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Emballage de haricots en 脡thiopie. En d茅pit de la forte croissance 茅conomique enregistr茅e dans certains pays d'Afrique, la pauvret茅 persiste sur le continent.

Photo: Panos / Sven Torfinn

Dix sept ann茅es durant, Peter 茅tait op茅rateur machiniste dans une usine de textile sud-africaine. Ce travail, certes mal r茅mun茅r茅, lui permettait cependant de prendre soin de sa famille. Contraint au ch么mage (par la faute des importations 茅trang猫res, moins ch猫res), il vit depuis une descente aux enfers; ceux de la pauvret茅 et de la d茅tresse, explique Claire Ichou, une chercheuse 脿 l'universit茅 du KwaZulu-Natal, qui l'a rencontr茅. "Peter explique en des termes tr猫s douloureux comment il a perdu sa dignit茅. Il dit que sa femme ne le respecte plus, que ses enfants ont faim", 茅crit la chercheuse. Aux yeux de Peter, poursuit-elle, un homme sans emploi n'est pas un homme et il n'y peut rien. Il n'a plus de statut".

Alors que la course vers les objectifs du Mill茅naire pour le d茅veloppement (OMD) entame sa derni猫re ligne droite, nombre de dirigeants africains et d'experts de l'ONU tentent d'attirer l'attention sur les conditions 茅conomiques d'un progr猫s durable. Pour sortir les plus d茅munis de la pauvret茅, disent-ils, il faudra consentir plus d'investissements dans la production agricole et industrielle, cr茅er plus d'emplois et mettre en place des politiques favorisant la croissance 茅conomique. Beaucoup estiment que les OMD ont contribu茅 脿 la mobilisation politique et financi猫re en faveur des pauvres. Mais, remarquent-ils aussi, ces objectifs ne s'attaquent pas v茅ritablement aux causes 茅conomiques et sociales de la pauvret茅, des maladies et des conflits (voir Lutte contre la pauvret茅 : esquisse d'une approche nouvelle et Emplois et 茅quit茅, cl茅s du combat contre la pauvret茅).

La relation entre les OMD et une croissance rapide et 茅quitable a 茅t茅 soulign茅e par des personnalit茅s politiques et des 茅conomistes africains lors du Sommet sur les OMD qui s'est tenu du 20 au 22 septembre dernier au si猫ge de l'ONU 脿 New York. Le Pr茅sident du Malawi, Bingu wa Mutharika, 茅galement pr茅sident en exercice de l'Union africaine (UA), a d茅clar茅 脿 cette occasion : "Au nom de toute l'Afrique, nous exhortons l'ONU 脿 examiner le c么t茅 de l'offre [du d茅veloppement] pour am茅liorer l'acc猫s des citoyens ordinaires, notamment les femmes et les enfants, aux services pr茅vus au titre des OMD. La r茅alisation de la plupart des OMD exige davantage d'茅coles, d'h么pitaux, d'infrastructures rurales, de sites de forage, de barrages et de puits, d'enseignants qualifi茅s, de m茅decins, d'infirmi猫res, d'ing茅nieurs agronomes, de scientifiques鈥� Penchons-nous sur les objectifs du Mill茅naire pour le d茅veloppement du c么t茅 de l'offre si nous voulons les atteindre".

Une industrie de la p锚che, pas un filet

Pour l'Administratrice du Programme des Nations Unies pour le d茅veloppement, Helen Clark, les taux de croissance 茅lev茅s enregistr茅s dans de nombreux pays africains entre 1998 et 2008 - stimul茅s en grande partie par la hausse des cours des mati猫res premi猫res - n'ont r茅duit ni le ch么mage, ni la pauvret茅. Mme Clark a estim茅 que la r茅alisation des OMD impliquait la mise en place de nouvelles politiques macro茅conomiques mettant l'accent sur la croissance 脿 long terme, la cr茅ation d'emplois, la diversification, l'industrialisation et la productivit茅.

Les Africains savent p锚cher mais ils ont besoin d'aide pour b芒tir une industrie de la p锚che, estime Donald Kaberuka, le pr茅sident de la Banque africaine de d茅veloppement.

Photo: AP / Schalk van Zuydam

Le Premier ministre tanzanien, Mizengo K. Peter Pinda, a estim茅 que la cr茅ation d'emplois et de d茅bouch茅s dans les zones rurales 茅tait indispensable aux progr猫s accomplis par son pays dans la r茅alisation des OMD. Propos relay茅s par le Premier ministre danois Lars Lokke Rasmussen qui, soulignant que les progr猫s sur les OMD se traduisent par une augmentation du nombre d'enfants scolaris茅s. "Mais scolaris茅s pourquoi", s'est-il interrog茅. "En tant que partenaires de d茅veloppement nous devons veiller 脿 ce que la croissance favorise la libert茅 et accroisse les chances de chacun d'茅chapper 脿 la pauvret茅", a-t-il poursuivi. La Tanzanie, 脿 elle seule, a-t-il pr茅cis茅, doit cr茅er tous les ans 700 000 nouveaux emplois pour r茅pondre aux besoins des jeunes 茅tudiants qui rejoignent le march茅 du travail.

Donald Kaberuka, le pr茅sident de la Banque africaine de d茅veloppement, a 茅t茅 le plus applaudi lorsqu'il a fait remarquer qu'脿 l'茅poque o霉 les donateurs ont lanc茅 leurs premiers programmes d'aide en Afrique "ils nous ont apport茅 du poisson, mais on leur a dit qu'on en avait d茅j脿. Ils sont revenus pour nous apprendre 脿 p锚cher, mais on leur a dit qu'on savait d茅j脿 comment s'y prendre". Ce dont l'Afrique a besoin aujourd'hui, a-t-il lanc茅 sourire en coin, ce sont des partenaires qui "nous aident 脿 monter une industrie de la p锚che" qui encourage les activit茅s de traitement et de conditionnement, favorise la cr茅ation d'emplois stables et am茅liore la comp茅titivit茅 africaine sur le march茅 mondial.

"Prendre le contr么le"

La cr茅ation d'emplois et le d茅veloppement 茅conomique rev锚tent plus d'importance que jamais 脿 la suite de la crise 茅conomique mondiale. Ces deux enjeux sont d茅cisifs en raison de l'incapacit茅 des donateurs traditionnels de l'Afrique 脿 honorer leurs engagements de doubler leur aide au d茅veloppement au continent. Le Pr茅sident Kagame du Rwanda a d茅clar茅 lors du Sommet que "les OMD doivent demeurer la priorit茅 de la communaut茅 internationale". Il a n茅anmoins soulign茅 qu'il appartenait 脿 l'Afrique de tracer sa propre voie. "Le d茅bat sur les OMD a souvent 茅t茅 domin茅 par quelques voix, celles des organisations non gouvernementales par exemple, notamment des pays d茅velopp茅s. Malgr茅 leurs bonnes intentions, leur approche est souvent conditionn茅e par le paternalisme plut么t que l'esprit de partenariat, par la d茅marche caritative plut么t que l'autosuffisance, par des promesses non tenues plut么t que des changements v茅ritables".

Or, a poursuivi Paul Kagame : "Nous ne pouvons plus nous en remettre 脿 la bonne volont茅 d'autres nations. Nous n'en avons pas besoin et telle n'est pas notre intention. Nous devons assumer notre r么le de dirigeants, prendre pleine possession de la question du d茅veloppement de nos pays et faire ce que nos citoyens attendent de nous".

"Repositionner les OMD"

Supachai Panitchpakdi, Secr茅taire g茅n茅ral de la Conf茅rence des Nations Unies sur le commerce et le d茅veloppement (CNUCED), a attir茅 l'attention sur le fait que l'茅largissement des services sociaux, bien que n茅cessaire, ne pouvait pas perdurer sans une base 茅conomique solide.

La priorit茅 accord茅e aux services sociaux et l'accroissement des in茅galit茅s exigent, a-t-il not茅 que l'on "replace les OMD dans un cadre de d茅veloppement plus vaste, qui met l'accent sur l'investissement, en particulier dans la capacit茅 de production, la distribution 茅quitable des ressources, la marge d'action et la cr茅ation d'emplois viables comme principaux facteurs de r茅duction de la pauvret茅".

M. Panitchpakdi a conclu en affirmant que "l'une des raisons pour lesquelles nous risquons de manquer plusieurs OMD est que le mod猫le 茅conomique dont ils d茅pendent ne prend pas en compte le type de valeurs qui sous-tendent une "茅conomie suffisante". Pour s'aligner sur la vision exprim茅e en 2000 et atteindre ainsi les OMD, que ce soit en 2015 ou plus tard, nous devons retrouver le courage et l'ambition de modifier notre mode de d茅veloppement 茅conomique". 鈥傗��