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La jeunesse africaine r¨¦clame la parole

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La jeunesse africaine r¨¦clame la parole

Leurs voix sont de plus en plus difficiles ¨¤ ignorer
Busani Bafana
Afrique Renouveau: 
African youth participate at an international youth forum at the UN headquarters in New York. Photo: Africa Renewal/Shu Zhang
Photo: Africa Renewal/Shu Zhang
Des jeunes Africains participent ¨¤ un forum international de la jeunesse au si¨¨ge de l¡¯ONU ¨¤ New York. Photo: Afrique Renouveau/Shu Zhang
La jeunesse africaine s¡¯appuie sur la technologie et l¡¯am¨¦lioration des comp¨¦tences en mati¨¨re de leadership et d¡¯organisation pour se mobiliser en faveur du changement social et exiger une place autour de la table pour faire entendre sa voix. Dans cette ¨¦dition, nous examinons les raisons de l¡¯¨¦mergence de jeunes leaders sur le continent et de leur influence grandissante dans le monde politique et des affaires.

Un vent nouveau souffle sur l¡¯Afrique : de plus en plus de jeunes remportent les ¨¦lections. Pr¨¦sidents, ministres ou gouverneurs, s¨¦nateurs ou d¨¦put¨¦s, ils souhaitent ¨ºtre repr¨¦sent¨¦s ¨¤ la table politique.

Les jeunes se servent de leurs voix pour faire ¨¦lire des dirigeants plus jeunes, ou qui selon eux, seront sensibles ¨¤ leur situation.

En Ouganda, Proscovia Oromait n¡¯avait que 19 ans en 2012 lorsqu¡¯elle est devenue la plus jeune d¨¦put¨¦e au monde, repr¨¦sentant le comt¨¦ d¡¯Usuk dans le district de Katakwi. ? Petite, je disais que j¡¯allais devenir Pr¨¦sidente. Faire partie des dirigeants du pays ¨¦tait un r¨ºve. Me voil¨¤ d¨¦sormais, la plus jeune d¨¦put¨¦e. Je suis si fi¨¨re ?, a confi¨¦ Mme Oromait au journal The Independent.

En Afrique du Sud, Lindiwe Mazibuko, 37 ans, a ¨¦t¨¦ ¨¦lue chef de l¡¯opposition au Parlement en 2011, repr¨¦sentante de l¡¯Alliance d¨¦mocratique. Elle est devenue la premi¨¨re femme noire ¨¤ occuper ce poste. ? Il n¡¯y a pas de prosp¨¦rit¨¦ sans une politique dynamique, diversifi¨¦e et v¨¦ritablement comp¨¦titive, fond¨¦e sur l¡¯excellence, la transparence et l¡¯engagement envers le bien public ?, a d¨¦clar¨¦ Mme Mazibuko lors d¡¯une conf¨¦rence TEDxEuston en janvier 2016.

D¡¯autres jeunes rejoindront bient?t les bancs du Parlement au Nig¨¦ria, au Ghana, en C?te d¡¯Ivoire, au Kenya, en Afrique du Sud, en ?gypte, en Tunisie, au Maroc, au Cameroun, en Zambie, en Tanzanie, en encore en Ouganda. L¡¯¨¦lection pr¨¦sidentielle d¡¯ao?t 2018 pourrait donner aux dirigeants du Zimbabwe une nouvelle jeunesse.

Nelson Chamisa, 40 ans, le nouveau chef du parti de l¡¯opposition Mouvement pour le changement d¨¦mocratique (MDC), s¡¯appr¨ºte ¨¤ devenir le futur dirigeant du Zimbabwe. Si M. Chamisa gagnait, il serait l¡¯un des plus jeunes pr¨¦sidents d¡¯Afrique d¨¦mocratiquement ¨¦lus.

Selon la Commission ¨¦lectorale du Zimbabwe, 60 % des 5,3 millions d¡¯¨¦lecteurs inscrits aux ¨¦lections ont moins de 40 ans. Il s¡¯agit d¡¯une preuve de l¡¯engagement des jeunes dans le choix d¡¯un nouveau mode de gouvernance apr¨¨s le mandat de Robert Mugabe, 94 ans, qui a d¨¦missionn¨¦ en novembre dernier, apr¨¨s 37 ans au pouvoir.

Une voix nouvelle

Lors d¡¯une r¨¦cente interview accord¨¦e ¨¤ la radio allemande Deutsche Welle, M. Chamisa d¨¦clarait : ? Les personnes influentes, ce sont les jeunes. Nous voulons aussi les voir en politique. Nous voulons que la jeunesse repr¨¦sente notre continent. Nous voulons que notre continent ait une voix nouvelle. ?

Dans un article de 2005 pour CNN, David E. Kiwuwa, professeur d¡¯¨¦tudes internationales ¨¤ l¡¯universit¨¦ de Princeton, notait que ? l¡¯?ge moyen des dix dirigeants [africains] les plus ?g¨¦s est de 78,5 ans, contre 52 ans pour les dix pays les plus d¨¦velopp¨¦s du monde ?.

En moyenne, selon M. Kiwuwa, ? seulement 15 % ¨¤ 21 % des citoyens [de ces pays africains] ¨¦taient n¨¦s lorsque ces pr¨¦sidents ont pris les r¨ºnes ?. Certains affirment qu¡¯avec ? l¡¯?ge et l¡¯anciennet¨¦, viennent la sagesse, la pr¨¦voyance et l¡¯exp¨¦rience. ? D¡¯apr¨¨s lui, si les jeunes Africains saisissent les opportunit¨¦s qui s¡¯offrent ¨¤ eux en politique et dans d¡¯autres secteurs, ils peuvent transformer le continent. Il regrette les mandats interminables des dirigeants qui emp¨ºchent l¡¯¨¦mergence de jeunes successeurs cr¨¦dibles.

Batsani Ncube, un politologue zimbabw¨¦en de 39 ans, se fait l¡¯¨¦cho de M. Kiwuwa, et souligne que les jeunes attirent rarement l¡¯attention des dirigeants politiques, qui ne croient pas en leur capacit¨¦ ¨¤ gouverner.

Les ¨¦lites politiques pensent d¨¦tenir toutes les solutions aux d¨¦fis du d¨¦veloppement, explique M. Ncube. ? Prenez l¡¯exemple de leur approche pour r¨¦sorber le ch?mage des jeunes : leurs solutions conviennent davantage aux ¨¦lites vieillissantes. Les dirigeants consultent peu les jeunes. ?

Les jeunes, de par leur ¨¦nergie et leur passion, m¨¦ritent une place de choix, affirme Kuseni Dlamini dans un article publi¨¦ en 2013 par Ernst & Young.

?nergie et passion

? Le facteur le plus important pour la croissance est l¡¯¨¦nergie et la passion des jeunes qui d¨¦bordent manifestement d¡¯¨¦nergie positive et d¡¯optimisme ?, ajoute M. Dlamini, pr¨¦sident du Times Media Group of South Africa et directeur de Massmart, un d¨¦taillant affili¨¦ ¨¤ Walmart aux ?tats-Unis.

? Ce sont de jeunes entrepreneurs, scientifiques, universitaires, ing¨¦nieurs. Ils ne veulent pas d¡¯aide ou de charit¨¦. Ils veulent lib¨¦rer leur potentiel ?, a indiqu¨¦ M. Dlamini, qui a ¨¦t¨¦ nomm¨¦ ? Jeune leader mondial ? en 2008 par le Forum ¨¦conomique mondial, un titre accord¨¦ aux ? leaders les plus performants ? qui encadrent d¡¯autres jeunes.

La population africaine sera de 1,6 milliard d¡¯ici 2030, selon le D¨¦partement des affaires ¨¦conomiques et sociales de l¡¯ONU, et les jeunes, qui en repr¨¦senteront 42 %, auront besoin de participer ¨¤ la politique, ¨¤ l¡¯emploi et ¨¤ l¡¯inclusion globale dans le d¨¦veloppement.

Selon la Banque africaine de d¨¦veloppement (BAD), un tiers des 420 millions de jeunes Africains (?g¨¦s de 15 ¨¤ 35 ans) est au ch?mage, un autre tiers a un emploi pr¨¦caire et seulement un jeune sur six a un emploi r¨¦mun¨¦r¨¦.

? Alors que 10 ¨¤ 12 millions de jeunes entrent sur le march¨¦ du travail chaque ann¨¦e, seulement 3,1 millions d¡¯emplois sont cr¨¦¨¦s, ce qui laisse un grand nombre de jeunes au ch?mage. Les cons¨¦quences massives sont graves : les conditions de vie moins bonnes alimentent la migration hors d¡¯Afrique et les conflits ?, note la BAD.

La BAD ajoute que ? le r¨¦sultat ¨¤ long terme souhait¨¦ est l¡¯¨¦largissement des opportunit¨¦s ¨¦conomiques pour les jeunes, afin d¡¯am¨¦liorer d¡¯autres aspects de leur vie ?.

La banque vise donc ¨¤ cr¨¦er 25 millions d¡¯emplois ¨¤ l¡¯aide de sa strat¨¦gie Jobs for Youth in Africa (2016-2025) et ¨¤ stimuler la croissance ¨¦conomique en donnant aux jeunes les moyens de r¨¦aliser leur potentiel.

Mettre fin au statu quo

La jeunesse africaine r¨¦clame une place ¨¤ la table politique, mais le secteur de l¡¯agrobusiness, qui pourrait valoir 1 000 milliards de dollars d¡¯ici 2030, selon la Banque mondiale, est ¨¤ port¨¦e de main.

L¡¯African Agribusiness Incubator Network (AAIN), un incubateur d¡¯entreprises, bas¨¦e ¨¤ Accra, au Ghana, souhaite que les jeunes innovent et dirigent la transformation ¨¦conomique.

Ralph von Kaufmann, consultant aupr¨¨s de l¡¯AAIN, affirme que ? l¡¯agrobusiness pr¨¦sente des opportunit¨¦s pour les jeunes et les femmes, mais il est n¨¦cessaire de cr¨¦er les bonnes politiques afin d¡¯en faciliter l¡¯acc¨¨s ?.

Pour Nthabiseng Kgobokoe, jeune horticultrice d¡¯Afrique du Sud, la premi¨¨re ¨¦tape doit ¨ºtre ? l¡¯inclusion des jeunes dans l¡¯¨¦laboration des politiques. L¡¯¨¦ducation ne peut ¨¤ elle seule r¨¦soudre les probl¨¨mes ; il est n¨¦cessaire de cr¨¦er des conditions politiques et ¨¦conomiques propices ¨¤ la r¨¦ussite des jeunes entrepreneurs ?.

Selon Mme Kaobokoe, les jeunes entrepreneurs sont confront¨¦s aux m¨ºmes d¨¦fis sur tout le continent : manque d¡¯acc¨¨s au financement, bureaucratie, et politiques inad¨¦quates.

Les d¨¦cideurs oublient que les jeunes sont la colonne vert¨¦brale de tout d¨¦veloppement socio-¨¦conomique et politique, souligne Mme Kgobokoe.

Les jeunes gens talentueux doivent faire un pas en avant et participer ¨¤ la prise de d¨¦cision, dit Mme Mazibuko. ? Nous subissons le st¨¦r¨¦otype d¡¯un continent sombre, sans espoir... Nous devons nous pr¨¦senter aux ¨¦lections, travailler dans la fonction publique et mettre fin au statu quo ?. ? ?

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