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Afrique Renouveau : La COP 26, initialement pr茅vue pour ce mois de novembre, a 茅t茅 report茅e 脿 l'ann茅e prochaine en raison de la COVID-19. Quel a 茅t茅 l'impact de la COVID-19 sur le processus de n茅gociation, en particulier en Afrique ?

Tanguy Gahouma : Nous pouvons retarder un 茅v茅nement comme la COP26, mais nous ne pouvons pas retarder les travaux parce que les d茅fis auxquels nous sommes confront茅s ne peuvent pas 锚tre report茅s. En janvier 2021, lorsque la mise en 艙uvre de l'Accord de Paris commencera, nous vivrons dans un monde "r茅gi" par l'Accord de Paris. Ce sera le d茅but de la mise en 艙uvre du nouveau r茅gime climatique. Nous avions tant de travail 脿 accomplir avant cela, mais nous n'avons pas pu le faire.

Prenons l'article 6, par exemple. Nous devions travailler sur la mani猫re de structurer les march茅s du carbone et nous pr茅parer 脿 mettre en 艙uvre les r猫gles convenues pour atteindre nos objectifs CND (contributions nationales d茅termin茅es) de 1,5 掳C ou rester en dessous de 2 掳C. Nous pensions terminer ce travail cette ann茅e, mais 脿 cause de la COVID-19, nous n'avons pas pu.

Un autre d茅fi consistait 脿 rendre compte des ambitions d'avant 2020. Nous pensions que nous aurions toutes les informations en termes de financement et d'att茅nuation cette ann茅e, mais nous ne pouvons pas travailler sur ce sujet maintenant. Nous y travaillerons apr猫s 2020.

En termes de financement, 脿 partir de l'ann茅e prochaine, l'accord de Paris stipule un besoin d'au moins 100 milliards de dollars par an pour le financement du climat. Nous avons essay茅 de travailler sur ce point, mais nous n'avons pas eu de cycle de n茅gociations cette ann茅e.

Nous avons encore du travail 脿 faire sur l'adaptation. Nous avons travaill茅 sur la catastrophe climatique en Afrique, mais nous ne pouvons pas travailler sur les pertes et les dommages. Pourtant, nous avons d茅j脿 perdu 2,9 % du PIB 脿 cause de la COVID-19, et il n'y a aucun m茅canisme dans le cadre de la convention pour nous aider dans ce domaine.

Cela change-t-il de mani猫re significative les positions et les pr茅occupations que l'Afrique aurait pu exprimer ?

Non. Nous repr茅sentons 54 pays, mais nous avons pr猫s de 200 pays dans ce processus complexe et il est vraiment important de s'en tenir 脿 nos positions car nous sommes l'un des continents les plus vuln茅rables du monde.

Comment se pr茅sente la mise en 艙uvre de l'accord de Paris en Afrique ?

L'accord de Paris est entr茅 en vigueur en novembre 2016, cependant, la mise en 艙uvre du deuxi猫me engagement du protocole de Kyoto est pr茅vue jusqu'脿 la fin de 2020, et la mise en 艙uvre des PND communiqu茅s dans le cadre de l'accord de Paris commence en 2021.

Donc, 脿 partir de cette date, nous 茅valuerons, peut-锚tre un ou deux ans plus tard, et nous avons un sommet mondial en 2023, qui sera un exercice mondial pour 茅valuer la mise en 艙uvre de l'accord

Pensez-vous que les pays africains sont pr锚ts ?

Je pense que la COVID-19 a beaucoup retard茅 la pr茅paration de nos pays parce que cette ann茅e nous avions pr茅vu de r茅viser les CND. Cela aurait permis 脿 de nombreux pays d'actualiser leurs politiques et d'锚tre au courant des changements pour l'ann茅e prochaine. Mais COVID-19 a retard茅 le processus et je pense que de nombreux pays africains, comme de nombreux pays d'autres r茅gions, ne sont pas enti猫rement pr茅par茅s 脿 la mise en 艙uvre de l'accord de Paris.

Jusqu'脿 pr茅sent, le Rwanda est le seul pays africain 脿 soumettre un CND actualis茅. Quel est le degr茅 d'ambition des CDN des pays africains ?

Pour l'Afrique, la question n'est pas d'锚tre ambitieux. Il s'agit plut么t de l'exactitude des donn茅es et des chiffres, et de la pertinence des politiques. La premi猫re s茅rie de CND a 茅t茅 r茅alis茅e en raison des exigences de l'accord de Paris. Mais maintenant, nous comprenons mieux ce que sont les CND. Le deuxi猫me cycle de CND est donc une occasion unique pour les pays africains de r茅viser et d'actualiser leurs informations.

Par exemple, il n'y avait pas beaucoup d'informations sur l'adaptation lors du premier cycle parce que nous en avions peu 脿 l'茅poque, et nous n'茅tions pas s没rs de devoir les inclure. Ce nouveau cycle de CND nous permettra de mettre plus d'informations sur les d茅fis auxquels nous sommes confront茅s, sur la sant茅, sur le genre et sur le co没t de l'adaptation.

L'Afrique n'茅tant responsable que de 4 % des 茅missions mondiales, nos efforts ne doivent pas consister 脿 arr锚ter le d茅veloppement parce que nous devons r茅duire nos 茅missions. Il s'agit plut么t de maintenir de faibles niveaux d'茅missions et de fournir davantage de d茅tails sur les politiques.

Malgr茅 les limites du premier cycle , avez-vous constat茅 des progr猫s de la part des pays africains ?

Nous avons de nombreux champions en Afrique. Le Rwanda est un tr猫s bon exemple. Je suis Gabonais, donc le Gabon est aussi un tr猫s bon exemple. Le Kenya est 茅galement un bon exemple. Par exemple, cette ann茅e, ils se sont engag茅s 脿 planter 10 脿 20 millions d'arbres. De plus,听pour g茅rer la d茅forestation le Gabon interdit l'exportation de bois. Le Maroc est l'un des leaders en mati猫re d'茅nergie solaire. Le changement climatique est une question de politique et quand vous avez un bon leader, il r茅ussit toujours.

Les op茅rations commerciales dans la Zone de libre-茅change continentale africaine (Zleca) d茅buteront en janvier 2021. Sa mise en 艙uvre peut-elle 茅galement promouvoir l'accord de Paris ? Si oui, comment ?听

Actuellement, le d茅veloppement est souvent li茅 脿 une augmentation des 茅missions de gaz 脿 effet de serre. Mais, d'un point de vue pratique, l'augmentation des 茅changes commerciaux intra-africains devrait permettre de r茅duire les 茅missions de gaz. Nous avons l'un des taux d'importation les plus 茅lev茅s de produits en provenance de Chine et d'Europe. Les transports a茅riens et maritimes sont responsables de pr猫s de 20 % des 茅missions mondiales. Donc, en r茅duisant ces 茅missions li茅es aux importations de loin, nous devrions pouvoir diminuer les 茅missions. Avec la Zleca, il y aura certainement plus d'industries car nous devrons produire pour nous-m锚mes, mais la diminution des importations en Afrique compensera.

En Afrique, le financement est une autre question dans la mise en 艙uvre de l'Accord de Paris. Le financement fait-il encore partie des discussions ?

La question du financement pour l'Afrique est au c艙ur des n茅gociations. Car, aujourd'hui, on nous demande d'utiliser des technologies plus co没teuses pour r茅duire les 茅missions. Nous avons d茅j脿 un taux de pauvret茅 茅lev茅 et il est 茅vident que l'Afrique ne r茅ussira pas 脿 changer sa trajectoire d'茅missions si on ne l'aide pas.

Cependant, nous ne voulons pas que l'aide climatique soit m茅lang茅e 脿 l'aide publique au d茅veloppement. L'argent consacr茅 au climat doit 锚tre nouveau et en ajout. Nous avons beaucoup de soutien pour l'att茅nuation. Mais pour nous, en Afrique, l'adaptation est 茅galement importante, ce qui est l'un de nos principaux domaines d'intervention car nous sommes tr猫s touch茅s.

Vous savez, les trois quarts des grandes villes africaines se trouvent sur la c么te (Maputo, Durban, Libreville, Abidjan) et l'un des plus grands risques est l'茅l茅vation du niveau de la mer. Nous devrons d茅velopper des infrastructures pour prot茅ger nos c么tes, nos populations, etc.... et cela signifie que le financement devrait venir de la communaut茅 internationale.

Les donateurs veulent-ils aider ?

En ce qui concerne l'att茅nuation, oui. Toutes les technologies li茅es 脿 l'att茅nuation proviennent des pays d茅velopp茅s. Le financement de l'att茅nuation est li茅 脿 des mod猫les 茅conomiques qui sont souvent assez int茅ressants pour les pays africains, et il y a une certaine 茅coute car il y a des mod猫les 茅conomiques qui permettent une certaine rentabilit茅 dans l'action climatique.

D'autre part, notre grand probl猫me est l'adaptation, car les pays d茅velopp茅s ne sont pas sensibles 脿 nos arguments. Sur l'exemple de l'茅l茅vation du niveau de la mer, ils peuvent dire que l'茅rosion c么ti猫re n'est pas un probl猫me d'adaptation au changement climatique mais un probl猫me de d茅veloppement 茅conomique. L'adaptation est tr猫s proche de la vie quotidienne, tr猫s proche de l'茅volution des conditions de vie et il y a tr猫s peu de financement pour cela.

Quelle est votre vision de la r茅ussite pour votre mandat de deux ans ?

Ma vision est en deux parties tr猫s simples : La premi猫re est de mettre l'Afrique au c艙ur des n茅gociations. Nous repr茅sentons un quart des voix et nous sommes les plus vuln茅rables. Nous repr茅sentons la plus grande population active car la moiti茅 du continent a moins de 25 ans. Nous serons donc les plus restreints par l'Accord de Paris car les pays d茅velopp茅s sont d茅j脿 d茅velopp茅s et devront simplement changer de technologies. Nous ne sommes pas encore d茅velopp茅s, et on nous demande d茅j脿 de ne pas produire d'茅missions. C'est pourquoi nous devons 锚tre 茅cout茅s pendant les n茅gociations.

Le deuxi猫me d茅fi est de placer les n茅gociations au c艙ur des priorit茅s africaines car 脿 la fin du mandat, 脿 la fin de 2022, la CdP 27 doit 锚tre organis茅e en Afrique. L'organisation des CdP se fait 脿 tour de r么le entre les diff茅rentes r茅gions et continents dans le cadre de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (CCNUCC) et la CdP 27 va 锚tre le tour de l'Afrique. Nous devons mobiliser les pr茅sidents et les premiers ministres africains pour que cette CdP soit v茅ritablement une CdP africaine et que le climat fasse partie des priorit茅s en termes de politiques et de d茅veloppement 茅conomique. Ce sont ces deux questions qui r茅gissent mon mandat.

Si vous aviez un message pour l'Afrique en g茅n茅ral, pour les politiciens, pour les citoyens, quel serait-il ?

La COVID-19 nous montre que nous ne pouvons pas nous d茅velopper 脿 l'infini sans prendre soin de la nature. Nous parlons beaucoup des origines de la COVID-19 comme pouvant 锚tre d'origine animale. Je pense que la COVID-19 nous envoie ce message que nous devons prendre en compte la nature et toutes les autres esp猫ces qui vivent sur terre. C'est donc l'occasion pour nous de ne pas revenir au statu quo听mais de changer la mani猫re dont nous d茅veloppons nos 茅conomies pour un d茅veloppement durable, plus inclusif des autres esp猫ces animales, plus inclusif de la nature et pour un monde qui soit 100% conforme 脿 l'Accord de Paris.

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