51吃瓜

ABIDJAN, le 14 juillet 2016鈥擡n C么te d鈥橧voire, seul un 茅pargnant sur huit choisit de placer ses 茅conomies dans une banque ou un 茅tablissement financier, ce qui repr茅sente un taux presque deux fois inf茅rieur 脿 celui observ茅 sur le continent et presque trois fois au-dessous de la moyenne dans les pays 脿 bas revenus. C鈥檈st 脿 croire que les Ivoiriens pr茅f猫rent garder leur argent sous le matelas, ou alors pour les plus ais茅s, investir dans l鈥檌mmobilier ou des comptes 脿 l鈥櫭﹖ranger. Un manque 脿 gagner pour un pays qui ambitionne, depuis le retour de la paix en 2012, de se hisser au rang des pays 茅mergents 脿 l鈥檋orizon 2020.

Pourquoi les Ivoiriens tournent-ils le dos aux banques locales听? Selon le rapport de la Banque mondiale intitul茅听听La course vers l鈥櫭﹎ergence听: pourquoi la C么te d鈥橧voire doit ajuster son syst猫me financier, l鈥檈xplication est 脿 la fois historique et pratique. 芦 La r茅ticence des Ivoiriens s鈥檈xplique en partie par la crise politique qui a rompu les liens de confiance entre les 茅pargnants et leurs banques. Elle provient aussi de la d茅faillance historique de plusieurs banques publiques qui sont susceptibles d鈥櫭猼re ferm茅es, restructur茅es ou privatis茅es 禄,听听estime Jacques Morisset, 茅conomiste en chef 脿 la Banque mondiale et auteur du rapport.

Cette r茅ticence peut aussi s鈥檈xpliquer par le fait que les par les 茅pargnants ivoiriens ont tendance 脿 privil茅gier les placements qui leur offrent de meilleurs rendements. Dans les conditions actuelles, il y a peu d鈥檌ncitation 脿 ouvrir et 脿 g茅rer un compte bancaire pour de nombreuses raisons听: frais de transport pour se rendre 脿 une banque, temps perdu devant le guichet et co没ts excessifs des transactions bancaires. Par ailleurs, la d茅tention d'un compte bancaire n'est pas une garantie pour obtenir un cr茅dit, car les banques ivoiriennes privil茅gient les grandes entreprises, l'achat de titres de l'脡tat ou la constitution de r茅serves de liquidit茅s.

芦听Quand je veux emprunter de l'argent 脿 la banque, on me demande de faire un d茅p么t 脿 hauteur de la garantie bancaire que je souhaite avoir. Si je l鈥檃vais, je n'aurais pas besoin d鈥檜ne banque听禄, mart猫le Hassan Coulibaly Amara, grossiste en riz bas茅 脿 Abidjan.

De plus en plus, les 茅pargnants ivoiriens d茅laissent les banques pour se tourner vers les op茅rateurs de t茅l茅phonie mobile. En 2014, les d茅tenteurs de compte d'argent mobile (24 %) ont d茅pass茅 ceux de comptes bancaires (15 %). En fait, le ratio d鈥檃dultes avec un compte mobile en C么te d鈥橧voire est le cinqui猫me au monde derri猫re le Kenya (58 %), la Somalie (37 %), l鈥橭uganda (35 %) et la Tanzanie (32 %). Moins de cinq ans apr猫s son arriv茅e en C么te d鈥橧voire, le mobile money s鈥檌mpose donc comme l鈥檜n des moyens de transactions financi猫res les plus utilis茅s par la population. L鈥橝utorit茅 de r茅gulation des t茅l茅communications de C么te d鈥橧voire (ARTCI) estime que sur les 24 millions d鈥檃bonn茅s au r茅seau de t茅l茅phonie mobile enregistr茅s en juin 2015, 7,2 millions ont des comptes de mobile money. Au cours du premier semestre 2015, les recettes sur les retraits, les transferts et les paiements de factures ont atteint 17 milliards FCFA, soit environ 28 millions de dollars.

Le rapport de la Banque mondiale note que si ces comptes mobiles facilitent les paiements et les transferts d鈥檃rgent, ils ne permettent pas l鈥檕ctroi de cr茅dit, une des fonctions principales d鈥檜n syst猫me financier. D鈥檕霉 l鈥檃ppel aux dirigeants ivoiriens d鈥檃dopter deux orientations pour inverser la tendance et renforcer l'interm茅diation financi猫re en C么te d鈥橧voire.

La premi猫re serait d'encourager les banques, y compris les 茅tablissements de micro-cr茅dits, 脿 se rapprocher de leur client猫le 脿 travers des innovations et des partenariats pour r茅duire leurs co没ts de transaction. La deuxi猫me orientation serait de favoriser l鈥檈ssor des institutions financi猫res autres que les banques commerciales. Par exemple, les op茅rateurs de t茅l茅phonie mobile pourraient octroyer des cr茅dits comme au Kenya, o霉 l'op茅rateur Safaricom a introduit en 2013 un service de cr茅dits en partenariat avec une banque (M-Shwari). Celui-ci compte aujourd'hui plus de 10 millions de clients. Le rapport pr茅conise 茅galement d鈥檃ccorder l鈥檃utorisation aux 茅tablissements de microfinance 听d鈥櫭﹎ettre des cartes de d茅bit et de cr茅dit bancaires.

Un renforcement du syst猫me financier est indispensable si la C么te d鈥橧voire veut poursuivre la voie de l鈥櫭﹎ergence. Avec une am茅lioration de son indice de d茅veloppement financier 脿 hauteur de celui observ茅 au Cap-Vert ou en Namibie, sa croissance 茅conomique pourrait s'accro卯tre de 2,4 %. S'il atteignait celui de l'Afrique du Sud, sa croissance pourrait augmenter de plus de 5 %.