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Hindou Ibrahim, vivre en harmonie avec la nature

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Hindou Ibrahim, vivre en harmonie avec la nature

Devi Palanivelu
Afrique Renouveau: 
11 Mai 2022
Hindou Ibrahim, SDG Advocate and Indigenous Rights Activist
Hindou Ibrahim, SDG Advocate and Indigenous Rights Activist

LeĚýSommet « planète Terre », qui s’est tenu il y a trente ans dans la ville brĂ©silienne de Rio de Janeiro, a ouvert la voie Ă  la crĂ©ation de trois grandes conventions sur l’environnement, plus prĂ©cisĂ©ment sur la diversitĂ© biologique, les changements climatiques et la dĂ©sertification.Ěý

Alors que les pays se rĂ©unissent en 2022 au sujet de ces trois conventions, Hindou Ibrahim,ĚýĚýet militante pour les droits des peuples autochtones, parle du rĂ´le indispensable que jouent les communautĂ©s autochtones du monde entier dans la protection de la vie sur notre planète – sa biodiversitĂ©, ses terres et son climat.

« Pour nous, peuples autochtones, nous ne sommes pas diffĂ©rents des autres espèces ; nous sommes seulement une espèce de la nature, donc nous ne pouvons pas nuire aux autres. C’est pourquoi vivre en harmonie, c’est Ă©tablir un lien les uns entre les autres, se respecter mutuellement et essayer de maintenir l’équilibre sans nuire aux autres espèces de la nature », explique Hindou Ibrahim. Ěý

Elle connaĂ®t bien les processus internationaux relatifs aux changements climatiques, aux droits humains et Ă  la durabilitĂ©. En 1999, Ă  tout juste 15 ans, elle a fondĂ© l’Association des Femmes Peules et des Peuples Autochtones du Tchad, une organisation communautaire qui dĂ©fend les droits des filles et des femmes dans la communautĂ© Mbororo du Tchad, Ă  laquelle elle appartient. Dans les annĂ©es qui ont suivi, elle est devenue la coprĂ©sidente du Forum international des peuples autochtones sur les changements climatiques et compte aujourd’hui parmi les 17 Ă©minentes figures de proue internationales connues sous le nom de « DĂ©fenseurs des ODD ».Ěý

Depuis des siècles, les communautĂ©s autochtones comme la sienne protègent notre environnement. Elles protègent plus deĚý20 %Ěýdes terres de notre planète et 80 % de sa biodiversitĂ©.Ěý

« Cela fait des siècles et des siècles que mes ancêtres utilisent l’écosystème. Ils connaissent l’écosystème et se déplacent d’un endroit à l’autre pour trouver du travail dans les pâturages. Ce mode de vie permet de rendre à la nature, de l’aider à se régénérer de manière naturelle. Ainsi, tous les peuples autochtones du monde ont ce lien plus profond avec la nature. Et c’est aussi la raison pour laquelle nous protégeons 80 % de la biodiversité mondiale. Parce que pour nous, ce n’est pas une passion, ni un travail. C’est notre façon de vivre. Et c’est ce que nous faisons depuis des générations. »

Leur mode de vie – fondĂ© sur les savoirs traditionnels et le respect de la nature – et leur aptitude Ă  gĂ©rer les ressources naturelles de manière durable assurent les moyens de subsistance et la vie deĚý, soit environ une personne sur trois dans le monde.

« Nous sommes très heureux de constater qu’aujourd’hui, tout le monde – depuis le secteur privĂ© jusqu’au secteur public en passant par les agences de l’ONU – reconnaĂ®t l’importance des peuples autochtones et leur rĂ´le dans la protection de la biodiversitĂ©. Dans le cadre de la lutte contre les changements climatiques, on admet enfin que les peuples autochtones dĂ©tiennent une solution ; nous ne sommes pas seulement des victimes des changements climatiques, » dĂ©clare Hindou Ibrahim.Ěý

Les communautĂ©s autochtones ont toujours Ă©tĂ© tenues Ă  l’écart des nĂ©gociations mondiales officielles sur les changements climatiques. Leur parole a finalement Ă©tĂ© entendue au mĂŞme titre que celle des gouvernements en 2015, lorsque laĚýĚýa permis la crĂ©ation de laĚý.

« Lorsque nous parlons de la nature, lorsque nous parlons du climat, la plupart du temps, les gens parlent beaucoup mais n’agissent pas, peut-être qu’il leur est difficile de trouver le moyen d’agir. D’où la nécessité de placer le rôle des peuples autochtones au centre des discussions, car nous ne faisons pas que parler, nous agissons. Nous souhaitons que ceux qui parlent nous emboîtent le pas et passent à l’action. Si nous avions agi pendant toutes ces années, nous ne serions pas aujourd’hui aux prises avec les conséquences des changements climatiques. »

Lors de la ConfĂ©rence de 2021 sur les changements climatiques Ă  Glasgow, les gouvernementsĚýĚýpour stopper et inverser la perte de la couverture forestière et la dĂ©gradation des terres d’ici 2030. Une enveloppe de 1,7 milliard de dollars est consacrĂ©e au financement des efforts dĂ©ployĂ©s par les communautĂ©s autochtones pour la conservation des forĂŞts tropicales. Ěý

Cependant, les quelque 480 millions de membres des communautés autochtones répartis dans au moins 90 pays ont besoin d’aide pour protéger les divers écosystèmes – depuis les glaciers de l’Arctique jusqu’aux steppes d’Asie centrale en passant par les savanes d’Afrique – qui sont menacés par les changements climatiques.

« Imaginez venir dans un pays comme le mien, le Tchad. Au nord, vous trouverez uniquement du dĂ©sert ; si vous descendez un peu, vous trouverez les rĂ©gions du Sahara ; si vous allez encore un peu plus loin, vous trouverez la savane. Et après la savane, vous trouverez les forĂŞts tropicales. Que se passe-t-il avec les changements climatiques ? [En raison de] la progression de la dĂ©sertification, les populations du dĂ©sert se sont dĂ©placĂ©es vers le Sahel, les populations du Sahel se sont dĂ©placĂ©es vers les savanes et celles des savanes se sont dĂ©placĂ©es vers les forĂŞts tropicales. Et cela correspond aussi Ă  la façon dont les peuples utilisent l’écosystème prĂ©sent. En dĂ©finitive, il n’est pas possible de faire le choix de protĂ©ger uniquement les forĂŞts tropicales. Lorsque vous investissez des fonds, vous devez penser Ă  l’ensemble de l’écosystème qui est interconnectĂ©, depuis les ocĂ©ans jusqu’aux glaciers », souligne Hindou Ibrahim. Ěý

Ces dernières annĂ©es, les scientifiques les plus Ă©minents du monde ontĚýĚýles peuples autochtones comme figurant parmi les « meilleurs gardiens de l’environnement », en mettant en Ă©vidence le rĂ´le central qu’ils jouent dans la prĂ©servation de la vie sur notre planète. Leurs savoirs traditionnels – qui sont Ă©troitement liĂ©s Ă  leurs terres, Ă  leurs territoires et Ă  leurs ressources – peuvent contribuer Ă  mettre fin Ă  l’insĂ©curitĂ© alimentaire, Ă  lutter contre les changements climatiques et Ă  inverser la dĂ©gradation des terres et la perte de biodiversitĂ©.Ěý

« Partout dans le monde, nous sommes confrontés à de nombreuses crises, qu’il s’agisse de l’environnement, de la santé ou des guerres. Mais quand nous réfléchissons aux conséquences de toutes ces crises, elles relèvent de la survie de l’humain et de la planète. Nous devons donc tous agir pour lutter contre les changements climatiques et protéger le monde des guerres qui éclatent aux quatre coins de la planète – qu’il s’agisse de la sécurité alimentaire, de l’eau, de la biodiversité ou de l’insécurité humaine, tout est lié aux changements climatiques. Pour vivre de manière durable, nous devons agir. »


L'interview a d'abord été publiée ici dans le cadre de la série des leaders d'opinion sur le climat.

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