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Dix ans apr猫s l'un des g茅nocides les plus atroces du XXe si猫cle, le Rwanda n'a toujours pas fini de remettre sur pied sa soci茅t茅 ravag茅e. De son c么t茅, le Secr茅taire g茅n茅ral de l'ONU, Kofi Annan, exhorte la communaut茅 internationale 脿 faire le n茅cessaire pour 茅viter qu'une catastrophe de m锚me nature ne se produise ailleurs dans le monde. Le 7 avril -- date anniversaire du d茅but des massacres de 1994 au Rwanda -- il exposera les grandes lignes d'un plan d'action que l'ONU a mis au point afin de pr茅venir les g茅nocides.

"Il ne peut y avoir d'obligation plus imp茅rieuse pour la communaut茅 internationale que la pr茅vention du g茅nocide", a fait observer M. Annan en f茅vrier dernier. "Les 茅v茅nements qui se sont produits au Rwanda il y a 10 ans sont particuli猫rement r茅voltants. La communaut茅 internationale qui avait sans aucun doute les moyens de les emp锚cher n'en a pas eu la volont茅. . . Nous devons veiller 脿 ne plus jamais manquer de volont茅."

Le Secr茅taire g茅n茅ral d茅pose une gerbe sur l'un des lieux du g茅nocide 脿 Mwurire (Rwanda) au cours d'une visite en 1998.

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Photo : 漏ONU / D茅partement de l'information

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L'un des 茅l茅ments essentiels de ce plan sera la nomination par l'ONU d'un nouveau conseiller sp茅cial pour la pr茅vention des g茅nocides. Ce conseiller aura pour mission de recueillir des informations sur les crises pouvant d茅boucher sur des actes de g茅nocide, d'avertir de l'imminence d'une catastrophe et de recommander au Secr茅taire g茅n茅ral et au Conseil de s茅curit茅 des possibilit茅s d'action.

Le plan d'action de l'ONU, qui s'inspire des recommandations faites en 1999 par une commission d'enqu锚te ind茅pendante sur le g茅nocide rwandais pr茅sid茅e par l'ancien Premier Ministre de la Su猫de, Ingvar Carlsson, mettra 脿 contribution le syst猫me des Nations Unies tout entier. De nombreux 茅l茅ments d'un tel plan ont d茅j脿 茅t茅 mis en place et l'ONU a notamment modifi茅 la mani猫re dont elle r茅agit face aux conflits arm茅s.

Par ailleurs, depuis le g茅nocide qui a 茅t茅 commis au Rwanda, l'ONU a tendance 脿 agir de fa莽on pr茅ventive en cas de violations massives des droits de l'homme, qui sont souvent les signes avant-coureurs d'un g茅nocide. Comme l'a d茅clar茅 M. Annan 脿 Stockholm le 26 janvier lors d'un forum international, "Nous devons nous attaquer aux causes profondes de la violence et des g茅nocides : l'intol茅rance, le racisme, la tyrannie et le discours public d茅shumanisant qui nient la dignit茅 et les droits de groupes entiers. Nous devons en particulier prot茅ger les droits des minorit茅s, qui sont les plus souvent vis茅es".

100 jours d'horreur

Le g茅nocide rwandais a d茅but茅 le 7 avril 1994. La veille, un avion transportant les Pr茅sidents du Rwanda et du Burundi avait 茅t茅 abattu alors qu'il s'appr锚tait 脿 atterrir 脿 Kigali, capitale du Rwanda. Au cours des 100 jours qui suivirent, quelque 800听000 Rwandais furent massacr茅s. Le g茅nocide se fit de mani猫re tr猫s organis茅e, avec la participation directe de hauts fonctionnaires de l'Etat et de repr茅sentants du parti au pouvoir. Des membres de milices, les forces arm茅es et des civils se livr猫rent 脿 d'inqualifiables atrocit茅s, dirig茅es principalement contre la minorit茅 ethnique tutsie mais aussi contre les membres de la majorit茅 hutue qui refusaient de participer au massacre ou appartenaient aux partis d'opposition.

Le g茅nocide a 茅t茅 perp茅tr茅 sous les yeux de la communaut茅 internationale. Une op茅ration de maintien de la paix -- la Mission des Nations Unies pour l'assistance au Rwanda (MINUAR) -- se trouvait sur le terrain avec quelque 2听000 hommes qui, 脿 l'origine, avaient 茅t茅 envoy茅s pour superviser la mise en oeuvre d'un accord de paix conclu en ao没t 1993 entre le gouvernement et les forces rebelles du Front patriotique rwandais (FPR) 茅tabli en Ouganda.

Une fois le g茅nocide d茅clench茅, 10 casques bleus belges furent tu茅s alors qu'ils essayaient de prot茅ger le Premier Ministre Agathe Uwilingiyimana qui, elle aussi, fut assassin茅e. Boutros Boutros-Ghali, qui 茅tait alors Secr茅taire g茅n茅ral de l'ONU, proposa trois options au Conseil de s茅curit茅 : renforcer la MINUAR, r茅duire ses effectifs ou la retirer enti猫rement. Le Conseil de s茅curit茅 vota en faveur d'une r茅duction des effectifs de la MINUAR, port茅s de 2 000 hommes 脿 270. Ce n'est qu'au milieu du mois de mai que le Conseil revint sur sa d茅cision et vota en faveur de l'envoi de quelque 5 500 casques bleus. Peu d'entre eux arriv猫rent avant la fin des massacres en juillet, au moment de la prise du pouvoir par le FPR, 脿 majorit茅 tutsie.

Le rapport de la Commission Carlsson conclut par la suite : "Si l'Organisation des Nations Unies n'a pas pu emp锚cher et arr锚ter le g茅nocide au Rwanda, la responsabilit茅 en incombe 脿 plusieurs acteurs, en particulier le Secr茅taire g茅n茅ral, le Secr茅tariat [de l'ONU], le Conseil de s茅curit茅, la MINUAR et les Etats Membres de l'Organisation."

Le jour de la parution du rapport, M. Annan -- qui dirigeait les op茅rations de maintien de la paix de l'ONU au moment du g茅nocide -- d茅clara: "Nous regrettons tous am猫rement de ne pas avoir fait plus pour pr茅venir ce crime... Au nom de l'Organisation, je reconnais cet 茅chec et exprime mes profonds remords."

Un r茅tablissement difficile

Au Rwanda m锚me, le 10e anniversaire du g茅nocide sera l'occasion de r茅fl茅chir au g茅nocide et au processus de redressement politique et 茅conomique des 10 derni猫res ann茅es.

La r茅conciliation nationale ne s'est pas faite sans mal, quelque 80 000 personnes soup莽onn茅es de crime de g茅nocide se trouvant toujours en d茅tention provisoire. Nombre d'entre elles seront jug茅es par des tribunaux communautaires locaux connus sous le nom de gacacas, dont pr猫s de 800 s'acquittent actuellement de leur t芒che. A l'heure actuelle, le Tribunal p茅nal international pour le Rwanda, qui si猫ge 脿 Arusha (Tanzanie), poursuit en justice ou instruit quelque 200 affaires parmi les plus graves, impliquant des instigateurs pr茅sum茅s du g茅nocide.

Dans la ville de Cyangugu, pratiquement d茅serte apr猫s le massacre de quelque 50 000 Tutsis en 1994, les Rwandais "comprennent 脿 pr茅sent qu'il leur faut vivre ensemble, travailler ensemble et reconstruire leur pays ensemble," a d茅clar茅 le Gouverneur de la province de Cyangugu, Musa Fazil Harerimana, 脿 l'agence de presse suisse, Hirondelle. La ville elle-m锚me revient 脿 la vie. Elle s'est dot茅e de nouvelles 茅coles, d'h么tels et de march茅s d茅bordant d'activit茅s. Les plantations de th茅 et de caf茅 qui avaient 茅t茅 abandonn茅es atteignent des niveaux de production presque semblables 脿 ceux d'avant 1994.

Selon des donn茅es du Fonds mon茅taire international, l'茅conomie du Rwanda a connu une reprise importante une fois la paix r茅tablie, avec une croissance annuelle de 15 % en moyenne entre 1995 et 1999 et de 7,4 % entre 2000 et 2002 -- ce qui est bien sup茅rieur 脿 la croissance moyenne de l'Afrique subsaharienne en g茅n茅ral.

"Aujourd'hui, le Rwanda a beaucoup 脿 apprendre 脿 la communaut茅 internationale pour ce qui est de faire face au fardeau du pass茅 et de relever le d茅fi que constitue le r茅tablissement", a fait observer le Secr茅taire g茅n茅ral, M. Annan. "Il montre qu'il est possible de d茅passer la trag茅die et de faire rena卯tre l'espoir."

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