit avec (version gratuite)
Les pays participant 脿 la ZLECAf s'engagent 脿 r茅duire progressivement jusqu'脿 90 % les droits de douane sur le commerce des biens et des services d'ici 脿 2030. Linda esp猫re donc une nouvelle r茅duction des droits de douane sur ses produits d'ici l'ann茅e prochaine, une autre r茅duction en 2025, et ainsi de suite.
Elle a saisi avec enthousiasme l'opportunit茅 de l'initiative de commerce guid茅 pour exp茅dier un lot de miel infus茅 aux herbes du Kenya au Ghana. Elle a rencontr茅 ses partenaires ghan茅ens et autres gr芒ce aux possibilit茅s offertes par la Commission 茅conomique des Nations unies pour l'Afrique (CEA) et le Programme des Nations unies pour le d茅veloppement (PNUD) Afrique de participer 脿 divers 茅v茅nements commerciaux sur le continent.
L'initiative de commerce guid茅 permet le commerce de certains produits entre huit pays (le Cameroun, l'脡gypte, le Ghana, le Kenya, l'卯le Maurice, le Rwanda, la Tanzanie et la Tunisie) qui r茅pondent 脿 certains crit猫res, notamment le d茅ploiement du manuel du livre des tarifs et des r猫gles d'origine de la ZLECAf et la publication des taux tarifaires approuv茅s par le secr茅tariat de la ZLECAf.
"Apr猫s le Ghana, je vise le Cameroun, puis l'脡gypte pour notre th茅 aux herbes", explique Linda.
Elle a l'intention de s'associer 脿 d'autres jeunes pour cr茅er des installations de production dans d'autres pays. Elle appelle cette strat茅gie "opportunit茅s de connexion".
Elle explique : "Si un pays dispose de mati猫res premi猫res auxquelles nous pouvons ajouter de la valeur, par exemple les noix de cajou en C么te d'Ivoire, nous donnerons aux jeunes de ce pays les moyens d'ajouter de la valeur aux noix de cajou - farine de cajou, beurre de cajou, noix de cajou au chocolat et noix de cajou grill茅es.听
"Cela facilitera notre travail. Nous r茅pondrons aux commandes sur ce march茅 sans avoir 脿 surmonter tous les obstacles logistiques li茅s au transport des marchandises du Kenya vers ce pays. Et nous cr茅erons des emplois qui aideront les jeunes 脿 am茅liorer leurs moyens de subsistance."
Elle insiste : "Il existe de nombreuses opportunit茅s de march茅 en Afrique. La plupart de nos pays importent des produits agricoles de l'Occident, alors que ces produits sont facilement disponibles en Afrique."
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Malgr茅 ses grandes ambitions, Linda ne se fait pas d'illusions sur les difficult茅s que rencontrent actuellement les jeunes entrepreneurs.
La premi猫re est le manque d'acc猫s aux capitaux.听
"Il est difficile pour les jeunes d'acc茅der aux capitaux dans le secteur manufacturier et dans d'autres secteurs. Un jeune chef d'entreprise commence par faire de la veille 茅conomique, calculer les co没ts de production, les seuils de rentabilit茅 et les b茅n茅fices, mais il abandonne facilement sans capital de d茅part", explique-t-elle.听
Si un pays dispose de mati猫res premi猫res auxquelles nous pouvons ajouter de la valeur, par exemple les noix de cajou en C么te d'Ivoire, nous donnerons aux jeunes de ce pays les moyens d'ajouter de la valeur aux noix de cajou - farine de cajou, beurre de cajou, noix de cajou au chocolat et noix de cajou grill茅es.听Cela facilitera notre travail. Nous r茅pondrons aux commandes sur ce march茅 sans avoir 脿 surmonter tous les obstacles logistiques li茅s au transport des marchandises du Kenya vers ce pays. Et nous cr茅erons des emplois qui aideront les jeunes 脿 am茅liorer leurs moyens de subsistance.
Ensuite, les difficult茅s de circulation transfrontali猫re constituent 茅galement un d茅fi.听
Elle se souvient : "R茅cemment, je regardais un YouTuber qui disait avoir eu des probl猫mes pour aller du Togo dans son propre pays, le Ghana, qu'on lui avait demand茅 脿 la fronti猫re de payer de l'argent".听
"Si aller dans votre pays d'origine en passant par un poste fronti猫re voisin pr茅sente des difficult茅s, comment pouvez-vous m锚me faire du commerce ?" s'interroge-t-elle.
Troisi猫mement, les PME africaines sont confront茅es 脿 des d茅fis logistiques.听
"On vous demande de fournir une pile de documents 脿 la fronti猫re. C'est un v茅ritable casse-t锚te. Cela va d茅courager les jeunes de faire des affaires", dit-elle.
Quatri猫mement, 茅tant donn茅 que de nombreux pays ne participent pas encore effectivement aux 茅changes dans le cadre de la ZLECAf, Linda maintient que "les droits de douane sont tr猫s 茅lev茅s dans les 茅changes entre les blocs commerciaux r茅gionaux. Il est plus facile de commercer en Afrique de l'Est qu'avec les pays d'Afrique de l'Ouest.
Cinqui猫mement, la logistique du transport maritime est un cauchemar.
"En ce qui concerne la logistique, le transport maritime 脿 l'int茅rieur du continent est difficile. Pour certains commer莽ants, il est plus facile et moins cher d'importer des marchandises de Chine que d'un pays africain voisin, m锚me si la qualit茅 des marchandises est la m锚me."
Des perspectives prometteuses
Pourtant, la ZLECAf vise pr茅cis茅ment 脿 r茅pondre aux pr茅occupations de Linda, qui expliquent pourquoi le commerce intra-africain ne repr茅sente qu'un maigre 16 %. Et les perspectives sont plus ensoleill茅es que sombres.
Outre le lancement, en octobre 2022, de l'Initiative commerciale guid茅e, il y a maintenant les syst猫mes panafricains de paiement et de r猫glement, l'Observatoire africain du commerce et le Livre des tarifs.
En janvier 2023, le comit茅 technique de la justice et des affaires juridiques de la ZLECAf a finalis茅 le nettoyage juridique des protocoles sur l'investissement, la concurrence et la propri茅t茅 intellectuelle.听
Ces protocoles essentiels devraient 锚tre approuv茅s lors du sommet de l'Union africaine 脿 Addis-Abeba, en 脡thiopie, fin f茅vrier 2023.听
Cela doit 锚tre une douce musique aux oreilles d'une jeune entrepreneuse comme Linda.听
"Ce sont les jeunes d'Afrique qui vont industrialiser le continent gr芒ce 脿 la ZLECAf. Et la fabrication et la valeur ajout茅e sont les ingr茅dients cl茅s", soutient-elle.
