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L’Afrique veut un partenariat equitable

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L’Afrique veut un partenariat equitable

— Maged Abdelaziz
Kingsley Ighobor
Afrique Renouveau: 
Maged Abdelaziz, UN Secretary-General’s Special Adviser on Africa. Photo: Africa Section / Bo Li
Photo: Africa Section / Bo Li
Maged Abdelaziz, Conseiller spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique. Photo: Africa Section / Bo Li
En 2012, l’Assemblée générale des Nations Unies a créé un mécanisme chargé de suivre les engagements pris par les pays africains et leurs partenaires en vue d’améliorer le développement économique du continent. Le secrétariat de ce mécanisme est assuré par le Bureau du conseiller spécial pour l’Afrique, qui travaille en lien avec d’autres agences de l’ONU pour suivre les progrès réalisés dans le cadre de ces engagements. Dans un entretien avec Kingsley Ighobor d’Afrique Renouveau, Maged Abdelaziz, le conseiller spécial du Secrétaire général de l’ONU pour l’Afrique, explique ce que les Nations Unies espèrent accomplir avec ce mécanisme de suivi. Ce qui suit est un extrait de cet entretien.

AR : Quel regard portez-vous sur leÌý rythme de développement économique de l’Afrique ?

Abdelaziz : Il existe un potentiel énorme en Afrique. Six des dix économies affichant la plus forte croissance au monde sont africaines et la région possède des ressources importantes, aussi bien naturelles qu’humaines. Ce qu’il faut, c’est un programme de transformation. Ce programme a fait son apparition dans différents documents qui ont été approuvés par l’Union africaine. Le couronnement de ce processus se fera quand l’Agenda 2063 [le plan de développement de l’UA sur 50 ans] sera adopté lors du sommet de l’UAÌý à Addis-Abeba. De nombreux engagements ont été pris et de nombreux plans ont été conçus. À présent, il nous faut décider desÌý objectifs à court et moyen terme, et de ce que nous laisserons auxÌýgénérations futures.

Le problème, ce n’est jamais le manque d’idées, de cadres, de programmes ou de plans directeurs. Le problème, c’est leur mise en œuvre. En quoi ce programme est-il différent des autres ?

Ce que je peux vous dire, c’est qu’il s’agit d’un programme de changement conçu pour générer des résultats concrets qui puissent être mis en Å“uvre. L’objectif, c’est l’industrialisation et cela est crucial. La croissance doit être inclusive, ce qui signifie que chacun en Afrique doit pouvoir bénéficier des ressources naturelles du continent, y compris les pauvres.Ìý

Vous parlez d’un idéal, mais comment s’assurer qu’il est mis en œuvre ?

J’ai confiance dans les gouvernements africains et dans la bonne volonté qui s’exprime dans leurs engagements vis-à-vis de leurs populations. Je ne doute pas que ces engagements seront tenus.

Votre espoir s’appuie donc sur la confiance ?

Ai-je le choix ? Je ne dispose pas plus que l’UA ou l’ONU de moyens coercitifs pour forcer un président ou un premier Ministre à faire quoi que ce soit.

Avez-vous le sentiment que la tâche est abordée avec plus de sérieux qu’avant ?

Absolument, car je constate aujourd’huiÌý qu’il existe un véritableÌý esprit d’intégration régionale. Chaque sous-région a son plan d’intégration, une zone de libre-échange est prévue pour 2017, et une union monétaire d’ici à 2034, avec pour résultatÌý finalÌý une union douanière pour toute l’Afrique. Vous allez me dire : est-ce bien réaliste ? Je vous répondrai qu’il faut tenter d’y parvenir. Si nous n’atteignons pas cet objectif, donnons-nous deux ans, ou cinq ans de plus, mais au moins, essayons. Il y a aussi le lien qui reste à établir entre paix, sécurité et développement. Il n’est pas possible de mettre en Å“uvre un programme de transformation sans inclure la paix et la sécurité.Ìý

Votre bureau met en place un mécanisme de suivi des engagements pris en faveur du développement de l’Afrique. Pourquoi un tel mécanisme ?

En 2008, l’Assemblée générale a adopté une résolution sur le développement de l’Afrique dans laquelle figuraient des engagements spécifiques à mettre en Å“uvre, certains par les pays africains, d’autres par leurs partenaires de développement. Malheureusement, la crise financière de 2008 est intervenue, ce qui a compliqué la mise en Å“uvre de plusieurs éléments de cette déclaration. En 2010, à la demande de l’Assemblée, le Secrétaire général a proposé un mécanisme permettant d’examiner la progression de la mise en Å“uvre des engagements souscrits dans cette déclaration ainsi que de ceux qui avaient été souscrits lors d’autres conférences des Nations Unies sur l’Afrique. La résolution était on ne peut plus claire : elle posait que le nouveau mécanisme de suivi s’appuierait sur les mécanismes existants. Ces mécanismes, nous les avons dénombrés : il n’en existait pas moins de 52 ! Nous n’avons pas réinventé la roue, bien au contraire ; nous nous appuierons sur les informations collectées par lesÌýautres mécanismes.

Allez-vous évaluer les engagements pris pendant la dernière décennie, par exemple ?

Non: à compter de septembre 2014, chaque rapport se concentrera sur quatre ou cinq questions pertinentes qui feront l’objet d’une attention particulière de l’ONU au cours des deux prochaines années. Le rapport de cette année insistera sur l’accélération de la mise en œuvre des OMD, le changement climatique, la bonne gouvernance, ainsi que l’agriculture et la sécurité alimentaire.

Cela signifie donc que vous assurez leÌý suivi des engagements pris et de leur impact sur le terrain en Afrique.

Tout à fait. Et nous proposons aussi des alternatives, quand elles sont disponibles.

Par « engagements », qu’entendez-vous exactement ?

Il s’agit d’engagements dans le domaine de l’aide, du commerce, de l’IDE [investissement direct étranger], la circulation des travailleurs entre les pays, les droits de l’homme, la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption, etc.

Existe-t-il des moyens de s’assurer que ces engagements sont respectés ?

Non, mais notre travail sur le mécanisme de suivi se fait en consultation avec l’UA et les pays africains d’un côté, et les donateurs et les partenaires du développement de l’autre. Nous travaillons aussi avec les pays de l’OCDE [Organisation de coopération et de développement économiques], la Banque mondiale et d’autresÌýinstitutions internationales.

Certains pays de l’OCDE traversent une passe difficile, économiquement parlant. Comment convaincre ces pays d’augmenter ou de mettre en œuvre leurs engagements ?

Notre rôle n’est pas de les convaincre d’augmenter leur niveau d’engagement ; il s’agit plutôt de suivre l’implémentation de ce qui a déjà été décidé entre états membres.Ìý Ìý

Votre rapport encouragera-t-ilÌý la mise en Å“uvre de ces engagements ?

Notre approche cherche à éviter la confrontation. Il ne s’agit pas de pointer du doigt les pays qui ne respectent pas leurs engagements et de délivrer des bons points à ceux qui les respectent. Nous rendrons nos analyses sans polémiquer sur qui a fait quoi, et pourquoi.

Mais comment votre rapport aide-t-il ces pays à respecter leurs engagements ?

Ce rapport fournira une évaluation honnête et disponible pour tous les acteurs, y compris les pays africains, de telle sorte qu’ils se sentiront moralement obligés de tenir leurs engagements ou de prendre en considération les recommandations du rapport. En parlant haut et fort sur le changement climatique ou sur les engagements pris à Copenhague ou au Mexique, en attirant l’attention sur les pourcentages des fonds promis reçus par l’Afrique et les niveaux de mise en œuvre de chaque pays sur le continent, nous serons en mesure d’offrir une image d’ensemble aux décideurs politiques.

Il s’agit donc purement d’un rôle de plaidoyer ?Ìý

Notre rôle est de défendre les intérêts de l’Afrique, n’est-ce pas ? C’est bien pour cela que je suisÌý ici et que je suis le seul conseiller spécial désigné pour s’occuper d’une région spécifique. Notre rapport, nous le rédigeons en consultant tous azimuts, en particulier les experts dans les quatre ou cinq domaines qui intéressent le rapport.

Êtes-vous en lien avec les gouvernements africains et les organisations non gouvernementales ?

Absolument, cela fait partie de l’accord. Les ONG sont autorisées à participer sur un pied d’égalité.

Que répondez-vous à ceux qui disent que cette insistance sur la question des engagementsÌý renforce l’idée selon laquelle l’Afrique est dépendante de l’aide étrangère ?

Ce n’est pas vrai. L’Afrique cherche des partenaires avec lesquels elle peut faire jeu égal, pas des partenaires qui cherchent à l’exploiter. C’est pourquoi j’apprécie l’approche de Nkosazana Dlamini-Zuma, la présidente de la Commission de l’Union africaine, qui a demandé à revoir l’ensemble des partenariats existants. Il faut faire l’examen de nos partenariats avec l’Inde, la Chine, les États-Unis, l’Union européenne, la Ligue arabe. Analysons dans le détail ce que chacun peut en tirer.Ìý

Comment saurez-vous si vous avez réussi ?

Nous le saurons quand nous aurons convaincu les états membres de prendre des mesures additionnelles afin de mettre en Å“uvre leurs engagements ou de combler les lacunes que notre rapportÌýaura identifiées.  

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