21 septembre 2015

En d¨¦cembre 1948, apr¨¨s des ann¨¦es de guerre et de violence d¡¯une ampleur sans pr¨¦c¨¦dent, les dirigeants mondiaux se sont r¨¦unis ¨¤ Paris o¨´ l¡¯Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale a adopt¨¦ la D¨¦claration universelle des droits de l¡¯homme. Sous la conduite d¡¯Eleanor Roosevelt, veuve de l¡¯ancien Pr¨¦sident des ?tats-Unis d¡¯Am¨¦rique, Franklin D. Roosevelt, cette D¨¦claration compl¨¦tait la relativement nouvelle Charte des Nations Unies et garantissait l¡¯¨¦galit¨¦ des droits de tous les hommes dans tous les pays.

Alors que l¡¯Organisation c¨¦l¨¨bre son 70e anniversaire et que nous ¨¦valuons son impact, il serait n¨¦gligent de ne pas prendre en compte l¡¯importance de ce moment unique de 1948. Quelques ann¨¦es apr¨¨s la cr¨¦ation de l¡¯Organisation, la D¨¦claration universelle des droits l¡¯homme a ¨¦t¨¦ adopt¨¦e alors que le monde ¨¦mergeait de l¡¯une des p¨¦riodes les plus sombres de l¡¯histoire mondiale. Unissant les peuples autour d¡¯un engagement qui visait ¨¤ respecter les droits de l¡¯homme, elle a plac¨¦ l¡¯¨ºtre humain au centre de l¡¯initiative. Avec son adoption, les dirigeants se sont engag¨¦s ¨¤ prot¨¦ger tous les peuples contre les atrocit¨¦s comme celles qui ont ¨¦t¨¦ perp¨¦tr¨¦es durant la Deuxi¨¨me Guerre mondiale.

La D¨¦claration a fourni un point de r¨¦f¨¦rence important pour les discussions sur le d¨¦veloppement, telles que la s¨¦curit¨¦, la pr¨¦vention et le r¨¨glement des conflits, la sant¨¦, le commerce et le dialogue sur le changement climatique. M¨ºme si des centaines de milliers de personnes ont ¨¦t¨¦ prot¨¦g¨¦es contre le danger et la violence, trop souvent ses principes fondamentaux sont n¨¦glig¨¦s et des populations continuent d¡¯¨ºtre laiss¨¦es pour compte.

En 2000, les dirigeants mondiaux se sont r¨¦unis une fois de plus, d¨¦termin¨¦s ¨¤ ¨¦radiquer les maladies et la pauvret¨¦ par le biais des objectifs du Mill¨¦naire pour le d¨¦veloppement (OMD) adopt¨¦s par tous les ?tats Membres des Nations Unies. En 2015, alors que leur ¨¦ch¨¦ance approche, la pauvret¨¦ dans le monde continue de diminuer, le nombre d¡¯enfants scolaris¨¦s dans le primaire n¡¯a jamais ¨¦t¨¦ aussi ¨¦lev¨¦, le taux de mortalit¨¦ infantile a baiss¨¦ de mani¨¨re impressionnante et les investissements cibl¨¦s dans la sant¨¦ ont sauv¨¦ des millions de vies. Depuis 2001, plus de 4 millions de d¨¦c¨¨s imput¨¦s au paludisme ont ¨¦t¨¦ ¨¦vit¨¦s et le taux de mortalit¨¦ des moins de cinq ans diminue plus rapidement qu¡¯au cours des deux derni¨¨res d¨¦cennies.

Nos efforts collectifs sont efficaces, mais alors que nous planifions la transition vers un ensemble ambitieux d¡¯ qui guidera notre action jusqu¡¯en 2030, nous devons faire rena?tre la conviction qui animait Mme Roosevelt pour s¡¯assurer que nous adoptons une approche v¨¦ritablement centr¨¦e sur l¡¯¨ºtre humain. Nous devons continuer ¨¤ r¨¦aliser des progr¨¨s contre certains des d¨¦fis les plus urgents et honorer les promesses que nous avons faites aux peuples du monde, une fois pour toutes, pour tous.

La sant¨¦ par exemple. Elle est fondamentale pour le d¨¦veloppement global, m¨ºme avec de petits investissements stimulant des progr¨¨s par rapport ¨¤ d¡¯autres domaines du d¨¦veloppement, comme l¡¯¨¦ducation et la r¨¦duction de la pauvret¨¦. Nous ne pouvons pas esp¨¦rer cr¨¦er un monde plus prosp¨¨re sans am¨¦liorer les r¨¦sultats en mati¨¨re de sant¨¦. Les communaut¨¦s en bonne sant¨¦ cr¨¦ent des soci¨¦t¨¦s plus stables et des ¨¦conomiques plus dynamiques. Mais pour ce faire, nous devons assurer ¨¤ tous un acc¨¨s abordable et ¨¦quitable ¨¤ des services de qualit¨¦.

En 2012, l¡¯Assembl¨¦e g¨¦n¨¦rale des Nations Unies a approuv¨¦ unanimement une r¨¦solution exhortant les gouvernements ¨¤ garantir ¨¤ tous l¡¯acc¨¨s ¨¤ des services de sant¨¦ de qualit¨¦ sans encourir de difficult¨¦s financi¨¨res. Cette id¨¦e demeure un pilier central des futurs efforts de d¨¦veloppement et, en automne de 2015, les ?tats Membres des Nations Unies adopteront un ensemble d¡¯ qui comprendra probablement un objectif pr¨¦conisant ? ?. En tant que communaut¨¦ mondiale, nous devons nous engager ¨¤ garantir une couverture universelle afin d¡¯am¨¦liorer les soins de sant¨¦ pour tous.

Il faudra modifier notre fa?on de penser et adopter une approche plus ¨¦tendue, plus syst¨¦mique que la perspective verticale, cloisonn¨¦e?qui ¨¦tait la n?tre jusqu¡¯ici. Des investissements intelligents et globaux dans les syst¨¨mes de sant¨¦, y compris des ¨¦tablissements communautaires de soins primaires, des dispensaires et un personnel de sant¨¦ communautaire, seront essentiels pour assurer des soins de qualit¨¦ ¨¤ tous les niveaux. Il faut donner aux syst¨¨mes les moyens de faire face aux maladies transmissibles traditionnelles fr¨¦quentes dans les communaut¨¦s en d¨¦veloppement ainsi que les maladies non transmissibles, comme les accidents vasculaires c¨¦r¨¦braux, le cancer et les maladies cardiaques, qui sont de plus en plus pr¨¦valentes dans les pays ¨¤ faible et ¨¤ moyen revenu. Compte tenu des changements dans le domaine de la sant¨¦, nous devons adapter nos cadres d¡¯application ¨¤ la fourniture de services.

Des investissements cibl¨¦s dans certains domaines de la sant¨¦ continueront de jouer un r?le et all¨¦geront sans aucun doute le fardeau disproportionn¨¦ que les maladies comme le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme font peser sur les syst¨¨mes de sant¨¦ nationaux d¨¦j¨¤ ¨¦prouv¨¦s. Dans les pays durement touch¨¦s, le paludisme, par exemple, repr¨¦sente 40 % des d¨¦penses de sant¨¦ publique et est responsable de 50 % des admissions dans les h?pitaux et de 60 % des consultations externes. Lorsque nous investissons dans des programmes pour lutter contre le paludisme et all¨¦ger ce fardeau, nous d¨¦bloquons des ressources humaines et financi¨¨res qui peuvent ¨ºtre r¨¦orient¨¦es vers d¡¯autres questions, y compris le traitement pr¨¦ventif et les crises.

La r¨¦cente flamb¨¦e de virus Ebola, qui a ravag¨¦ des parties de l¡¯Afrique de l¡¯Ouest, nous a appris une importante le?on : les syst¨¨mes de sant¨¦ doivent ¨ºtre en mesure de faire face aux urgences ¨¤ tout moment afin de r¨¦duire les ondes de choc qui se font sentir dans l¡¯ensemble du syst¨¨me. La communaut¨¦ mondiale s¡¯est mobilis¨¦e pour aider les pays touch¨¦s par Ebola, montrant la n¨¦cessit¨¦ et l¡¯importance d¡¯une action unifi¨¦e des Nations Unies, y compris de leur institutions et de leurs ?tats Membres. Compte tenu du nombre de crises sans pr¨¦c¨¦dent ¨C catastrophes naturelles, actes de violence et conflits ¨C en Afrique, au Moyen- Orient et en Europe de l¡¯Est, nous devons tirer les le?ons de la flamb¨¦e de virus Ebola et faire en sorte que l¡¯Organisation soit unie dans l¡¯action afin d¡¯obtenir la sant¨¦, la s¨¦curit¨¦ et la prosp¨¦rit¨¦ pour tous.

La bonne nouvelle est que la sant¨¦ est un investissement tr¨¨s rentable, avec des d¨¦penses relativement faibles et des r¨¦sultats souvent consid¨¦rables ¨¤ tous les niveaux. En ?thiopie, o¨´ j¡¯ai occup¨¦ les fonctions de Repr¨¦sentante de pays de pendant des ann¨¦es, des r¨¦sultats prometteurs ont ¨¦t¨¦ obtenus avec moins de 15 % des d¨¦penses publiques totales, malgr¨¦ de nombreux d¨¦fis majeurs en mati¨¨re de sant¨¦. Le taux de mortalit¨¦ due au paludisme a baiss¨¦ pour atteindre 936 d¨¦c¨¨s d¨¦clar¨¦s en 2011, et la mortalit¨¦ maternelle a baiss¨¦ de 200 pour 100 000 naissances vivantes entre 2005 et 2010. Avec une augmentation des d¨¦penses de sant¨¦ nationales inf¨¦rieure ¨¤ 20 dollars par personne entre 2002 et 2011, les chiffres de montrent que le Gouvernement ¨¦thiopien a non seulement pu pr¨¦venir la maladie et sauver des vies, mais a aussi donn¨¦ un espoir aux communaut¨¦s et permis de cr¨¦er une soci¨¦t¨¦ plus dynamique.

? mon avis, la sant¨¦ est un droit de l¡¯homme universel et la couverture m¨¦dicale universelle s¡¯inscrit par nature dans le prolongement?¨¦vident de la D¨¦claration universelle des droits de l¡¯homme. En fournissant des soins de sant¨¦ de qualit¨¦ ¨¤ tous les ¨ºtres humains, quel que soit leur ?ge et leur niveau socio-¨¦conomique, nous fournissons une norme de protection de base et assurons une plus grande ¨¦galit¨¦ dans les r¨¦sultats de sant¨¦, ce qui nous aidera ¨¤ r¨¦aliser davantage de progr¨¨s dans le domaine du d¨¦veloppement. Je suis convaincue que la couverture m¨¦dicale universelle est aussi avantageuse sur le plan ¨¦conomique qu¡¯elle est imp¨¦rieuse sur le plan moral.

Toutefois, nous ne pouvons pas fonctionner dans le vide. Si nous voulons v¨¦ritablement promouvoir la sant¨¦ dans le monde, nous devons nous attacher ¨¤ garantir le droit ¨¤ la sant¨¦ pour tous et travailler dans tous les secteurs afin de bien comprendre les facteurs sociaux et environnementaux de la sant¨¦ et d¡¯y r¨¦pondre efficacement. Les organisations, les fondations et d¡¯autres partenaires qui luttent contre le paludisme ont depuis longtemps ¨¦tabli des relations avec le secteur priv¨¦, tirant parti de ses comp¨¦tences pour ¨¦largir les march¨¦s et accro?tre les interventions vitales. Nous avons vu, maintes et maintes fois, que l¡¯engagement du secteur priv¨¦ engendrait des gains consid¨¦rables, les investissements permettant d¡¯am¨¦liorer la sant¨¦ des populations, de fournir une main-d¡¯?uvre plus productive et des ¨¦conomies plus dynamiques, ce qui permet de r¨¦aliser des progr¨¨s durables dans la r¨¦alisation des objectifs de sant¨¦ et de d¨¦veloppement pour des soci¨¦t¨¦s enti¨¨res. ? ce point critique, la communaut¨¦ des Nations Unies doit mettre ¨¤ profit ces le?ons importantes et accro?tre ses relations avec le secteur priv¨¦ afin d¡¯optimiser la valeur de nos investissements et leur efficacit¨¦, ¨¦tendre notre champ d¡¯action et maximiser l¡¯impact de nos efforts.

En d¨¦cembre 2004, le Secr¨¦taire g¨¦n¨¦ral Ban Ki-moon a publi¨¦ un soulignant, entre autres, six ¨¦l¨¦ments essentiels pour renforcer la nature universelle, int¨¦gr¨¦e et transformative des et s¡¯assurer que l¡¯ambition de l¡¯action ¨¤ mener se traduit par une mise en ?uvre efficace au niveau des pays. La n¨¦cessit¨¦ de centrer les objectifs sur l¡¯¨ºtre humain afin d¡¯assurer une vie saine, l¡¯¨¦ducation et l¡¯inclusion des femmes et des enfants est l¡¯un de ces ¨¦l¨¦ments. Avec une population mondiale de 7 milliards d¡¯habitants qui devrait augmenter, nous devons ancrer nos efforts au nom des peuples auxquels ils sont destin¨¦s. Avec les syst¨¨mes de sant¨¦, nous offrons non seulement une libert¨¦ et des possibilit¨¦s financi¨¨res. Nous permettons aussi une plus grande participation au processus du d¨¦veloppement.

Dans ce contexte, lancera bient?t la deuxi¨¨me g¨¦n¨¦ration du Plan d¡¯action de lutte contre le paludisme : Action et Investissement pour vaincre le paludisme 2016-2030. Avant l¡¯adoption des et en phase avec la Strat¨¦gie technique mondiale de lutte contre le paludisme (2016-2030) ¨¦labor¨¦e par , ce plan strat¨¦gique fournit un cadre aux approches transformatives, multisectorielles et centr¨¦es sur l¡¯¨ºtre humain afin de r¨¦aliser les objectifs ambitieux d¡¯¨¦radication du paludisme et de lib¨¦rer le potentiel ¨¦conomique dans d¡¯innombrables communaut¨¦s.

Dans quelques mois aura lieu la transition des OMD aux , un autre ¨¦v¨¦nement marquant de l¡¯histoire . Alors que nous faisons ce pas en avant et poursuivons notre voie vers le succ¨¨s, une chose est claire : cette nouvelle phase de d¨¦veloppement doit inclure tous les peuples, ne laissant personne pour compte, afin que nous puissions tous vivre fi¨¨rement, dans des conditions ¨¦gales et en bonne sant¨¦. D¡¯ici l¨¤, nous devons faire tout ce qui est possible pour assurer l¡¯acc¨¨s universel aux soins de qualit¨¦ par le biais de syst¨¨mes de sant¨¦ comp¨¦tents. C¡¯est une chose tr¨¨s simple, et je crois que Mme Roosevelt ne me contredirait pas.?

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