Le premier test nucl¨¦aire dans le monde, baptis¨¦ Trinity, a eu lieu le 16 juillet 1945 dans un d¨¦sert aride du Nouveau-Mexique, que les conquistadors espagnols avaient appel¨¦ Jornada del Muerto (Le voyage de l'homme mort). Dans les d¨¦cennies qui ont suivi, plus de 2?000 essais de ce type ont eu lieu dans huit pays, certains dans l'atmosph¨¨re, d'autres dans le sol et d'autres encore sous l'eau.
Aujourd'hui, le monde est en voie de tourner une nouvelle page dans l'histoire des essais nucl¨¦aires. Gr?ce au leadership ¨¦clair¨¦ des ?tats cl¨¦s qui poss¨¨dent ces armes, ¨¤ l'encouragement diplomatique d'autres pays et aux efforts persistants de la soci¨¦t¨¦ civile, il est fort probable que le Trait¨¦ d'interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires (TICE) entrera enfin en vigueur dans un avenir proche, interdisant ainsi tous les essais dans tous les environnements.
Pourquoi les lecteurs de la Chronique de l'ONU qui s'int¨¦ressent ¨¤ de nombreux autres sujets, seraient-ils concern¨¦s par les r¨¦sultats du trait¨¦ TICE ? En quoi cela les int¨¦resse-t-il ? Quelles seront les cons¨¦quences si le trait¨¦ n'entre jamais en vigueur ? Ce sont des questions tout ¨¤ fait l¨¦gitimes qui ont toutes des r¨¦ponses - mais avant d'y r¨¦pondre et de regarder vers l'avenir, nous devons nous tourner vers le pass¨¦.
La Charte des Nations Unies a ¨¦t¨¦ sign¨¦e en juin 1945 un mois avant l'essai nucl¨¦aire, appel¨¦ Trinity. Or, en janvier 1946, la premi¨¨re r¨¦solution de l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale a appel¨¦ sp¨¦cifiquement ¨¤ l'¨¦limination de toutes les armes nucl¨¦aires et d'autres armes similaires ? pouvant ¨ºtre utilis¨¦es ¨¤ des fins de destruction massive ?, y compris les armes biologiques et chimiques. Le concept de ? destruction massive ? est flou si l'on consid¨¨re les milliers de bombes classiques largu¨¦es au cours de la Deuxi¨¨me guerre mondiale, pour ne pas mentionner les d¨¦g?ts caus¨¦s il y a des si¨¨cles par les conqu¨¦rants mongols en Asie centrale, qui ont montr¨¦ de mani¨¨re concluante que de nombreux types d'armes pouvaient ¨ºtre la cause de destruction massive. Toutefois, ce qui est unique en ce qui concerne les armes nucl¨¦aires et, dans une moindre mesure, les autres armes de destruction massive (ADM), c'est la capacit¨¦ de mort ¨¤ grande ¨¦chelle et de mani¨¨re syst¨¦matique caus¨¦e par une seule d¨¦tonation. Alors que la Charte de l'ONU a abord¨¦ la question du ? d¨¦sarmement ? et de la ? r¨¦glementation des armements ?, l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale a clarifi¨¦ que le d¨¦sarmement s'appliquait aux ADM tout en soutenant l'objectif visant ¨¤ assurer le contr?le et la limitation des armes classiques.
La distinction est importante. L'ONU n'a pas seulement pour objectif de ? r¨¦glementer ? les armes nucl¨¦aires, mais d'interdire et d'¨¦liminer ces armes, ainsi que les autres ADM, tout en limitant les armes classiques. C'est ce que l'on entend par ? d¨¦sarmement g¨¦n¨¦ral et complet ?. Cette question figure sur l'ordre du jour de l'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale depuis cinquante ans et a ¨¦t¨¦ l'? objectif ultime ? des Nations Unies depuis la premi¨¨re session de l'Assembl¨¦e sur le d¨¦sarmement en 1978.
Il est ¨¦vident que les armes nucl¨¦aires ne tombent pas du ciel. Ce sont des artefacts tr¨¨s complexes cr¨¦¨¦s par l'ing¨¦nuit¨¦ humaine. La production de mati¨¨res fissiles pour la fabrication d'armes - le plutonium et l'uranium hautement enrichi - est ¨¤ elle seule un processus tr¨¨s difficile que seuls quelques pays ont ma¨ªtris¨¦, m¨ºme aujourd'hui. La conception d'une telle arme l¨¦g¨¨re et suffisamment durable pour atteindre sa cible est une autre t?che difficile, d'o¨´ l'importance cruciale des essais nucl¨¦aires. Il est clair que l'on peut fabriquer une arme nucl¨¦aire qui fonctionne sans l'avoir test¨¦e, comme l'a illustr¨¦ de mani¨¨re concluante le d¨¦veloppement et l'utilisation de la bombe Little Boy qui a d¨¦truit Hiroshima le 5 ao?t 1945. M¨ºme en ayant recours ¨¤ la technologie de 1945, les cr¨¦ateurs de la bombe ¨¤ uranium ¨¦taient tellement s?rs de leur coup qu'ils n'ont pas h¨¦sit¨¦ ¨¤ l'utiliser sans l'avoir test¨¦e.
Toutefois, tous les ?tats qui ont d¨¦clar¨¦ ¨ºtre en possession de ces armes, ¨¤ savoir les cinq membres permanents du Conseil de s¨¦curit¨¦ plus la R¨¦publique populaire d¨¦mocratique de Cor¨¦e, l'Inde et le Pakistan - ont ¨¦galement proc¨¦d¨¦ ¨¤ des essais de ces armes. Les essais nucl¨¦aires sont une fa?on pour un ?tat de signaler clairement ¨¤ la communaut¨¦ internationale qu'il poss¨¨de une arme nucl¨¦aire. Mais cette port¨¦e symbolique n'explique pas les 2 000 essais d'armes nucl¨¦aires qui ont eu lieu au cours des derni¨¨res d¨¦cennies.
Les essais sont essentiellement un outil exp¨¦rimental utilis¨¦ par les scientifiques et les ing¨¦nieurs pour am¨¦liorer ces armes ou, comme cela s'est produit dans le pass¨¦, pour confirmer leur fiabilit¨¦. Parfois ces ? am¨¦liorations ? visent ¨¤ am¨¦liorer la s?ret¨¦ et la s¨¦curit¨¦ d'une arme, par exemple, pour s'assurer qu'elle n'explose pas pr¨¦matur¨¦ment ou suite ¨¤ un accident, ou qu'elle ne soit pas vol¨¦e ou utilis¨¦e par un groupe de terroristes. Plus souvent, elles visent ¨¤ am¨¦liorer la performance d'une arme, ¨¤ lui donner un nouveau r?le et ¨¤ la perfectionner pour qu'elle r¨¦siste mieux aux probl¨¨mes li¨¦s ¨¤ l'explosion - les tr¨¨s fortes pressions, les temp¨¦ratures tr¨¨s ¨¦lev¨¦es et les mesures de d¨¦fense auxquelles ces armes sont soumises avant d'atteindre leur cible - et les d¨¦fauts dus ¨¤ l'usure. Certains essais servent aussi ¨¤ mettre au point de nouvelles g¨¦n¨¦rations d'armes - c'est ainsi que la bombe ¨¤ hydrog¨¨ne a ¨¦t¨¦ fabriqu¨¦e au d¨¦but des ann¨¦es 1950.
Au cours des ann¨¦es, les efforts men¨¦s pour interdire les essais nucl¨¦aires se sont concentr¨¦s sur trois avantages possibles : les avantages pour l'environnement, la non-prolif¨¦ration et le d¨¦sarmement. L'¨¦lan qui a conduit ¨¤ la conclusion du Trait¨¦ d'interdiction partielle de 1963 qui a interdit les explosions nucl¨¦aires dans l'atmosph¨¨re, sous les mers et dans l'espace extra-atmosph¨¦rique - a ¨¦t¨¦ influenc¨¦ par l'avalanche de demandes venant de la soci¨¦t¨¦ civile, ainsi que des Nations Unies, pour mettre fin ¨¤ la contamination de l'environnement par des substances radioactives.
Les retomb¨¦es de l'essai d'une bombe ¨¤ hydrog¨¨ne en 1954 ont contamin¨¦ un bateau de p¨ºche japonais, appel¨¦ Lucky Dragon, tuant l'op¨¦rateur radio et blessant son ¨¦quipe. On a retrouv¨¦ plus tard des isotopes radioactifs issus de ces essais dans le lait maternel et les dents des enfants. Le public a r¨¦agi et s'est mobilis¨¦ apr¨¨s la parution d'une ¨¦tude scientifique qui avait document¨¦ les effets de ces essais sur la sant¨¦ et l'environnement. Les inqui¨¦tudes des scientifiques et du public ont donn¨¦ lieu ¨¤ la tenue d'auditions l¨¦gislatives et ¨¤ des demandes d'informations. Les m¨¦dias ont ¨¦t¨¦ invit¨¦s ¨¤ se pencher sur la question afin de sensibiliser davantage le public. Les pays qui n'avaient pas l'intention d'acqu¨¦rir des armes nucl¨¦aires trouvaient des traces de mati¨¨res radioactives sur leur territoire. Ces r¨¦v¨¦lations ont fait boule de neige et le Trait¨¦ d'interdiction des essais est n¨¦.
Certes il y a eu d'autres raisons de s'opposer aux essais nucl¨¦aires. Les d¨¦cideurs politiques et les chercheurs en armes nucl¨¦aires parlent souvent de prolif¨¦ration horizontale et verticale. La premi¨¨re d¨¦signe la propagation de ces armes dans d'autres ?tats et la deuxi¨¨me le perfectionnement ou l'expansion des arsenaux nucl¨¦aires existants. Certains ont exprim¨¦ leurs inqui¨¦tudes concernant le fait que ces armes en transit sont transport¨¦es en mer par des sous-marins et dans le ciel par des avions. Certains de ces vaisseaux transportent des armes qui peuvent ¨ºtre tir¨¦es imm¨¦diatement et d'autres ont ¨¦t¨¦ impliqu¨¦s dans des collisions et des crashs au cours des ann¨¦es.
Comme le sugg¨¨re l'¨¦pisode du Little Boy, une interdiction des essais ne peut ¨¤ elle seule emp¨ºcher un pays d'acqu¨¦rir une arme nucl¨¦aire de premi¨¨re g¨¦n¨¦ration. Elle peut, cependant, rendre plus difficile pour d'autres ?tats de poursuivre les programmes d'armes nucl¨¦aires. Si une norme mondiale est adopt¨¦e pour interdire les essais, un ?tat qui veut d¨¦fier cette norme devra s'attendre ¨¤ des r¨¦percussions politiques et diplomatiques importantes s'il effectue un essai nucl¨¦aire, y compris des condamnations et des sanctions internationales ainsi qu'une r¨¦ponse militaire possible des ?tats voisins. Cette norme permettra ¨¦galement de d¨¦courager les pays, les groupes et les personnes ¨¤ apporter leur aide dans ce domaine.
Une interdiction des essais peut ¨ºtre un moyen tr¨¨s efficace d'emp¨ºcher la prolif¨¦ration horizontale, m¨ºme si elle n'est pas une panac¨¦e. Un des avantages d'une interdiction l¨¦gale et multilat¨¦rale est qu'elle permet de neutraliser le prestige pouvant ¨ºtre associ¨¦ ¨¤ la possession de l'arme nucl¨¦aire. Avec cette norme, les essais seront per?us dans la communaut¨¦ internationale non pas comme un signe ext¨¦rieur de puissance mais comme une action condamnable.
Une interdiction mondiale des essais nucl¨¦aires serait aussi n¨¦cessaire, mais ne suffirait pas ¨¤ elle seule pour entamer le processus de d¨¦sarmement nucl¨¦aire. On peut imaginer un monde o¨´ les nombreux pays poss¨¦dant l'arme nucl¨¦aire n'effectueraient pas d'essais, que ce soit conform¨¦ment ¨¤ un trait¨¦ ou suite ¨¤ une d¨¦cision politique nationale. Mais nul ne devrait sous-estimer les contributions positives d'une interdiction l¨¦gale des essais nucl¨¦aires dans le processus du d¨¦sarmement nucl¨¦aire mondial.
Premi¨¨rement, une interdiction des essais permettrait d'emp¨ºcher certaines formes de ? prolif¨¦ration verticale ?, notamment le d¨¦veloppement de nouvelles g¨¦n¨¦rations d'armes nucl¨¦aires ou la modernisation des arsenaux existants. Deuxi¨¨mement, elle contribuerait ¨¤ entamer un processus de d¨¦mant¨¨lement des infrastructures institutionnelles complexes qui ont ¨¦t¨¦ mises en place pour d¨¦velopper et maintenir ces arsenaux. Troisi¨¨mement, une interdiction contribuerait aussi au processus de d¨¦l¨¦gitimation des armes nucl¨¦aires m¨ºmes - les d¨¦clarations selon lesquelles les essais nucl¨¦aires sont n¨¦cessaires pour ? assurer la fiabilit¨¦ ? des arsenaux existants, par exemple, sont plus difficiles ¨¤ soutenir si l'opinion mondiale est favorable ¨¤ un monde sans armes nucl¨¦aires.
Quelles sont les attentes au niveau mondial? C'est le Premier ministre indien Jawaharlal Nehru qui a ¨¦t¨¦ le premier ¨¤ appeler ¨¤ l'interdiction des essais nucl¨¦aires dans un discours prononc¨¦ au Parlement, le 2 avril 1954, quelques semaines apr¨¨s l'incident du Lucky Dragon. Sa proposition d'un ? Accord relatif au statu quo ? a ¨¦t¨¦ particuli¨¨rement bien re?ue aux Nations Unies, o¨´ sous l'¨¦gide du Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral Dag Hammarskj?ld et des ?tats Membres inquiets, de nombreuses propositions ont ¨¦t¨¦ pr¨¦sent¨¦es pour mettre fin aux essais.
Le Comit¨¦ scientifique pour l'¨¦tude des effets des rayonnements ionisants a ¨¦t¨¦ cr¨¦¨¦ en 1955 et continue de se r¨¦unir tous les ans. De nombreux gouvernements ont introduit des propositions sp¨¦cifiques visant ¨¤ une interdiction compl¨¨te de tous les essais nucl¨¦aires, mais d'importantes diff¨¦rences ont apparu, en particulier durant la Guerre froide, sur la question d¨¦licate de la v¨¦rification. ? la fin des ann¨¦es 1950, les ?tats se r¨¦f¨¦raient ¨¤ ces propositions comme ¨¦tant des ? mesures partielles ?, en d'autres termes, les Nations Unies commen?aient ¨¤ comprendre que le d¨¦sarmement serait un long processus. L'arr¨ºt des essais nucl¨¦aires ¨¦tait alors per?u par un grand nombre comme une des mesures essentielles, tout comme aujourd'hui.
Les efforts mondiaux visant ¨¤ interdire tout essai nucl¨¦aire ont continu¨¦ apr¨¨s la conclusion en 1963 du Trait¨¦ d'interdiction partielle des essais nucl¨¦aires, qui pr¨¦figurait les d¨¦fis futurs dans son pr¨¦ambule affirmant son objectif : ? assurer l'arr¨ºt de toutes les explosions exp¨¦rimentales d'armes nucl¨¦aires ¨¤ tout jamais [et] poursuivre les n¨¦gociations ¨¤ cette fin ?.
En 1968, le Trait¨¦ sur la non-prolif¨¦ration des armes nucl¨¦aires (TNP) a ¨¦t¨¦ ouvert ¨¤ la signature. Son pr¨¦ambule faisait ¨¦cho ¨¤ l'objectif plus complet du Trait¨¦ d'interdiction partielle, et son article VI obligeait les Parties au Trait¨¦ ? ¨¤ poursuivre de bonne foi des n¨¦gociations sur des mesures efficaces relatives ¨¤ la cessation de la course aux armements nucl¨¦aires ¨¤ une date rapproch¨¦e et au d¨¦sarmement nucl¨¦aire et sur un trait¨¦ de d¨¦sarmement g¨¦n¨¦ral et complet sous un contr?le international strict et efficace ?.
Le TNP a ¨¦t¨¦ reconduit pour une p¨¦riode ind¨¦termin¨¦e en 1995 sur la base d'accords qui comprenaient la conclusion d'un Trait¨¦ d'interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires d'ici ¨¤ 1996 comme l'un de ses ¨¦l¨¦ments clefs. ? L'entr¨¦e en vigueur pr¨¦coce ? du TNP fut aussi la premi¨¨re des ? treize ¨¦tapes ? adopt¨¦es ¨¤ la Conf¨¦rence d'examen du TNP en 2000 sur l'engagement d'un d¨¦sarmement nucl¨¦aire. La norme mondiale visant ¨¤ une interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires a aussi re?u un soutien additionnel, avec l'inclusion d'une interdiction des essais dans les textes des trait¨¦s qui ont cr¨¦¨¦ une zone r¨¦gionale exempte d'armes nucl¨¦aires en Am¨¦rique latine et dans les Cara?bes, dans le Pacifique Sud, en Asie du Sud-Est, en Afrique et en Asie centrale, repr¨¦sentant les engagements de 112 ?tats.
Bien que le TICE ait ¨¦t¨¦ ouvert ¨¤ la signature en 1996, il n'a pas obtenu les 44 ratifications n¨¦cessaires pour entrer en vigueur. En juillet 2009, 180 ?tats avaient sign¨¦ le trait¨¦ et 14 l'avaient ratifi¨¦. Sur les 44 ?tats d¨¦terminants, 35 l'avaient ratifi¨¦, neuf ne l'avaient pas ratifi¨¦ et trois n'avaient pas sign¨¦ le trait¨¦. Le soutien ¨¤ l'entr¨¦e en vigueur du TICE n'est cependant pas limit¨¦ aux ?tats parties au TNP. L'Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale adopte des r¨¦solutions depuis des dizaines d'ann¨¦es sur la base d'une interdiction compl¨¨te des essais, avec une majorit¨¦ ¨¦crasante de voix. La derni¨¨re r¨¦solution sur le TICE, la r¨¦solution 63/87 a ¨¦t¨¦ adopt¨¦e par l'Assembl¨¦e en d¨¦cembre 2008 par 175 voix pour, 1 voix contre et 3 abstentions.
L'interdiction des essais nucl¨¦aires est un objectif qui re?oit depuis longtemps le plein soutien des Secr¨¦taires g¨¦n¨¦raux de l'ONU, y compris du Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral Ban Ki-moon, qui a d¨¦clar¨¦ : ? Je vois ¨¦merger aujourd'hui dans le monde une ? tol¨¦rance z¨¦ro ? concernant les essais nucl¨¦aires futurs des dispositifs explosifs nucl¨¦aires. J'esp¨¨re que je verrai le jour o¨´ cette d¨¦cision sera juridiquement ex¨¦cutoire et reste convaincu que le TICE est le moyen qui permettra d'atteindre cet objectif. ? (Entretien paru dans CTBTO Spectrum, en juillet 2007). L'int¨¦r¨ºt qu'il porte ¨¤ cette question est tout ¨¤ fait sinc¨¨re et de longue date, comme le d¨¦montre sa carri¨¨re o¨´ il a ¨¦t¨¦ amen¨¦ ¨¤ pr¨¦sider la Commission pr¨¦paratoire pour l'Organisation du Trait¨¦ d'interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires en 1999, ainsi que ses nombreux messages pr¨¦sent¨¦s lors des r¨¦unions p¨¦riodiques des ?tats signataires du TICE (organis¨¦es pour promouvoir l'entr¨¦e en vigueur du Trait¨¦). Il a aussi inclus l'interdiction des essais nucl¨¦aires dans son plan en cinq points en faveur du d¨¦sarmement annonc¨¦ aux Nations Unies le 24 octobre 2008.
L'interdiction des essais nucl¨¦aires est un objectif qui continue de recevoir le ferme soutien de la soci¨¦t¨¦ civile et a ¨¦t¨¦ int¨¦gr¨¦e dans de nombreux plans de d¨¦sarmement pr¨¦sent¨¦s au cours des ann¨¦es r¨¦centes. En 2006, par exemple, la Commission internationale sur les armes de destruction massive (ADM) pr¨¦sid¨¦e par Hans Blix, s'est pench¨¦e sur le r?le d¨¦terminant des ?tats-Unis dans l'entr¨¦e en vigueur du TICE :
? La Commission est convaincue que la ratification du TICE par les ?tats-Unis influencerait d'autres pays ¨¤ le faire. Une telle d¨¦cision am¨¦liorerait de mani¨¨re d¨¦cisive les chances d'une entr¨¦e en vigueur du Trait¨¦ et aurait des ramifications plus positives en mati¨¨re de contr?le et de d¨¦sarmement que n'importe quelle autre mesure. Bien qu'aucun essai d'armes nucl¨¦aires n'ait ¨¦t¨¦ effectu¨¦ depuis de nombreuses ann¨¦es, laisser le trait¨¦ en plan constitue un risque pour la communaut¨¦ internationale. Les ?tats-Unis devraient reconsid¨¦rer leur position et proc¨¦der ¨¤ la ratification du trait¨¦. Seul le TICE offre la perspective d'un engagement permanent et juridiquement contraignant de mettre fin aux essais nucl¨¦aires ?. (Weapons of Terror, 2006).
Les explications ci-dessus devraient apporter des r¨¦ponses ¨¤ un grand nombre de questions pos¨¦es au d¨¦but de cet article. Un monde sans armes nucl¨¦aires est crucial pour l'humanit¨¦ - c'est ce que le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral a appel¨¦ un ? bien public mondial de la plus haute importance ?. Une interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires permettrait assur¨¦ment d'avancer dans cette voie de nombreuses fa?ons, tout en r¨¦duisant les risques de prolif¨¦ration et prot¨¦geant l'environnement. Le d¨¦sarmement permettrait aussi de lib¨¦rer les ressources financi¨¨res et technologiques au profit du d¨¦veloppement social et ¨¦conomique. Il est important de cr¨¦er un monde o¨´ r¨¨gnent la s¨¦curit¨¦ et la prosp¨¦rit¨¦.
C'est pourquoi je crois personnellement que le vrai soutien au d¨¦sarmement ne comprend pas seulement l'humanit¨¦ enti¨¨re, mais aussi les g¨¦n¨¦rations futures. Les progr¨¨s vers un d¨¦sarmement nucl¨¦aire mondial qui comprend l'entr¨¦e en vigueur indispensable du TICE m¨¦ritent d'¨ºtre soutenus et encourag¨¦s par tous les pays du monde - en particulier par les lecteurs de la Chronique de l'ONU qui comprennent l'importance du multilat¨¦ralisme, l'¨¦tat de droit, la n¨¦cessit¨¦ d'orienter plus de ressources vers la r¨¦alisation des Objectifs du Mill¨¦naire pour le d¨¦veloppement ainsi que les avantages concrets de la paix internationale.
Tous ces objectifs visent ¨¤ un monde sans armes nucl¨¦aires, objectifs qui sont profond¨¦ment ancr¨¦s dans la Charte de l'ONU - ensemble ils d¨¦finissent l'identit¨¦ m¨ºme des Nations Unies en tant qu'institution au service de la paix, de la s¨¦curit¨¦ et du bien-¨ºtre humain, ce qui explique pourquoi le TICE est soutenu par un si grand nombre dans l'Organisation des Nations Unies.
Cependant, les ?tats Membres ne voient pas le trait¨¦ comme une fin en soi. Ils reconnaissent au contraire les nombreuses fa?ons dont il pourrait servir leurs int¨¦r¨ºts nationaux tout en poursuivant d'autres objectifs multilat¨¦raux de d¨¦sarmement et de non-prolif¨¦ration. Ils comprennent aussi que l'incapacit¨¦ d'un seul trait¨¦ ¨¤ r¨¦aliser tous ces objectifs historiques de l'ONU n'est pas une raison suffisante pour diff¨¦rer son entr¨¦e en vigueur.
Ce que le TICE peut faire, cependant, c'est mettre fin de mani¨¨re efficace ¨¤ tous les essais nucl¨¦aires. Plus qu'une vision orient¨¦e vers la poursuite d'un objectif, il offre un cadre international soutenu par un syst¨¨me de surveillance mondial qui s'est consid¨¦rablement ¨¦largi au cours des ann¨¦es r¨¦centes; et le TICE continue d'am¨¦liorer sa capacit¨¦ ¨¤ d¨¦tecter toutes les explosions nucl¨¦aires clandestines, m¨ºme celles qui sont moins puissantes que les explosions atomiques de Hiroshima et de Nagasaki.
J'ai grand espoir qu'une s¨¦rie d'¨¦v¨¦nements qui auront lieu dans les mois ¨¤ venir - notamment deux conf¨¦rences importantes des ?tats parties au TNP en 2009 et la pr¨¦sentation des politiques du pr¨¦sident Barack Obama en 2010, dont les repr¨¦sentants ont parl¨¦ favorablement du trait¨¦, auront un impact profond et positif sur l'avenir du TICE. Cependant, son avenir ne sera pas d¨¦termin¨¦ par les actions d'un seul pays, mais par le soutien de tous les pays, un soutien qui a ¨¦t¨¦ et qui continue d'¨ºtre consid¨¦rable. Finalement, la base la plus importante du soutien, ce sont les gens; ce sont eux qui seront ¨¤ la fois les b¨¦n¨¦ficiaires et les d¨¦fenseurs les plus acharn¨¦s et efficaces du Trait¨¦. Le leadership ¨¦clair¨¦ des pays, soutenu par un public inform¨¦, peut changer beaucoup de choses au niveau mondial, r¨¦aliser m¨ºme un des plus grands progr¨¨s en mati¨¨re de contr?le de toutes les armes - une interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires.
Une question demeure : ? Quelles seront les cons¨¦quences possibles si le trait¨¦ n'entre pas en vigueur ? ?. Il y a de grandes chances que les pays continueront de maintenir leur moratoire unilat¨¦ral sur les essais, ce qui sera respect¨¦ ou non pendant un certain temps. Si un ?tat d¨¦cide de reprendre les essais, les autres seront contraints ¨¤ faire de m¨ºme, ce qui porterait pr¨¦judice au Trait¨¦ en ne respectant pas l'une des clauses cl¨¦s qui ont conduit ¨¤ une extension ind¨¦finie. Cela compromettrait tout espoir de progr¨¨s en mati¨¨re de d¨¦sarmement et cr¨¦erait ¨¤ nouveau des risques pour l'environnement, m¨ºme dans le cas d'essais souterrains.
Le meilleur argument en faveur d'un Trait¨¦ d'interdiction compl¨¨te des essais nucl¨¦aires ne r¨¦side pas dans les craintes d'un ¨¦chec de sa mise en vigueur mais dans la perspective d'un monde plus s?r et plus sain quand il entrera en vigueur.
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