Les drones prot¨¨gent les civils
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Afrique Renouveau : J¡¯aimerais d¡¯abord conna?tre votre point de vue sur le r¨¦cent rapport sur les op¨¦rations de maintien de la paix, qui recommande? notamment l¡¯utilisation d¡¯¨¦quipements de haute technologie,? parmi lesquels? des? engins sans pilote ou drones, dans le cadre des missions de maintien de la paix.
Herv¨¦ Ladsous : Ce rapport s¡¯inspire de plusieurs initiatives lanc¨¦es il y a plus d¡¯un an. ? l¡¯¨¦poque, j¡¯avais demand¨¦ ¨¤ un groupe d¡¯experts de se pencher sur le recours ¨¤ l¡¯innovation technologique dans le cadre des op¨¦rations de maintien de la paix. Ces experts ont fait plusieurs recommandations, dont un grand nombre ont d¨¦j¨¤ ¨¦t¨¦ mises en ?uvre. Comme vous l¡¯avez not¨¦, les? engins sans pilote sont la partie la plus visible de cet ¨¦ventail de propositions. Je tiens ¨¤ pr¨¦ciser que? les engins que nous utilisons ne sont pas? arm¨¦s. Nous les utilisons uniquement ¨¤ des fins? de surveillance. Ils? sont? aujourd¡¯hui d¡¯usage relativement courant. Nous avons commenc¨¦ ¨¤ nous en servir il y a un peu plus de deux ans en RDC. Aujourd¡¯hui, nous d¨¦ployons des drones de surveillance de tous types, dans des objectifs aussi bien tactiques que strat¨¦giques. Nous les avons ainsi d¨¦ploy¨¦s au Mali et en Centrafrique. J¡¯aimerais aussi en d¨¦ployer au Sud-Soudan, car ils sont pour nous un moyen d¡¯am¨¦liorer nos performances. Les engins sans pilote permettent de mieux prot¨¦ger les populations civiles, car ils permettent d¡¯obtenir des images en temps r¨¦el des situations sur le terrain. Ils permettent d¡¯agir plus rapidement et de mani¨¨re plus d¨¦cisive. Ils permettent aussi d¡¯am¨¦liorer la s¨¦curit¨¦ de notre personnel en lui donnant la possibilit¨¦ de pr¨¦voir les attaques ou les embuscades qui sont sur le point d¡¯¨ºtre commises. Cela donne les moyens de se pr¨¦parer et parfois m¨ºme de sauver des vies. Par exemple, il y a un an et demi en RDC, nous avons fait voler un de nos appareils au-dessus du lac Kivu jusqu¡¯¨¤ l¡¯a¨¦roport de Goma. Depuis son abri, le pilote a vu sur son ¨¦cran un bateau qui venait de chavirer. Cela nous a permis d¡¯envoyer des secours et de sauver 16 personnes de la noyade. Il est certain que nous avons eu de la chance, mais cela d¨¦montre la polyvalence des engins sans pilote et leur utilit¨¦ dans le cadre des op¨¦rations de maintien de la paix.
Cela fait deux ans ¨¤ peu pr¨¨s que les engins sans pilote ont ¨¦t¨¦ d¨¦ploy¨¦s dans l¡¯est de la RDC. En quoi? ce d¨¦ploiement a-t-il chang¨¦ la donne pour ce qui est de la lutte contre les forces antigouvernementales ?
Nous avons am¨¦lior¨¦ notre vision du terrain. Nous voyons les groupes qui sont aux aguets. Sur les photos que j¡¯ai pu voir et qui ont ¨¦t¨¦ prises par les drones, il arrive m¨ºme qu¡¯on reconnaisse les visages. Nous pouvons d¨¦sormais savoir ce qui se passe sur le terrain? et minimiser les risques ou intervenir de mani¨¨re pr¨¦ventive. Nous? disposons de beaucoup de moyens dans l¡¯est de la? RDC : nous avons des h¨¦licopt¨¨res d¡¯attaque, de l¡¯artillerie, un mandat solide. Le but est de mettre fin aux d¨¦g?ts incroyables dont se sont rendus responsables depuis des ann¨¦es les groupes arm¨¦s qui ont provoqu¨¦ la fuite de millions de personnes et en ont fait des r¨¦fugi¨¦s ou des personnes d¨¦plac¨¦es, qui ont viol¨¦ des centaines de milliers de femmes,? ont enr?l¨¦? des dizaines de milliers d¡¯enfants? et pill¨¦ les ressources des provinces du Kivu. Il fallait y mettre fin. C¡¯est pourquoi le Conseil de s¨¦curit¨¦ nous a donn¨¦ un mandat pour neutraliser ces groupes arm¨¦s. C¡¯est ce que nous tentons de faire, mais la? t?che est difficile.
En dehors des? engins sans pilote,? quel autre mat¨¦riel de haute technologie utilisez-vous ?
Je dirais que nous nous servons beaucoup des donn¨¦es que nous collectons: nous l¡¯avons fait juste ¨¤ temps pour le processus ¨¦lectoral en Centrafrique et pendant la visite du pape dans ce pays. Pour la premi¨¨re fois dans le cadre d¡¯une de nos missions, nous avons ¨¦t¨¦ en mesure de d¨¦ployer ¨¤ Bangui,? la capitale,? un syst¨¨me qui utilise des ballons captifs transportant? toute une s¨¦rie de d¨¦tecteurs et de cam¨¦ras infrarouges et d¡¯autres ¨¦quipements qui ont permis? de surveiller la ville. Nous avions les moyens de voir en temps r¨¦el si une manifestation s¡¯amor?ait quelque part? ou si des groupes hostiles se rassemblaient, et d¡¯agir rapidement si n¨¦cessaire. Dans le nord du Mali o¨´ nous nous trouvons actuellement, nous sommes en train de d¨¦ployer des radars de contre-batterie qui nous permettront de r¨¦pondre aux attaques des terroristes ou des djihadistes qui bombardent r¨¦guli¨¨rement nos camps ¨¤ coups? de mortier et de roquettes. Ils ont encore r¨¦cemment tu¨¦ trois des n?tres. Les radars de contre-batterie nous permettent de r¨¦pliquer sans attendre. La technologie nous permet beaucoup de choses et le Secr¨¦taire-g¨¦n¨¦ral [de l¡¯ONU] y croit beaucoup. Elle nous permet aussi, entre autres, de r¨¦duire l¡¯empreinte carbone des op¨¦rations de maintien de la paix, d¡¯¨ºtre plus respectueux de l¡¯environnement et de r¨¦duire notre consommation de carburant. ? ? ? ?
On a pu constater des h¨¦sitations de la part de certains ?tats Membres s¡¯agissant de l¡¯utilisation d¡¯ ¨¦quipements de haute technologie dans le cadre des missions de maintien de la paix,? ceux-ci craignant notamment qu¡¯on les utilise pour collecter autre chose que du renseignement. Qu¡¯avez-vous fait pour apaiser ces craintes ?
Tout d¡¯abord, je dirais que les craintes qui s¡¯expriment aujourd¡¯hui sont moindres? que celles qui s¡¯exprimaient il y a trois ans, quand on ne savait pas grand-chose encore [sur les engins? sans pilote]. Nous avons aussi appris beaucoup de choses sur cette technologie ¨¤ mesure que nous avancions. Il s¡¯agit moins de faire du renseignement que de collecter de l¡¯information. L¡¯objectif est de savoir ce qui se passe autour de nous ¨¤ un moment donn¨¦. Dans le nord du Mali par exemple, sans oreilles et sans yeux nous ne pourrions pas faire notre travail. Il s¡¯agit simplement? de se procurer des outils ad¨¦quats. Je crois que dans leur grande majorit¨¦, les ?tats Membres en sont d¨¦sormais conscients.?
Diriez-vous que l¡¯avenir des op¨¦rations de maintien de la paix au 21¨¨me si¨¨cle r¨¦side dans ce type de technologies ?
C¡¯est certainement l¡¯une des voies ¨¤ suivre. Ce n¡¯est pas la seule, mais il me semble qu¡¯il nous faut reconna?tre la n¨¦cessit¨¦ de disposer d¡¯instruments modernes et adapt¨¦s. On peut aujourd¡¯hui acheter des engins sans pilote partout, m¨ºme ¨¤ des fins r¨¦cr¨¦atives. Les entreprises elles-m¨ºmes s¡¯en servent de plus en plus. D¨¨s lors, pourquoi nous priver d¡¯une technologie ais¨¦ment? disponible ?
Les Nations Unies ont par le pass¨¦ eu des difficult¨¦s ¨¤ obtenir des pays qu¡¯ils fournissent des h¨¦licopt¨¨res de combat. Pensez-vous que les engins sans pilote puissent remplacer ce type d¡¯h¨¦licopt¨¨res ?
Certainement pas. Nous sommes tr¨¨s clairs sur ce point : les engins sans pilote sont uniquement destin¨¦s ¨¤ des fins de surveillance. Ils sont et resteront non arm¨¦s, car le fait qu¡¯ils soient t¨¦l¨¦guid¨¦s cr¨¦e des risques potentiels. Nous ne souhaitons pas nous engager sur cette voie. Avec les h¨¦licopt¨¨res d¡¯attaque, il y a des r¨¨gles d¡¯engagement tr¨¨s pr¨¦cises. Ils entrent en action et volent dans des circonstances extr¨ºmement pr¨¦cises aussi, et toujours sous le contr?le direct du commandant de la force. En outre, les proc¨¦dures que nous appliquons sont tr¨¨s strictes.
Vous vous servez d¡¯engins sans pilote et d¡¯autres ¨¦quipements de haute technologie depuis maintenant quelques ann¨¦es. Quelles le?ons l¡¯ONU a-t-elle tir¨¦es de cette exp¨¦rience ? Faut-il poursuivre dans cette voie ?
Absolument ! Je pense que, comme vous le dites, il faut poursuivre dans cette voie. Mais il faut garder ¨¤ l¡¯esprit que la situation ¨¦volue constamment dans ce? domaine. Je viens de signer un accord de coop¨¦ration avec la R¨¦publique de Singapour. Ils vont nous aider ¨¤ mettre au point? un nouveau logiciel qui nous permettra d¡¯obtenir des images en temps r¨¦el de la situation en mati¨¨re de s¨¦curit¨¦ dans un pays donn¨¦, ce qui actuellement nous est impossible. Au Mali par exemple, nous serons en mesure de conna?tre la situation ¨¤ tout moment, quelle que soit la zone g¨¦ographique. C¡¯est un outil que nous aurions d? nous procurer depuis d¨¦j¨¤ longtemps. Mais nous sommes en train? de r¨¦soudre les probl¨¨mes au fur et ¨¤ mesure qu¡¯ils se pr¨¦sentent.?