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Ebola, une menace pour l’économie des pays affectés

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Ebola, une menace pour l’économie des pays affectés

Les travailleurs étrangers rentrent chez eux par peur de contagion
Kingsley Ighobor
Afrique Renouveau: 
Vendors struggle with plummeting sales and rising cost of transporting goods to the market in West Point in Monrovia, Liberia, after the Ebola outbreak and quarantine took effect in the country.  Photo: UNDP/ Morgana Wingard
Photo: PNUD/Morgana Wingard
Les commerçants sont à la peine : les ventes sont en chute libre sur le marché de West Point à Monrovia. Les prix d’acheminement ont considérablement augmenté à cause d’Ebola et des mesures de quarantaine. Photo: PNUD/Morgana Wingard

Il est impossible pour le moment d’avoir une idée réelle de l’impact économique de la flambée d’Ebola sur les pays les plus touchésÌý –la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone. La collecte des données est en cours et l’on ne sait toujours pas quand le virus mortel sera maîtrisé. Mais même les prévisions les plus optimistes ne laissent rien augurer de bon pour ces pays.

Ces trois pays d’Afrique de l’ouest étaient des plus pauvres du monde, même avant la flambée d’Ebola. L’indice de développement humain 2014 du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui classe les pays suivant le revenu, l’espérance de vie, l’éducation et la qualité de vie, avait rangé la Sierra Leone à la 183e place sur 187 pays, la Guinée à la 179e place et le Libéria à la 175e. Il est donc à craindre que l’Ebola mine les petites avancées que de nouveaux investissements y ont produites.

Une étude de la Banque mondiale sur l’impact économique de l’épidémie d’Ebola en 2014 évoque deux scénarios possibles. Dans le premier scénario dit de « faible Ebola », la maladie serait contenue au début de l’année 2015 avec environ 20 000 cas et l’activité économique reprendrait progressivement. Dans le second scénario – dit de « fort Ebola » contenir la maladie prendrait plus de temps, le nombre de cas pourrait atteindre 200 000 et la flambée s’aggraverait en 2015. La Banque fait remarquer que dans le second scénario, le produit intérieur brut (PIB) de l’Afrique de l’Ouest pourrait subir une perte de 32 milliards de dollars d’ici à 2015. Dans le premier scénario, la perte de PIB de la région pourrait se chiffrer à environ 4 milliards de dollars.Ìý

Dans le scénario de « faible EbolaÌý » le PIB de la Guinée passerait de 4,5% à 2,4% ; celui du Libéria de 5,9% à 2,5% et celui de la Sierra Leone de 11,3% à 8%. Il est évident que ces économies vont ralentir. « L’activité économique sierra-léonaise a été réduite de 30% à cause de l’Ebola », a déclaréÌý à la BBC, Joseph Sesay, le Ministre sierra-léonais de l’agriculture..

Un rapport du PNUD sur l’impact socio-économique de la maladie à virus Ebola en Sierra LeoneÌý avertit que l’Ebola pourrait anéantir les avancées économiques de l’après-guerre. On parle déjà de pénurie alimentaire alors même que le Leone –la devise du pays- se déprécie à grande vitesse.

Les investisseurs étrangers se retirent en masse des pays les plus touchés. ArcelorMittal, le leader mondial de l’acier a récemment évacué son personnel expatrié du Libéria. London Mining, une entrepriseÌý britannique, a fait de même en Sierra Leone. Sans le minerai de fer, le taux de croissance de la production en Sierra Leone, qui était de 20% en 2013, tombera à 5,5% selon le Fonds monétaire international (FMI), ce qui démontre l’importance du secteur minier dans l’économie du pays. Craignant pour la sécurité de leur personnel, un certain nombre d’organisations non gouvernementales internationales au Libéria ont également mis fin à leurs activités.Ìý

Il n’y a pas de cas confirmé d’Ebola au Ghana mais cela n’a pas empêché les compagnies minières d’évacuer leurs personnels étrangers et de réduire leurs opérations. Business Day, une publication locale, rapporte que les grands hôtels d’Accra, la capitale, qui généralement sont à court de chambres, n’ont maintenant qu’un taux d’occupation de 30%. Le Ghana et la Côte d’Ivoire produisent 60% du cacao mondial, un secteur également menacé par Ebola. On craint que l’épidémie ne se propage dansÌý ces pays. « Tout risque de perturbation de la production de fèves de cacao par une éventuelle épidémie dans ces régions ferait augmenter les prix de nouveau, » affirme Nitesh Shah, analyste chez ETF Securities, une société d’investissement basée à Londres.Ìý Les prix du cacao avaient augmenté de 18,5% à la mi-octobre en raison d’une baisse de productionÌýliée à Ebola.

Les projets d’infrastructure ont aussi été affectés par le virus Ebola. Un projet routier très attendu financé par la Banque mondiale devant relier la Guinée au Libéria a été suspendu parce que l’entrepreneur, China Henan International, a retiré ses ouvriers.

De surcroît, la fermeture des frontières et les interdictions de voyager dans la région risquent de faire perdre encore du terrain au commerce sous régional qui n’est déjà que de 12% à peine. « Auparavant nous importions des produits du Nigéria pourÌý les vendre ici (en Sierra Leone). Ce n’est plus possible, faute de liaisons aériennes » affirme Chris Eyen, un homme d’affaires basé à Freetown. En plus desÌý annulations de vols, la plupart des transporteurs maritimes n’accostent plus au Libéria.Ìý

D’autres pays de la région ressentent les répercussions de l’épidémie. La Gambie, qui tire 16% de son PIB du tourisme, voit ses revenus touristiques baisser de 65%, selon Benjamin Thomas, le Ministre gambien du tourisme. Au Sénégal, une baisse du nombre des touristes pourrait provoquer uneÌý contraction de 1% duÌý PIB d’après la Banque mondiale.

Les économistes peuvent bien sonner l’alarme, mais de nombreux experts en développement estiment qu’il n’y a pas lieu de s’affoler. La Banque mondiale préconise une riposte nationale et internationale rapide pour atténuer l’impact économique d’Ebola. Déjà, le FMI a accordé une aide d’urgence de 130 millions de dollars aux pays touchés alors même que les États-Unis ont demandé au Fonds d’élargir ce soutien en accordant à ces pays un allégement de la dette de 100 million de dollars.Ìý

Lors du dernier sommet du G20 à Brisbane en Australie à la mi-novembre 2014, les dirigeants des plus grandes puissances économiques mondiales ont soutenu le fonds de secours du FMI. Les donateurs accroissent actuellement leur appui, affirme Jim Yong Kim, le Président de la Banque mondiale. Les Nations Unies avaient, dans un premier temps, lancé un appel d’un montant d’un milliard de dollars pour lutter contre l’Ebola; selon David Nabarro, le Coordonnateur du système des Nations Unies pour Ebola, 800 millions avaient été reçus à la mi-novembre (voir page 18). Le Dr Nabarro affirme qu’il faudrait désormais 1,5 milliard. Mais s’il paraît urgent de mobiliser tous les efforts pour contenir le virus, il est entendu que remettre à flot les économies dévastées par l’Ebola ne sera pas facile. 

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