Depuis son entr茅e en fonction en mars 2020, le secr茅taire g茅n茅ral de la zone de libre-茅change continentale africaine (ZLECA), Wamkele Mene, n'a cess茅 de marteler le besoin urgent d'une mise en 艙uvre efficace du pacte commercial pour stimuler l'茅conomie africaine menac茅e par la r茅cession.
M. Mene a r茅it茅r茅 ce th猫me le 3 d茅cembre lors du lancement virtuel du rapport sur l'avenir : Mettre la ZLECA au service des femmes et des jeunes.听
Produit par le Programme des Nations Unies pour le d茅veloppement (PNUD) et le secr茅tariat de la ZLECA, ce rapport de 100 pages d茅taille les d茅fis et les opportunit茅s du commerce intra-africain, et refl猫te les points de vue de certains des plus grands experts du d茅veloppement, d茅cideurs politiques et chefs d'entreprise d'Afrique, ainsi que les exp茅riences v茅cues par les commer莽ants, y compris les femmes et les jeunes.
Les auteurs pr茅sentent le rapport comme "un calendrier qui refl猫te les ambitions et les efforts pour commencer 脿 commercer dans le cadre de l'accord ZLECA, pr茅vu pour janvier 2021".
La ZLECA n'est pas seulement un accord commercial, c'est aussi un instrument de d茅veloppement destin茅 脿 sortir 100 millions d'Africains de la pauvret茅 d'ici 2035, a d茅clar茅 M. Mene lors du lancement.
Les contributeurs s'efforcent de promouvoir la participation des femmes et des jeunes en tant que participants et b茅n茅ficiaires.
鈥淟a ZLECA est une opportunit茅 d'exploiter les talents des jeunes Africains et des femmes pour assurer des avantages 脿 tous", a not茅 M. Mene.
Edem Adzogenu, co-pr茅sident d'AfroChampions, une plateforme qui promeut les entreprises africaines, met en garde dans sa contribution : 鈥淟A ZLECA est l'une des plus grandes r茅alisations de l'Afrique du 21e si猫cle, mais elle 茅chouera si elle n'est pas inclusive dans sa conception et sa mise en 艙uvre".
Il est facile de faire valoir que les femmes et les jeunes sont des acteurs cl茅s du d茅veloppement 茅conomique de l'Afrique : le secteur informel de l'Afrique repr茅sente 85 % de l'activit茅 茅conomique totale du continent ; et si les femmes repr茅sentent 90 % de la main-d'艙uvre du secteur informel, elles constituent 70 % des commer莽ants informels.
En outre, 60 % de la population africaine a moins de 25 ans, ce qui fait de l'Afrique le continent le plus jeune du monde.
Alors que l'un des principaux objectifs de l'accord est une augmentation spectaculaire du commerce intra-africain, Ahunna Eziakonwa, sous-secr茅taire g茅n茅rale et directrice du bureau r茅gional du PNUD pour l'Afrique, a d茅crit le niveau actuel du commerce intra-africain de 18 % comme "une mise en accusation".听
Une des cons茅quences de ce faible niveau de commerce intra-africain est la perte d'emplois bien r茅mun茅r茅s, a soulign茅 Mme Eziakonwa dans son discours d'ouverture lors du lancement.
Les femmes doivent 锚tre profond茅ment engag茅es dans le commerce transfrontalier, elles doivent avoir acc猫s au financement, au r茅seau de production et aux march茅s, a-t-elle soutenu. Le PNUD, a ajout茅 Mme Eziakonwa, s'efforce d'aider les femmes 脿 acc茅der aux march茅s virtuels et 脿 participer au commerce 茅lectronique.
Godwin Benson, PDG de Tuteria, une plateforme d'apprentissage en ligne au Nigeria, est l'un des jeunes entrepreneurs qui ont contribu茅 au rapport.听
M. Benson explique son succ猫s limit茅 dans l'expansion de son entreprise sur d'autres march茅s du continent et fournit une liste de choses 脿 faire pour am茅liorer le commerce des services 脿 travers les fronti猫res.
Tout d'abord, il faut comprendre les "besoins et les nuances des autres march茅s africains" afin que les produits et les services soient mieux adapt茅s aux consommateurs des diff茅rents pays, 茅crit-il.
Deuxi猫mement, il faut s'engager dans des partenariats strat茅giques pour faciliter l'acc猫s aux march茅s 茅trangers.
Troisi猫mement, il propose un syst猫me de paiement transfrontalier sans faille. "Il devrait 锚tre facile pour les clients en 脡gypte ou au Rwanda de payer une entreprise au Nigeria... Sans des paiements intra-africains sans faille, des entreprises comme Tuteria, en particulier celles dirig茅es par de jeunes entrepreneurs, risquent de ne pas pouvoir commercer sur le continent".听
Enfin, M. Benson recommande : "Il devrait 锚tre facile et abordable pour une entreprise kenyane de s'enregistrer et de commencer ses activit茅s au Nigeria, et vice versa. Il serait pr茅f茅rable que ce processus puisse 锚tre effectu茅 en ligne".
Le rapport souligne 茅galement les effets d'茅tranglement de COVID-19 sur l'茅conomie africaine et accentue les possibilit茅s de reprise durable.
Le coordinateur du Centre africain de politique commerciale 脿 la Commission 茅conomique des Nations unies pour l'Afrique, David Luke, 茅crit que la ZLECA pourrait stimuler la reprise post-pand茅mique et faciliter "une croissance large et inclusive, en absorbant la jeunesse africaine dans des activit茅s productives et en renfor莽ant l'茅galit茅 des sexes".
S'appuyant sur l'analyse de la Banque mondiale, M. Luke souligne que la mise en 艙uvre de la ZLECA ainsi que de l'accord de facilitation du commerce de l'Organisation mondiale du commerce "pourrait conduire 脿 une augmentation des salaires allant jusqu'脿 10 % et contribuer 脿 combler l'茅cart salarial entre les sexes gr芒ce 脿 des augmentations plus importantes pour les travailleurs non qualifi茅s et les femmes".
Il pr茅voit que l'agriculture et la transformation agroalimentaire g茅n茅reront des emplois bien r茅mun茅r茅s pour les femmes qui constituent environ 50 % de la main-d'艙uvre dans ces secteurs. Les femmes b茅n茅ficieront 茅galement des emplois cr茅茅s dans les secteurs de l'茅ducation, de la sant茅 et des services tertiaires.
M. Luke ajoute que si les femmes qui participent au commerce transfrontalier informel sont vuln茅rables au harc猫lement et 脿 la violence, l'accord de libre-茅change d'Afrique pourrait att茅nuer ces probl猫mes lorsque les op茅rations informelles sont officialis茅es.
Changer la donne pour les femmes
L'augmentation des emplois dans l'industrie manufacturi猫re, l'agro-industrie et d'autres secteurs pourrait changer la donne pour des millions de femmes et de jeunes Africains, estime Angela Lusigi, repr茅sentante r茅sidente du PNUD au Ghana, dans sa contribution au rapport.听
Pour tirer pleinement profit de l'AfCFTA, Mme Lusigi soutient que les femmes commer莽antes doivent avoir acc猫s 脿 l'information et aux possibilit茅s de formation sur les r茅seaux commerciaux et que leur voix doit 锚tre entendue dans "les n茅gociations, l'茅laboration des politiques et la prise de d茅cision de l'AfCFTA".
Elle ajoute que pour tirer parti des riches ressources humaines de l'Afrique dans le cadre de la ZLECA, il faut refl茅ter les besoins des femmes et des jeunes dans les cadres juridiques et techniques qui sont mis en place.
"Faciliter les investissements transfrontaliers, prot茅ger les droits de propri茅t茅 intellectuelle, collaborer en mati猫re de douanes et de fiscalit茅 et mettre en 艙uvre la facilitation des 茅changes" garantira "des opportunit茅s plus 茅quitables et durables, ce qui est essentiel 脿 l'efficacit茅 de la lib茅ralisation en cours du commerce des services", affirme Mme Lusigi.
M. Luke ajoute que "le march茅 continental lib茅ralis茅 fourni par la ZLECA pr茅sente une opportunit茅 pour la production locale de produits pharmaceutiques et de fournitures de sant茅 脿 l'茅chelle".
Il d茅plore les effets d茅vastateurs du changement climatique sur les 茅conomies africaines, actuellement et 脿 l'avenir, en d茅clarant que, par exemple, dans un sc茅nario de fort r茅chauffement, le Soudan et la Tanzanie pourraient perdre pr猫s de 18,6 % de leur PIB d'ici 2050.
Il maintient n茅anmoins que le passage 脿 une 茅nergie propre au niveau mondial pourrait "laisser l'Afrique bloqu茅e avec des actifs de combustibles fossiles d茅valu茅s... En limitant le r茅chauffement climatique 脿 2掳C, jusqu'脿 26 %, 34 % et 90 % des r茅serves de gaz, de p茅trole et de charbon, respectivement, de l'Afrique pourraient rester inutilis茅es".
N茅anmoins, les pertes des r茅serves de combustibles fossiles inexploit茅es pourraient 锚tre compens茅es par les opportunit茅s dans les cha卯nes de valeur autour des min茅raux verts.听
Par exemple, M. Luke 茅crit : "La R茅publique d茅mocratique du Congo poss猫de 47 % des r茅serves mondiales de cobalt (n茅cessaire 脿 la fabrication des batteries), tandis que la Namibie et le Zimbabwe poss猫dent 100 % des r茅serves mondiales de c茅sium et 89 % des r茅serves mondiales de rubidium (tous deux utilis茅s dans les syst猫mes de positionnement global 脿 cellules mobiles).听
"En effet, 42 des 63 茅l茅ments utilis茅s par les technologies 脿 faible teneur en carbone et dans la r茅volution industrielle (RI) 4.0 se trouvent en Afrique", soulignant que le continent se trouve au sommet d'un tr茅sor d'opportunit茅s vertes.
"L'accord de libre-茅change africain pourrait 锚tre un bon moyen de remettre les choses en perspective, en offrant la perspective d'une reprise des solutions locales en donnant un coup de fouet aux exportations et, ce faisant, en renfor莽ant les capacit茅s de tous les participants au commerce transfrontalier, en particulier les femmes et les jeunes", commente Mme Eziakonwa, dans son avant-propos au rapport.
