Sandra Guillaume, charg¨¦e des affaires humanitaires au Tchad, nous parle de la frustration et de la peine?de voir des milliers de personnes ne pas obtenir l¡¯aide dont elles ont besoin, mais aussi comment elle a appris ¨¤ transformer la frustration en motivation.

Quelle est la situation humanitaire de la r¨¦gion??

Je suis bas¨¦ ¨¤ Baga Sola, dans la province du Lac. Les besoins sont criants.

Nous avons pr¨¨s de 221 000 personnes d¨¦plac¨¦es ¨¤ l'int¨¦rieur du pays (PDI) enregistr¨¦es, en plus de 17 000 rapatri¨¦s.

La situation humanitaire ici est critique, en raison des groupes terroristes qui continuent de cibler la population, des catastrophes naturelles qui aggravent la crise alimentaire qui frappe d¨¦j¨¤ la population et des ressources qui continuent de diminuer malgr¨¦ les besoins croissants.

Qu¡¯implique la mobilisation de ces ressources ?

Une fois les ¨¦valuations des besoins termin¨¦es et les sites de d¨¦plac¨¦s class¨¦s en fonction des priorit¨¦s, nous rencontrons tous les acteurs humanitaires, y compris les ONG et les partenaires inter-clusters, pour pr¨¦senter les r¨¦sultats des ¨¦valuations conjointes et discuter du plan de r¨¦ponse.

La communication est cruciale ¨¤ ce stade. Nous devons d¨¦terminer quelles organisations ont la capacit¨¦ et la disponibilit¨¦ n¨¦cessaires pour r¨¦pondre aux besoins et identifier les lacunes, ce qui est essentiel car cela nous permet de d¨¦terminer la mani¨¨re dont nous plaidons pour une aide accrue.

Une fois cette ¨¦tape franchie, nous r¨¦digeons un rapport d¨¦crivant la meilleure fa?on d¡¯utiliser l¡¯aide humanitaire.

Cela fait partie de mon travail de veiller ¨¤ ce que tous les acteurs impliqu¨¦s soient conscients de la situation dans la r¨¦gion du Lac afin qu¡¯ils puissent plaider en faveur des ressources n¨¦cessaires pour fournir l¡¯aide requise, ou au moins pour all¨¦ger les souffrances du plus grand nombre de personnes possible.

Dans le meilleur des cas, les donateurs et les partenaires disposent d¨¦j¨¤ des ressources n¨¦cessaires et peuvent s¡¯impliquer, mais d¡¯autres fois, il peut falloir des jours, des semaines, voire des mois, pour obtenir ce dont nous avons besoin.

Le c?t¨¦ positif, c¡¯est qu¡¯il existe une forte solidarit¨¦ au sein de la communaut¨¦ humanitaire de la r¨¦gion, et nous faisons tous de notre mieux pour trouver des ressources partout o¨´ nous le pouvons.

O¨´ trouvez-vous la motivation pour continuer ?

Ne pas pouvoir r¨¦agir rapidement ¨¤ une crise qui touche tant de vies peut ¨ºtre non seulement frustrant, mais aussi d¨¦chirant. J¡¯ai vu une fois une m¨¨re qui essayait d¨¦sesp¨¦r¨¦ment d¡¯allaiter son nouveau-n¨¦, mais elle ne parvenait pas ¨¤ produire du lait parce qu¡¯elle n¡¯avait pas assez de nourriture pour subvenir ¨¤ ses besoins.

Vous pouvez surmonter cette frustration en choisissant d'¨ºtre motiv¨¦ par ce que vous voyez au lieu de vous laisser abattre par cela. Je trouve ma motivation dans le d¨¦sir de faire tout ce que je peux pour aider les personnes dans le besoin, pour aider cette m¨¨re et son enfant. Cela d¨¦passe la frustration - du moins pour moi.

Pour moi, les d¨¦plac¨¦s internes de la r¨¦gion du Lac sont des guerriers et des h¨¦ros.

Ils continuent de faire preuve d¡¯une r¨¦silience et d¡¯une gratitude remarquables d¡¯¨ºtre dans un endroit s?r, m¨ºme avec un acc¨¨s limit¨¦ aux n¨¦cessit¨¦s comme la nourriture, l¡¯eau et les services essentiels.

Interagir avec eux et constater l¡¯impact positif que nous avons eu est incroyablement gratifiant.