La r¨¦volution num¨¦rique est porteuse de belles promesses
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La r¨¦volution num¨¦rique est porteuse de belles promesses
La p¨¦n¨¦tration d'Internet gagne de plus en plus de terrain en Afrique, apportant la perspective de dividendes num¨¦riques sur un continent longtemps marqu¨¦ par des fractures num¨¦riques.
??L¡¯Afrique a atteint un taux de p¨¦n¨¦tration qui a franchi la barre des 15?%, et c¡¯est important??, affirme Nii Quaynor, un scientifique qui a jou¨¦ un r?le cl¨¦ dans l'introduction et le d¨¦veloppement de l'internet en Afrique. Il est connu comme ¨¦tant le ??p¨¨re de l¡¯Internet?? sur le continent.
Cependant, les Africains n¡¯ont pas encore les moyens de produire suffisamment de logiciels, d¡¯applications et d¡¯outils pour rapporter aux ¨¦conomies les dividendes qui leur font cruellement d¨¦faut.
Le passage de connexions par satellite ¨¤ des connexions sous-marines bon march¨¦ date de moins de dix ans. Les nouvelles fibres sous-marines ont conduit ¨¤ une augmentation remarquable de la capacit¨¦ de transmission de donn¨¦es qui r¨¦duit consid¨¦rablement le temps et le co?t de transmission.
Aujourd¡¯hui, 16 c?bles sous-marins relient l¡¯Afrique ¨¤ l¡¯Am¨¦rique, l¡¯Europe et l¡¯Asie, et la connectivit¨¦ internationale ne pose plus de probl¨¨me, rapporte Steve Song, fondateur de Village Telco, une initiative visant ¨¤ mettre au point du mat¨¦riel et des logiciels t¨¦l¨¦phoniques ¨¤ faible co?t. Les pays peuvent ainsi partager des informations plus directement, ¨¤ la fois sur le continent et ¨¤ travers le monde. Cette avanc¨¦e a cr¨¦¨¦ plus d'espace pour l'innovation, la recherche et l'¨¦ducation.
??Les r¨¦seaux ont mis fin ¨¤ l'isolement des scientifiques et des chercheurs africains. Vous avez maintenant acc¨¨s ¨¤ des informations provenant de pays plus d¨¦velopp¨¦s, et cela a pour effet de changer les mentalit¨¦s ?, explique Meoli Kashorda, directeur de Kenya Education Network.
La p¨¦n¨¦tration d'Internet sur le continent n'a pas suivi le rythme de la diffusion de la t¨¦l¨¦phonie mobile. En 2016, seulement 22?% de la population du continent utilisait Internet, contre une moyenne mondiale de 44?%, selon l¡¯Union internationale des t¨¦l¨¦communications (UIT), l'agence des Nations Unies qui traite des questions relatives aux technologies de l'information et de la communication. Et seulement 11?% des Africains ont acc¨¨s ¨¤ l'Internet 3G, qui permet aux op¨¦rateurs mobiles d'offrir une vitesse ¨¦lev¨¦e de traitement de donn¨¦es.
L¡¯UIT note que les personnes les plus susceptibles d¡¯avoir acc¨¨s au num¨¦rique en Afrique sont les hommes vivant dans des zones urbaines ou les villes c?ti¨¨res o¨´ des c?bles sous-marins en fibres optiques sont disponibles.
McKinsey & Company, une firme internationale de conseil en gestion, estime que si l¡¯acc¨¨s ¨¤ Internet atteint le m¨ºme niveau de p¨¦n¨¦tration que le t¨¦l¨¦phone mobile, le PIB de l¡¯Afrique pourrait atteindre 300 milliards de dollars. D'autres experts s'accordent ¨¤ dire qu'un meilleur acc¨¨s ¨¤ la technologie pourrait changer la donne en ce qui concerne le d¨¦veloppement et la r¨¦duction des in¨¦galit¨¦s de revenus en Afrique.
En Afrique subsaharienne, les 60?% de personnes les plus riches sont pr¨¨s de trois fois plus susceptibles d¡¯avoir acc¨¨s ¨¤ Internet que les 40?% de personnes les plus pauvres. Par ailleurs, les personnes qui vivent dans les zones urbaines sont plus de deux fois plus susceptibles d¡¯y avoir acc¨¨s que la population des zones rurales selon le Rapport sur le d¨¦veloppement dans le monde 2016 de la Banque mondiale.
Dividendes num¨¦riques??????
Le rapport sur le d¨¦veloppement dans le monde 2016 de la Banque mondiale rel¨¨ve que les dividendes num¨¦riques, que la Banque qualifie ??d'avantages plus larges que procurent ces technologies au plan du d¨¦veloppement??, sont in¨¦galement r¨¦partis. ??Si l'on veut que les technologies num¨¦riques profitent ¨¤ tous et partout, il faut combler le foss¨¦ num¨¦rique qui subsiste, en particulier en mati¨¨re d'acc¨¨s ¨¤?l'internet ?, affirme la Banque.
Selon la Banque africaine de d¨¦veloppement (BAD), les entreprises qui int¨¨grent les technologies num¨¦riques ¨¤ leurs pratiques cr¨¦eront des emplois et stimuleront les b¨¦n¨¦fices. La banque a annonc¨¦ en 2016 que deux millions d'emplois seraient cr¨¦¨¦s dans le secteur des TIC en Afrique d'ici ¨¤ 2021. Les analystes-programmeurs, les professionnels des r¨¦seaux informatiques et les administrateurs syst¨¨mes et bases de donn¨¦es trouveront des emplois dans ce secteur.
Bien que la Banque mondiale brosse un tableau moins r¨¦jouissant des dividendes num¨¦riques en Afrique, la possibilit¨¦ de cr¨¦ation de millions d¡¯emplois dans le secteur est encourageante pour les jeunes du continent, qui repr¨¦sentent 60?% des ch?meurs africains et sont deux fois plus affect¨¦s par le ch?mage que les adultes. Selon Bitange Ndemo, ancien secr¨¦taire permanent du Minist¨¨re de l'information et des communications du Kenya, les jeunes peuvent facilement profiter des emplois que la r¨¦volution num¨¦rique apporte.
L¡¯instauration de conditions ¨¦gales?
La technologie peut ¨¦galement permettre de combler les in¨¦galit¨¦s caus¨¦es par le foss¨¦ ¨¦ducatif. Selon l¡¯Organisation des Nations Unies pour l¡¯¨¦ducation, la science et la culture, plus d¡¯un cinqui¨¨me des enfants ?g¨¦s de 6 ¨¤ 11 ans ne vont pas ¨¤ l¡¯¨¦cole, ainsi qu¡¯un tiers des jeunes ?g¨¦s de 12 ¨¤ 14 ans. Pr¨¨s de 60?% des jeunes ?g¨¦s de 15 ¨¤ 17 ans ne vont pas ¨¤ l'¨¦cole.?
D'un autre c?t¨¦, au fur et ¨¤ mesure que l'acc¨¨s ¨¤ l'internet mobile se d¨¦veloppera, il sera plus facile de r¨¦duire le foss¨¦ ¨¦ducatif dont souffre le continent. L¡¯apprentissage en ligne continue de cro?tre en raison de son accessibilit¨¦. D¡¯ailleurs, IMARC Group, soci¨¦t¨¦ d'¨¦tudes de march¨¦ ayant des bureaux en Inde, au Royaume-Uni et aux ?tats-Unis, a annonc¨¦ en 2017 que le march¨¦ de l'apprentissage ¨¦lectronique en Afrique repr¨¦sentera 1,4 milliard de dollars d'ici ¨¤ 2022.? Le niveau d¡¯instruction de la main-d¡¯?uvre africaine pourra ainsi s¡¯am¨¦liorer ¨C ce qui permettra aux ¨¦conomies du continent de se renforcer.
Ainsi, Eneza Education, une plateforme d'apprentissage bas¨¦e au Kenya, a d¨¦pass¨¦ le million d'utilisateurs en 2016. Cette plateforme permet aux utilisateurs d'acc¨¦der ¨¤ du mat¨¦riel d'apprentissage gr?ce ¨¤ diverses m¨¦thodes. Les utilisateurs peuvent acc¨¦der aux cours et aux interrogations par SMS pour seulement 10 shillings k¨¦nyans (0,10 USD) par semaine. Eneza s'adresse aux ¨¦tudiants et aux enseignants des zones rurales o¨´ les opportunit¨¦s sont limit¨¦es.
En outre, l'initiative Smart Schools de Samsung permet de fournir aux ¨¦coles du monde entier des tablettes, des ordinateurs et d'autres appareils, et de construire des ¨¦coles fonctionnant ¨¤ l'¨¦nergie solaire dans les zones rurales. Actuellement, 78 ¨¦coles intelligentes ont ¨¦t¨¦ mises en service dans 10 pays africains, notamment en ?thiopie, au Ghana, au Kenya et en Ouganda. La strat¨¦gie de l'entreprise est d'encourager les ¨¦tudiants d¨¦favoris¨¦s ¨¤ utiliser des appareils num¨¦riques.
Les femmes ¨¦tant 50?% moins susceptibles d¡¯utiliser Internet que les hommes, certaines organisations s'efforcent ¨¤ pr¨¦sent de les attirer vers le monde num¨¦rique. Les technologies num¨¦riques peuvent offrir des opportunit¨¦s aux femmes sur le march¨¦ du travail informel en les orientant vers des possibilit¨¦s d'emploi.
Compl¨¦ments analogiques Une forte p¨¦n¨¦tration num¨¦rique est une bonne chose, mais une bonne gouvernance, un climat propice aux affaires, l¡¯¨¦ducation et la sant¨¦, ¨¦galement qualifi¨¦s de ??compl¨¦ments analogiques??, assureront une base solide pour l'adoption de technologies num¨¦riques et permettront de lutter plus efficacement contre les in¨¦galit¨¦s, conseille la Banque mondiale. Selon la Banque, m¨ºme si l¡¯adoption du num¨¦rique se g¨¦n¨¦ralise, les pays qui n¨¦gligent les compl¨¦ments analogiques ne conna?tront pas de hausse de productivit¨¦ ni de r¨¦duction des in¨¦galit¨¦s.
??Ne pas engager les r¨¦formes n¨¦cessaires, c¡¯est prendre plus de retard sur ceux qui les engagent, tandis que l¡¯investissement dans la technologie aussi bien que dans ses compl¨¦ments ouvre la voie ¨¤ la transformation num¨¦rique ?, note Bouthenia Guermazi, gestionnaire des dossiers TIC ¨¤ la Banque mondiale.
La migration num¨¦rique subit toutefois un ralentissement d? ¨¤ l¡¯action d¡¯op¨¦rateurs analogiques obsol¨¨tes qui s¡¯inqui¨¨tent des risques pos¨¦s par la num¨¦risation. L¡¯automatisation constitue une menace pour ceux dont les emplois peuvent ¨ºtre remplac¨¦s par des machines moins co?teuses et plus efficaces, ph¨¦nom¨¨ne qui affecte principalement les groupes d¨¦j¨¤ d¨¦favoris¨¦s. Ainsi, de nombreuses banques et compagnies d'assurance ont des services client automatis¨¦s.?
L¡¯ONU s¡¯est fix¨¦ comme objectif d'assurer une connexion Internet haut d¨¦bit et abordable ¨¤ tous les habitants de la plan¨¨te d¡¯ici ¨¤ 2020. De m¨ºme, l¡¯Union Africaine a lanc¨¦ en 2014 une mission de dix ans pour encourager les pays ¨¤ passer ¨¤ des ¨¦conomies tourn¨¦es vers l¡¯innovation et fond¨¦es sur la connaissance. Cette mission fait partie de son ambitieux Agenda 2063 qui vise ¨¤ transformer la situation socio¨¦conomique et politique du continent.
Le Rwanda m¨¨ne le peloton avec son programme Vision 2020, qui vise ¨¤ faire de lui un pays ¨¤ revenu interm¨¦diaire dot¨¦ d'une ¨¦conomie fond¨¦e sur le savoir d¡¯ici ¨¤ 2020. Au d¨¦but de l'ann¨¦e, le Rwanda a lanc¨¦ son programme Digital Ambassadors, qui recrutera environ 5?000 jeunes et les formera afin qu¡¯ils enseignent des comp¨¦tences num¨¦riques ¨¤ cinq millions de personnes dans les zones rurales.
Malheureusement, la num¨¦risation se situe au bas de la liste des priorit¨¦s de nombreux pays en d¨¦veloppement. Et, selon un r¨¦cent rapport de la Conf¨¦rence des Nations Unies sur le commerce et le d¨¦veloppement (CNUCED), il se peut que les gains de productivit¨¦ issus de la num¨¦risation profitent surtout ¨¤ ceux qui sont d¨¦j¨¤ riches et comp¨¦tents, ce qui est typique des ¨¦conomies bas¨¦es sur les plateformes internet, o¨´ les effets de r¨¦seau (valeur ajout¨¦e au service parce que plus de personnes l¡¯utilisent) profitent ¨¤ ceux qui sont les premiers ¨¤ les adopter et ¨¤ en d¨¦finir les normes.
Dans les pays de l¡¯Organisation de coop¨¦ration et de d¨¦veloppement ¨¦conomiques, organisation ¨¦conomique intergouvernementale regroupant 35 pays o¨´ l'¨¦conomie num¨¦rique a le plus ¨¦volu¨¦, l'utilisation croissante des TIC s'est accompagn¨¦e d'un ¨¦largissement des ¨¦carts de revenus entre riches et pauvres.
Le rapport de la CNUCED indique ¨¦galement que le d¨¦veloppement de politiques ad¨¦quates en mati¨¨re de TIC d¨¦pend de la disposition des pays ¨¤ s'engager dans l'¨¦conomie num¨¦rique et ¨¤ en tirer parti, mais les pays les moins avanc¨¦s sont les moins bien pr¨¦par¨¦s. Pour qu¡¯un plus grand nombre de personnes et d'entreprises dans les pays en d¨¦veloppement soient ¨¤ m¨ºme de participer utilement, la communaut¨¦ internationale devra ¨¦largir son soutien.?
Mme Guermazi exhorte les dirigeants ¨¤ d¨¦velopper une approche globale pour transformer leurs pays plut?t que de s¡¯appuyer sur des initiatives ponctuelles.
??Les dividendes num¨¦riques sont ¨¤ port¨¦e de main??, insiste-t-elle. ??L'avenir semble tr¨¨s prometteur.????