Zainab Shamsuna Ahmed est la ministre des finances, du budget et de la planification nationale du Nigeria, la plus grande 茅conomie d'Afrique. Derni猫rement, elle a d没 aider son pays 脿 naviguer la crise 茅conomique mondiale d茅clench茅e par les retomb茅es de la pand茅mie de la COVID-19 et la guerre en Ukraine. Dans cet entretien avec Kingsley Ighobor d'Afrique Renouveau, Mme Ahmed explique que des mesures fiscales efficaces aident le Nig茅ria 脿 r茅sister 脿 la temp锚te. Elle 茅voque 茅galement la mani猫re dont la Zone de libre-茅change continentale africaine stimulera les entreprises en Afrique, et a un message sp茅cial pour les jeunes femmes. En voici des extraits.
En tant que ministre des finances du Nigeria, quelles sont vos r茅flexions sur la gestion de la plus grande 茅conomie d'Afrique ?听
Eh bien, il a 茅t茅 difficile de g茅rer l'茅conomie, ainsi que la vie familiale, car j'ai une famille et j'essaie de rester 脿 l'茅coute de ma famille.
Mais c'est une p茅riode difficile pour tout ministre des finances d'un pays en d茅veloppement. Comme vous le savez, le monde est confront茅 脿 de multiples d茅fis. Nous avons pu r茅sister 脿 la pand茅mie de COVID-19, mais elle a affect茅 notre 茅conomie. La pand茅mie a fait chuter le prix du p茅trole brut en raison de la rupture des cha卯nes d'approvisionnement mondiales, ce qui nous a entra卯n茅s dans une r茅cession.听
En r茅ponse, nous avons con莽u le Plan de viabilit茅 茅conomique qui nous a permis de sortir rapidement de la r茅cession en deux trimestres. Nous avons 茅galement r茅vis茅 notre budget national et nos lois de finances, ce qui nous a permis de modifier un certain nombre de lois fiscales, de r茅aliser davantage de recettes et de stabiliser notre 茅conomie.
En cons茅quence, nous avons commenc茅 脿 enregistrer une croissance positive et avons connu sept quotas cons茅cutifs d'expansion 茅conomique, mais la guerre entre la Russie et l'Ukraine a 茅clat茅.
Heureusement, nous sommes en mesure de maintenir des indicateurs macro茅conomiques positifs et de poursuivre la croissance de l'茅conomie. Cependant, nous ressentons toujours l'impact de l'inflation, car elle a tendance 脿 augmenter.
Comme dans la plupart des pays, les prix des denr茅es alimentaires augmentent et font souffrir notre population. Nous nous effor莽ons de voir comment nous pouvons minimiser l'impact de l'inflation et continuer 脿 stabiliser notre 茅conomie, afin de ne pas r茅gresser sur le plan micro茅conomique.听
Apr猫s la pand茅mie et les confinements, quelque 27 millions de Nig茅rians sont tomb茅s dans la pauvret茅. Avez-vous 茅t茅 en mesure de les aider 脿 se relever ?听
Ce qui 茅tait unique dans cette situation, c'est que les personnes qui ont sombr茅 davantage dans la pauvret茅 茅taient des pauvres urbains, un ph茅nom猫ne que nous n'avions pas connu auparavant. Nous avons con莽u des interventions en faveur de la durabilit茅 茅conomique, notamment des transferts d'argent aux pauvres et, surtout, un soutien aux micro, petites et moyennes entreprises. Nous avons accord茅 une aide pour les salaires afin que les petites entreprises puissent conserver leurs employ茅s. Nous avons 茅galement accord茅 des pr锚ts 脿 faible taux d'int茅r锚t aux entreprises pour les aider 脿 r茅investir, 脿 se d茅velopper et 脿 maintenir les emplois.听
Nous avons cr茅茅 un programme de travaux publics qui nous a permis d'employer un grand nombre de jeunes dans des projets de travaux publics, tels que la construction de routes et de logements. Nous avons 茅galement d茅velopp茅 un programme qui a aid茅 les agriculteurs 脿 maintenir leur production agricole.
La ZLECAf ouvrira un plus grand march茅 pour les entreprises en Afrique... Nous avons la possibilit茅 pour les industries de fabriquer des produits qui peuvent 锚tre export茅s dans les r茅gions, ce qui nous permet de gagner des devises. Il nous aidera 脿 am茅liorer les pratiques commerciales et 脿 rester comp茅titifs.听
En ce qui concerne la mobilisation des ressources nationales, la conviction est que le Nigeria peut et doit faire plus. Avez-vous des strat茅gies pour y parvenir ?听
Oui, nous pouvons faire beaucoup plus. Notre ratio recettes/PIB, qui 茅tait de 8 % du PIB en 2019, a gliss茅 脿 6 % pendant la p茅riode COVID-19 parce que nous avons perdu les recettes des secteurs p茅trolier et non p茅trolier en raison de la stagnation du commerce.听
Nous avons cr茅茅 l'Initiative strat茅gique de croissance des revenus (ISRR). Il s'agit d'une s茅rie d'initiatives con莽ues pour renforcer nos capacit茅s, identifier de nouvelles sources de revenus, 茅largir notre base de revenus et bloquer les fuites de revenus. La SRGI a 茅t茅 un succ猫s. Nous avons travaill茅 syst茅matiquement pour atteindre les objectifs cl茅s.听
Nous avons ramen茅 notre cycle budg茅taire de janvier 脿 d茅cembre, ce qui est important car m锚me si le budget f茅d茅ral est faible par rapport 脿 la taille de l'茅conomie, il constitue un facteur d茅terminant pour certaines des d茅cisions que prennent le secteur des affaires et les 脡tats.
Nous avons introduit la loi de finances annuelle pour soutenir l'ex茅cution de nos budgets annuels et augment茅 la TVA [taxe sur la valeur ajout茅e]. Nous avons 茅galement introduit de nouvelles taxes et avons pu bloquer un certain nombre de fuites. En outre, nous avons r茅duit les imp么ts pour les micro, petites et moyennes entreprises.
Aujourd'hui, les petites entreprises ne paient aucun imp么t sur le revenu des soci茅t茅s. Nous avons 茅galement r茅duit les imp么ts des entreprises moyennes de 30 脿 20 % - un all茅gement fiscal qui leur permettra de conserver leurs revenus et de r茅investir.
Entre 1999 et 2021, les emprunts des collectivit茅s locales et du gouvernement f茅d茅ral sont pass茅s de 3,5 trillions de dollars 脿 1,9 trillion de dollars. Vous auriez d茅clar茅 qu'脿 1 900 milliards de dollars, le co没t du service de la dette a d茅pass茅 les revenus du gouvernement, qui s'茅l猫vent 脿 1 600 milliards de dollars. Comment le Nigeria peut-il sortir de ce pi猫ge de la dette ?
Nous nous en sortons en augmentant les recettes. 脌 24 % du PIB, la dette du Nigeria est encore viable. Pour un pays de la taille du Nigeria, les institutions de Bretton Woods disent que vous pouvez emprunter jusqu'脿 50 % du PIB. Nous sommes 脿 24 %, mais nous avons un probl猫me de revenus. Les recettes p茅troli猫res et gazi猫res sont largement insuffisantes en raison de la faible production de p茅trole brut.
Mais le prix du p茅trole augmente sur le march茅 mondial.
M锚me si le prix du p茅trole brut est 茅lev茅 sur le march茅 international, nous n'en tirons pas profit car nos volumes de production sont faibles.听
Qu'avons-nous fait ? Les agences de s茅curit茅 font beaucoup d'efforts [pour s茅curiser les installations de production], et les chiffres augmentent. Nous esp茅rons que d'ici la fin de l'ann茅e, nous serons en mesure de revenir aux 1,6 million de barils par jour pr茅vus dans notre budget.听
En m锚me temps, nous avons une strat茅gie de gestion de la dette que nous suivons strictement, en veillant 脿 ce que nos dettes restent dans des limites viables. Nous savons 茅galement que la r茅partition de la dette entre le pays et l'茅tranger doit 锚tre de 65-35, et nous sommes en dessous de ces seuils.
Nous avons con莽u le plan de viabilit茅 茅conomique qui nous a permis de sortir rapidement de la r茅cession en deux trimestres. Nous avons 茅galement r茅vis茅 notre budget national et nos lois de finances, ce qui nous a permis de modifier un certain nombre de lois fiscales, de r茅aliser davantage de recettes et de stabiliser notre 茅conomie.
Notre dette est-elle inqui茅tante ?
Oui. Dans une situation o霉 la dette accapare la majeure partie des revenus, il est difficile de maintenir les niveaux de cr茅dit car nous devons faire face 脿 nos obligations en mati猫re de service de la dette. Nous pr茅voyons de continuer 脿 le faire jusqu'en 2022 et 2023.听
Mais nous assurons 茅galement le service du gouvernement ; nous devons payer les salaires et les pensions et financer les agences gouvernementales, et nous devons encore investir dans les infrastructures. La situation est donc difficile, mais nous avons r茅ussi 脿 nous en sortir dans la mesure o霉 l'茅conomie continue d'afficher une croissance positive.
Existe-t-il des mesures pour enrayer la chute de la valeur du naira ? La valeur du naira a 茅volu茅 rapidement, passant de 500 脿 700 naira pour un dollar en peu de temps.
La Banque centrale du Nigeria (CBN) y travaille tr猫s dur. Son objectif est de combler progressivement l'茅cart entre le march茅 non officiel et les taux du march茅 officiel.
Mais pourquoi cette situation ?听
Cette tension sur l'茅conomie et sur le naira est due au fait que la demande de devises 茅trang猫res est sup茅rieure 脿 l'offre. Notre principale source de devises 茅trang猫res est le p茅trole et le gaz, et comme nos niveaux de production sont faibles, les recettes du trafic de p茅trole sont tr猫s basses. Nous avons une 茅conomie dans laquelle les grandes entreprises ont besoin de devises pour faire du commerce. Il s'agit donc d'une situation d'offre et de demande.听
Que faisons-nous ? Nous am茅liorons d'autres secteurs de l'茅conomie qui nous permettront de gagner plus de devises. Nous commen莽ons 脿 voir les recettes d'exportation d茅coller dans le secteur non p茅trolier.
Mon message 脿 nos filles, nos s艙urs et nos petites-filles est le suivant : Vous pouvez le faire. Vous pouvez avoir une bonne vie de famille. Vous pouvez r茅ussir dans tous les domaines que vous choisissez. Il n'y a pas de limites 脿 ce qu'une femme peut faire. Vous pouvez 锚tre aussi bonne qu'un homme.
Au cours des trois derniers trimestres, nous avons vu un mouvement d'environ 200 millions de dollars 脿 950 millions de dollars. La CBN a fourni des incitations qui ont permis cela.听
Le Conseil nig茅rian de promotion des exportations a 茅galement fourni des incitations. Le minist猫re de l'industrie, du commerce et de l'investissement, en collaboration avec la zone de libre-茅change continentale africaine ( ZLECAf) pour soutenir les activit茅s productives, nous permet de fabriquer des produits destin茅s 脿 l'exportation.听
Cela se rapporte en fait 脿 ma prochaine question, qui est de savoir comment la ZLECAf pourrait soutenir la diversification 茅conomique.
La ZLECAf ouvrira un plus grand march茅 pour les entreprises en Afrique. Bien s没r, le march茅 nig茅rian est le plus grand march茅.
Nous avons la possibilit茅 pour les industries de fabriquer des produits qui peuvent 锚tre export茅s dans les r茅gions, ce qui nous permet de gagner des devises 茅trang猫res. Il nous aidera 脿 am茅liorer les pratiques commerciales et 脿 rester comp茅titifs.听
Il aide d茅j脿 les entrepreneurs nig茅rians 脿 renforcer leurs partenariats avec des homologues d'autres pays, ce qui est n茅cessaire pour r茅ussir.
Quel message souhaitez-vous faire passer aux jeunes femmes d'Afrique qui vous consid猫rent comme un mod猫le ?
Mon message 脿 nos filles, nos s艙urs et nos petites-filles est le suivant : Vous pouvez le faire. Vous pouvez avoir une bonne vie de famille. Vous pouvez r茅ussir dans tous les domaines que vous choisissez. Il n'y a pas de limites 脿 ce qu'une femme peut faire. Vous pouvez 锚tre aussi bonne qu'un homme.
